Lorsque nous nous penchons sur le monde des entreprises, il devient rapidement évident que celles-ci ne sont pas de simples entités froides, des pièces de « Monopoly » gérées par des règles impitoyables. Au contraire, les entreprises entretiennent des liens complexes avec leurs concurrents, l’État (notamment en termes de fiscalité) et la société dans son ensemble. Cet article explore les sociétés de personnes et les sociétés de capitaux. Nous pourrons alors voir comment la forme d’entreprise choisie peut influencer ses objectifs et son comportement. Dans des prochains articles, nous allons étudier plus en profondeur la typologie de ces différentes sociétés.
Diversité des Structures d’Entreprise
Un point de départ essentiel dans la compréhension de ces liens est de reconnaître que toutes les entreprises ne se ressemblent pas. En effet, les différentes formes de sociétés ne partagent pas le même rapport au capital et à la gouvernance. Il est crucial de se poser la question : qui dirige effectivement l’entreprise et est-ce toujours celui qui détient le capital ?
Jean Tirole, économiste renommé, soulève une hypothèse intéressante selon laquelle les entreprises n’ont pas toutes le même fonctionnement, en grande partie en fonction de la propriété. Il rappelle que les sociétés par actions ne sont qu’une des nombreuses formes de société. Il existe des sociétés familiales, des coopératives, des mutuelles et bien d’autres. Dans une société familiale, la préoccupation principale peut être la durabilité et la continuité de l’entreprise, tandis que dans une entreprise par actions, l’accent est mis sur le retour sur investissement pour les actionnaires.
Un exemple illustratif serait la comparaison entre Peugeot, une entreprise automobile familiale, et une entreprise par actions comme BMW. Ces deux entreprises fonctionnent avec des logiques fondamentalement différentes, même si elles opèrent dans le même secteur. Peugeot, en tant qu’entreprise familiale, accorde une importance particulière à la continuité de l’entreprise au fil des générations. En revanche, BMW, une société par actions, privilégie un rendement financier maximal pour ses actionnaires.
Dans cette perspective, Tirole distingue deux grandes catégories d’entreprises : les « sociétés de personnes » et les « sociétés de capitaux ».
Les sociétés de personnes
Dans les sociétés de personnes, le capital humain et le réseau familial sont souvent au cœur de la gouvernance, mettant en avant les individus plutôt que le capital. Par exemple, les coopératives ou les mutuelles se conforment souvent à ce modèle. La filiation et les relations personnelles jouent un rôle central dans la prise de décisions.
Quelles sont les caractéristiques d’une société de personne ?
1 – Répartition du capital en parts sociales : Dans les sociétés de personnes, les associés reçoivent des parts sociales en échange de leurs apports. Contrairement aux actions détenues par les actionnaires dans les sociétés de capitaux, ces parts sociales ne sont pas négociables sur des marchés comme la bourse.
2 – Responsabilité indéfinie et solidaire des associés : Les associés sont collectivement et individuellement responsables des dettes de l’entreprise. Dès lors, un créancier peut poursuivre un seul associé pour l’intégralité de sa créance, et les associés sont responsables des dettes de l’entreprise avec l’ensemble de leurs biens personnels.
3 – Agrément unanime des associés pour la cession des parts sociales : La cession des parts sociales ne peut avoir lieu qu’après avoir obtenu le consentement unanime de tous les associés. Cette transaction implique la vente des parts à un tiers approuvé par l’ensemble des associés.
Avantages ?
1- Ce type de société permet de maintenir un contrôle relativement serré sur la gestion de l’entreprise. En accordant une importance primordiale à la qualité et à la personnalité des futurs associés, cette forme sociale évite la dilution du capital. Ainsi, les associés fondateurs conservent un contrôle significatif sur les décisions et les orientations de l’entreprise. Cela est essentiel pour préserver leur vision et leur influence sur les opérations.
2- Les sociétés de personnes sont la plupart du temps plus flexibles dans sa structure et ses opérations. Cela est vital pour s’adapter rapidement aux changements du marché et répondre aux opportunités qui se présentent.
3 – Une société de personnes peut être attrayante pour les investisseurs et les collaborateurs axés sur la confiance et les relations personnelles, favorisant ainsi des partenariats stratégiques facilités par une solide réputation.
Inconvénients ?
1 – Difficulté à lever des montants significatifs de ressources financières : elles dépendent largement des apports financiers de leurs associés. Cette limitation en termes de ressources financières peut entraver la croissance et l’expansion de l’entreprise.
2 – Risque de désaccords entre associés : La gestion et le processus décisionnel au sein d’une société de personnes peuvent parfois être propices à des désaccords entre les associés, surtout lorsque leurs opinions diffèrent sur l’orientation stratégique à suivre.
Les sociétés de capitaux
En revanche, dans les sociétés de capitaux, c’est le capital qui est le moteur de l’entreprise, et la gouvernance est davantage axée sur des considérations financières. Ce modèle adopte une logique financière avant tout, cherchant à maximiser les rendements pour les investisseurs. Les exemples abondent, des grandes multinationales aux startups axées sur la recherche de fonds d’investissement.
Quelles sont les caractéristiques d’une société de capitaux ?
1 – Dans les sociétés par capitaux, le capital est divisé en actions. Contrairement aux parts sociales des sociétés de personnes, ces actions sont négociables sur des marchés organisés tels que la bourse.
2 – Responsabilité limitée des actionnaires : Les actionnaires d’une société par capitaux ont une responsabilité limitée, ce qui signifie qu’ils ne sont responsables des dettes de l’entreprise qu’à hauteur de leur investissement initial. Leurs biens personnels ne sont pas engagés pour les dettes de la société.
3 – Liberté de transférer des actions : Contrairement aux sociétés de personnes, les actionnaires d’une société par capitaux peuvent librement transférer leurs actions à des tiers sans nécessiter un accord unanime des autres actionnaires.
Avantages ?
1 – Accès au marché financier plus facile : cela leur permet de lever des capitaux plus importants en émettant de nouvelles actions. Cela facilite la croissance et le développement de l’entreprise.
2 – Responsabilité limitée des actionnaires : Ils ne risquent que leur investissement initial en cas de difficultés financières, préservant ainsi leurs biens personnels.
3 – Flexibilité dans la cession d’actions : Les actionnaires ont la liberté de transférer leurs actions à d’autres investisseurs, cela facilite la liquidité des investissements et permet à de nouveaux actionnaires de rejoindre l’entreprise.
4 – Gestion professionnelle : Les sociétés par capitaux sont souvent mieux adaptées pour attirer des gestionnaires professionnels et des talents externes, ce qui peut renforcer la compétitivité de l’entreprise.
Inconvénients ?
1 – Dilution de la propriété simplifiée : Si une entreprise émet de nouvelles actions pour obtenir de l’argent, cela peut réduire la part de propriété des actionnaires actuels. En d’autres termes, ils possèdent moins de l’entreprise, ce qui peut être problématique si les fondateurs veulent garder le contrôle.
2 – Pression pour des résultats court-termiste : Les entreprises cotées en bourse sont souvent poussées à obtenir des profits rapidement. Cette pression peut empêcher l’entreprise d’investir sur le long terme ou de suivre des stratégies de croissance à long terme.
À savoir :
En somme, les différentes formes de sociétés, qu’elles soient familiales, coopératives, par actions ou autres, ont des objectifs et des structures de gouvernance distincts. Cette diversité est un reflet des priorités et des valeurs qui animent ces entreprises.
