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Philippe Aghion et Emmanuel Combe prennent la parole sur la politique industrielle française

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Dans une tribune du 6 février publiée sur le site Les Echos, l’économiste et professeur au Collège de France, Philippe Aghion, accompagné de l’ancien vice-président de l’Autorité de la concurrence, Emmanuel Combe, ont pris la parole sur la politique industrielle française. Ces derniers ont présenté quatre règles de mises en œuvre.

 

Une politique industrielle doit rester le plus neutre possible sur le plan concurrentiel

La politique industrielle que la France a la tâche de mettre en place doit éviter à tout prix les subventions monopolistiques des entreprises établies au détriment des nouveaux entrants. Cette position est d’autant plus nécessaire que la politique industrielle est conçue pour favoriser les innovations de rupture, souvent mises en œuvre par des étrangers. L’expérience a montré que la compétition au sein des projets est l’un des éléments de leur succès, comme le programme américain Warp Speed ​​dans la course au vaccin Covid : Barda a octroyé 11 milliards de dollars à plus de 40 laboratoires pharmaceutiques.

 

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Une politique industrielle de rattrapage doit être attentive à la distance par rapport à la frontière technologique

Rappelons que Philipe Aghion introduit le concept de « frontière technologique » dans son livre Repenser la croissance économique (2016). Il l’a défini de la manière suivante : « plus un pays se développe, plus c’est l’innovation « à la frontière » qui devient le moteur de la croissance et prend le relais de l’accumulation du capital et du rattrapage technologique. Imaginez qu’un jour, on fasse entrer un nouvel élève brillant dans une classe. Comment les élèves vont-ils réagir à cet accroissement de la concurrence ?  L’arrivée de ce nouvel élément brillant va inciter les meilleurs élèves de la classe à travailler plus dur pour rester les meilleurs tandis que cela va décourager les moins bons élèves pour qui rattraper ce retard devient plus difficile qu’auparavant ».

Emmanuel Combe et Philipe Aghion expliquent qu’en matière d’innovation, il ne suffit pas de vouloir rattraper son retard, il faut aussi le pouvoir. En effet, si un pays n’a pas les capacités et compétences technologiques suffisantes, et si le rythme d’innovation est très soutenu, alors il risque de gaspiller de l’argent et de prendre du retard sur les leaders à jamais. C’est pourquoi le Brésil n’a pas réussi à rattraper l’informatique.

 

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Une politique industrielle doit prendre appui sur une gouvernance qui place en son centre des experts indépendants

Philipe Aghion et Emmanuel Combe proposent pour cette 3ème règle de déléguer la mise en œuvre de la politique industrielle à une puissante agence indépendante, sur le modèle américain de coopération avec la Darpa et Barda. L’enjeu est d’éviter tout conflit d’intérêt dans l’allocation des fonds publics tout en permettant aux décideurs politiques d’agir rapidement. Ils doivent être en mesure d’arrêter rapidement un projet qui n’atteint pas le résultat souhaité en activant une « sunset clause » (une sunset clause est une mesure dans une loi qui prévoit que la loi cessera d’avoir effet après une date précise, à moins que d’autres mesures législatives ne soient prises pour étendre la loi).

 

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Quatrièmement, l’État doit fixer des objectifs aux entreprises, plutôt que de convenir à l’avance de solutions. Sans plus d’informations que les acteurs privés, elle risque de passer à côté d’autres technologies plus prometteuses.

 

Pour conclure, le succès de la politique industrielle n’est pas tant une question de moyens qu’une question de bonne gouvernance. De ce point de vue, la raison n’est pas là : le processus de sélection des projets est encore trop rigide a priori, et les procédures et critères d’évaluation manquent de clarté.

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Damien Copitet
Je suis étudiant à SKEMA BS après deux années de classe préparatoire au lycée Gaston Berger (Lille). Nous nous retrouvons toutes les semaines pour l'actualité en bref