Les politiques de l’emploi englobent un large éventail d’interventions publiques visant à augmenter l’emploi et réduire le chômage. Les définitions varient, allant de simples dispositifs ciblés à l’ensemble des interventions ayant pour objet d’augmenter le niveau d’emploi.
Dans le cas présent, nous distinguerons surtout les mesures dirigées vers la demande de travail : baisse du coût de travail, exonérations de charges, subvention à l’embauche. Il s’agira d’en faire l’inventaire, puis d’analyser leurs modalités d’usage.
Les politiques de la demande
Dans le cadre des politiques de l’emploi, un ensemble de mesures vise à lutter contre le chômage par action sur la demande de travail. En d’autres termes, il s’agit d’agir sur le comportement des employeurs. Différentes théories économiques existent sans nécessairement s’accorder.
Le salaire minimum
La première mesure à relever est sans doute celle du salaire minimum. En France, le SMIG (Salaire minimum interprofessionnel garanti) est créé en 1950. La plupart des pays de l’OCDE disposent d’un salaire minimum (26 au total). Pour certains le salaire minimum assure un niveau de revenu décent et permet de limiter l’exploitation des travailleurs. En revanche, les néoclassiques/libéraux le voient plutôt comme une entrave à l’équilibre sur le marché du travail et donc comme un facteur de chômage.
Le “fast-food paradox” : les effets d’une hausse de salaire minimum au New Jersey
Des études empiriques ont pu révéler l’absence de relation négative entre salaire minimum et chômage. C’est le cas du “fast-food paradox” publié dans un article intitulé “Minimum Wages and Employment : A case Study of the Fast Food Industry in New Jersey and Pennsylvania” (D.Card et A.Krueger, 1993). Les deux économistes comparent la situation entre le New Jersey où le salaire minimum a augmenté de 20% en 1992 et la Pennsylvanie, groupe de contrôle sans changement particulier.
Sur l’année, ils observent alors que 52% des restaurants fast-food ont augmenté leur main d’oeuvre au New Jersey, contre 41% en Pennsylvanie. Parallèlement, le taux d’emploi a progressé de 0,6% dans le premier Etat contre une baisse de 2,2% dans le second. Krueger et Card concluent donc que l’augmentation du salaire minimum aurait globalement permis l’accroissement du taux d’emploi d’environ 2,8% dans la restauration comparativement à une situation où la hausse n’aurait pas eu lieu.
Conclusion de l’étude
Dans les faits, le marché du travail ne fonctionne pas selon les hypothèses de concurrence pure et parfaite.
Par ailleurs, la hausse du salaire minimum peut influer sur les comportements des prospecteurs d’emploi s’il dépasse leur salaire de réservation. La théorie du salaire d’efficience plaide quant à elle pour une hausse de productivité consécutive à une hausse des salaires (logique incitative). Enfin, la perspective keynésienne envisage que la consommation pourrait être stimulée par une hausse globale des salaires. Malgré tout, aucune étude empirique ne permet d’affirmer pleinement une relation générale entre les deux facteurs.
Les allègements de cotisations sociales
Il n’est pas nécessaire d’agir directement sur le pouvoir d’achat des salariés pour accroître la demande de travail. En effet, le coût du travail supporté par l’employeur est la somme du salaire net et des cotisations sociales patronales. Réduire ces cotisations peut donc être un moyen d’alléger le coût du travail sans pour autant pénaliser le pouvoir d’achat des employés.
Cette stratégie a largement prévalue en France depuis 1993. Divers allègements successifs ont vu le jour : Balladur (1993), Juppé (1997), Aubry (1998-2000), Fillon (2003), le CICE plus récemment. Ces exonérations ciblent généralement les bas salaires. Toutefois, ces mesures représentent un certain coût pour les pouvoirs publics puisqu’elles les privent d’éventuelles recettes fiscales. En 2022, elles s’estimaient à 73,6 milliards d’euros (Cf. Urssaf) soit une hausse de 13,1% par rapport à l’année précédente.
Réalité empirique
Théoriquement, une baisse des charges sociales induit une augmentation de l’emploi. Cela est d’autant plus vrai pour les bas salaires pour lesquels l’offre de travail est souvent très inélastique (un grand nombre d’actifs est prêt à accepter un travail pour ce nouveau salaire). Concernant les hauts salaires en revanche, l’effet de cette politique dépend de l’élasticité de l’offre de travail. Si celle-ci est trop faible alors la baisse des cotisations sociales provoquera surtout une hausse des salaires plutôt que du volume d’emploi.
Dans les faits, de telles politiques ont su prouver leur efficacité en matière de création d’emploi. Les allègements réalisés lors des années 1990 auraient créé entre 200 000 et 400 000 emplois (selon les différentes études publiques, INSEE, Dares, etc.). Néanmoins, un des effets défavorables ici est le risque de “trappe à bas salaire” (Cf. Malinvaud). Effectivement, ces mesures incitent les employeurs à ne pas faire dépasser les salaires au-delà du seuil d’exonération.
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Le chômage partiel
Utilisé dans une ampleur inédite pendant le grand confinement, le chômage partiel est une manière de faire face aux chocs conjoncturels qui touchent le marché du travail. Il s’agit là aussi d’agir sur la demande de travail des entreprises. Maintenir l’activité partiellement permet aux établissements en difficulté de réduire leur charge salariale.
Les salariés reçoivent en échange une compensation de la part des finances publiques pour les heures chômées. Un tel dispositif vise avant tout à inhiber les licenciements et permet ainsi de conserver le capital humain. Cela favorise donc la reprise d’activité une fois la crise passée.
Les pays européens ont eu largement recours à ce dispositif mais selon des modalités variables (éligibilité et taux de prise en charge). Les expériences de 2009 et 2020 ont fait apparaître le chômage partiel comme très efficace. Il joue pleinement son rôle d’amortisseur en temps de crise. Cela dit, cette politique est également coûteuse pour l’Etat. En 2021, l’OFCE a estimé ce coût à 10 milliards d’euros pour la France.
Les contrats aidés
Les contrats aidés sont une mesure ciblée agissant sur la demande de travail. Ils consistent en la création d’emplois temporaires, souvent à temps partiel (dans le secteur non marchand). Dans d’autre cas, il s’agit d’un octroie de subvention dans le secteur marchand. Cette mesure cible particulièrement les publics en difficulté d’insertion (jeunes sans qualification, travailleurs handicapés). Le tout est d’améliorer l’employabilité de ces populations en favorisant l’accumulation de capital humain (savoir-faire, expérience, compétences). On observe des effets positifs dans le secteur non-marchand, moins concernant le secteur marchand.
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Les subventions à l’embauche
Cette dernière mesure consiste en l’allègement de cotisations lors de nouvelles embauches. Le concept se rapproche d’une simple exonération. Cela dit, son utilisation et efficacité dépendent largement du contexte économique. Il s’emploie surtout en cas de crise. Sur le long terme, le coût de l’emploi créé est bien plus élevé ce qui rend le dispositif inopérant.