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Comprendre l’augmentation des prix alimentaires dans le monde

Sommaire

L’augmentation des prix alimentaires comme conséquence de la guerre en Ukraine pose la question d’un problème d’approvisionnement dans les pays dépendants des importations étrangères. Dans cet article, nous allons revenir en détail sur le mécanisme de fluctuation des prix, les pays les plus à risque et ce que l’on peut en conclure sur le système alimentaire mondial.

Une hausse des prix alimentaires comme conséquence de la guerre en Ukraine

Pour mesurer l’augmentation des prix alimentaires dans le monde, il faut s’intéresser à l’indice FAO des prix des produits alimentaires, une mesure de la variation mensuelle des cours internationaux établie à partir d’un panier de produits alimentaires de base. Ce dernier s’établissait à 135 début 2022 (notons qu’il s’agit d’un chiffre déjà très élevé : 90 en 2019). Il est monté à 160 au plus haut en mars (hausse de 18,5% sur l’année 2022, de 33% par rapport à mars 2021) avant de baisser et de s’établir en août 2022 à 138, signe d’une situation qui s’améliore : un accord a été trouvé en juillet 2022 entre l’Ukraine et la Russie pour l’exportations de céréales en mer Noire.

Cette augmentation des prix s’explique par la diminution de la production de ressources alimentaires essentielles dont la Russie et l’Ukraine sont de grands producteurs : graisses animales, huiles végétales, céréales (blé en particulier : Russie et Ukraine 3ème et 7ème producteurs mondiaux). Cela a mécaniquement provoqué une augmentation de la plupart des produits alimentaires qui nécessitent ces ressources de bases : pain, pâtes, viandes… La hausse des prix du transport des marchandises affecte également la facture totale (augmentation du cout de l’énergie).

En savoir plus : Comment mesure-t-on l’inflation ?

Les pays les plus à risques

Naturellement, tous les pays ne sont pas touchés de manière uniforme par cette augmentation : cela varie en fonction de la dépendance aux importations alimentaires. En moyenne dans le monde, l’alimentaire représentent 9% des importations totales, signe que la plupart des pays sont autosuffisants. Toutefois, cette moyenne ne saurait cacher la grosse dépendance de nombreux pays : 39% pour le Yémen, 38% pour le Bénin, 32% pour le Sierra Leone. En effet, 16 pays voient les produits alimentaires représenter plus de 30% de leurs importations. Ce sont, à 2 exceptions près, tous des PMA situés en Afrique. Cette dépendance se répercute alors sur l’augmentation des prix : en Angola, ils ont augmenté de 36% sur l’année 2022.

Conséquence : selon une étude de la FAO menée par Upali Galketi Aratchilage, les PMA verront une baisse de leur facture alimentaire de 5%.  Concrètement, les pays les plus pauvres ne peuvent pas se permettre une telle hausse des prix et se verront obliger de réduire leurs achats, ce qui veut dire moins de nourriture pour le même prix.

Néanmoins, à l’échelle mondiale, les dépenses liés aux importations alimentaires devraient enregistrer une hausse de 51 milliards de $ par rapport à 2021 : la majorité des pays se voient donc obligés de s’adapter, même si cette hausse traduit quand même des quantités inférieures.

Et en France ? Les produits alimentaires représentent 10% des importations, et les prix ont augmenté de 6,7% sur l’année 2021 selon l’INSEE.

 

Un système alimentaire complexe

Le système alimentaire mondial est extrêmement complexe. Les prix sont fixés à terme dans des bourses spécialisées (comme la CBOT à Chicago) : la spéculation ainsi que les tensions géopolitiques mondiales font peser un risque énorme d’instabilité sur les prix alimentaires.

Cela pose alors la question de la famine. Les famines naturelles ont presque disparues aujourd’hui : elles sont, selon Sylvie Brunel dans Famines et politique (2004), relayées par des famines soit orchestrées, soit conséquence de tensions durables. La géographe française analyse les famines comme un outil de contrôle de populations, comme au Cambodge de 1976 à 1979, ou au Darfour (Soudan) où les milices de Khartoum des janjawid interdisent les aides des ONG en coupant les routes d’approvisionnement depuis 2011.

La concurrence entre Etats est également importante : si la Russie et l’Ukraine produisent moins, l’Inde et la Chine augmentent leur production et n’hésitent pas à jouer sur les prix en profitant du climat actuel tendu.

Conclusion

Finalement, si le « food power » avait été remis en cause au nom du droit à la nourriture lors de la conférence sur la nouvelle génération des droits de l’Homme à Novi Sad en 1980, on constate que ce dernier est encore omniprésent. « Le soja est plus puissant que la bombe atomique » disait Earl Butz, secrétaire d’Etat à l’agriculture américain.

Voir nos analyses de sujets de géopolitique tombés aux concours liés à l’alimentation :

ESSEC 2015 – Exigences paradoxales et nouvelle « géopolitique de la faim »

ECRICOME 2021 (sujet 2) – Agriculture et alimentation : comment assurer la sécurité alimentaire aujourd’hui et demain ?

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Yanis Sameur
Etudiant à HEC Paris, je suis devenu rédacteur en mathématiques et en géopolitique afin de partager mon expérience acquise durant mes 2 années de prépa !