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Après « la monnaie hélicoptère », c’est au tour de « l’aspirateur monétaire » ?

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Dans sa tribune du 24 novembre 2022 au périodique Les Echos, Xavier Jaravel, professeur à London School of Economics, propose d’introduire « l’aspirateur monétaire » pour faire face au surplus de liquidité en circulation, et ainsi faire suite à la « monnaie hélicoptère », théorie introduite par Milton Friedman en 1969.

 

La « monnaie hélicoptère », une alternative aux politiques monétaires conventionnelles.

Milton Friedman a popularisé ce concept pour désigner un type de politique monétaire consistant, pour la banque centrale, à créer de la monnaie et à la distribuer directement aux agents économiques de façon ponctuelle. Concrètement, la banque centrale imprimerait de la monnaie qu’elle verserait directement aux agents afin qu’ils la consomment ou l’investissent afin de relancer l’économie.

Ces dix dernières années, ce concept a été repris au sein de l’UE tout d’abord en 2012 lors de la campagne « Quantitative Easing for People » menée par certains économistes, un groupe de dix-huit euro-députés de gauche et écologistes. Mais également en mars 2016, lorsque le célèbre Mario Draghi, président de la Banque Centrale Européenne, avait déclaré en conférence de presse qu’il jugeait ce concept « intéressant ».

Enfin, en France, cette théorie a été reprise sous l’égide de Jézabel Couppey-Soubeyran, lors d’une note du 17 avril 2020. Cette économiste avait alors formulé une proposition de « monnaie hélicoptère » pour mieux faire face aux conséquences économiques en zone euro de la crise du Covid-19. Elle expliquait que pour affronter la crise sanitaire, la BCE pourrait procéder à un transfert direct de monnaie centrale en plusieurs étapes : d’abord pendant le confinement, vers les États, pour monétiser les dépenses publiques sans prendre le risque d’une insoutenabilité à terme des dettes publiques ; ensuite, une fois le confinement terminé, vers tous les citoyens et entreprises de la zone euro, pour réamorcer sans délai l’activité économique.

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« L’aspirateur monétaire », un outil qui fonctionne à l’inverse de « l’hélicoptère monétaire »

Xavier Jaravel commence par expliquer que l’action des banques centrales a été un outil très puissant de relance de la demande au plus fort de l’épidémie de Covid mais que désormais, pour limiter la demande et les hausses de prix, il nous faut un outil tout aussi puissant qui permette de bloquer, pour une durée déterminée, l’épargne des ménages.

En effet, selon lui, les banques centrales n’ont pas les armes pour réduire la composante principale de la demande, la consommation des ménages. Leur outil principal consiste à relever les taux d’intérêt, ce qui n’a que peu d’effets sur le comportement d’un ménage typique.

Ainsi, il défend l’idée que pour posséder des politiques macroéconomiques crédibles, il faut inventer un outil aussi puissant pouvant fonctionner en sens inverse de la « monnaie hélicoptère ».

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Le fonctionnement de « l’aspirateur monétaire » selon Xavier Jaravel

Une de ces idées serait de créer des comptes bancaires dédiés à la politique de relance. En période d’inflation, un taux d’intérêt élevé serait activé pour tous ceux qui accepteraient d’immobiliser leur argent sur ce compte pour une période déterminée. Par exemple, un taux de rendement de 10 % sur 6 mois pourrait être offert aux utilisateurs, jusqu’à un plafond de 10.000 euros. L’argent ainsi placé serait « aspiré » hors de l’économie pour une durée limitée, ne permettant plus d’alimenter ni la consommation de biens et services ni l’investissement des entreprises, ce qui conduirait rapidement à une baisse de la demande agrégée. Une fois la période écoulée, les intérêts seraient payés aux ménages directement par la banque centrale.

Ce système permettrait de réduire la demande à la fois des ménages modestes et aisés, serait plus lisible pour les ménages que les effets par ricochet du taux directeur de la banque centrale, et contribuerait à réduire les inégalités de patrimoine. A court terme, le compte pourrait être pris en charge par les acteurs classiques du système bancaire, qui accompagneraient leurs clients ; à plus long terme, des comptes nominatifs pourraient être créés à la banque centrale.

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Pour conclure, Xavier Jaravel propose dans sa tribune une nouvelle approche macro-économique non-conventionnelle, reposant sur l’action des banques centrales, dont le but est de freiner la consommation et les investissements, qui participent pour une grande partie à l’augmentation de l’inflation.

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Damien Copitet
Je suis étudiant à SKEMA BS après deux années de classe préparatoire au lycée Gaston Berger (Lille). Nous nous retrouvons toutes les semaines pour l'actualité en bref