L’Asie est le premier producteur mondial d’énergie hydroélectrique. Ceci lui donne une place importante dans la géopolitique mondiale grâce à ses grands fleuves. L’Asie est dotée de plusieurs grands fleuves : le Mékong, le Brahmapoutre, le Yangzi Jiang, le fleuve Jaune, etc.
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La Chine produit environ 30% de l’énergie hydroélectrique mondiale. C’est donc un acteur majeur de la géopolitique mondiale de l’énergie mais aussi de la gestion des fleuves qui sont souvent transfrontaliers.
La gestion du Mékong : fleuve de la discorde dans la géopolitique mondiale de l’énergie hydroélectrique
La Commission du Mékong, une gouvernance régionale de l’énergie hydroélectrique en Asie
Le Mékong est un fleuve d’Asie du Sud-Est, le dixième fleuve du monde et le quatrième d’Asie par son débit. Sa longueur est d’environ 4 900 km, et son bassin versant draine 810 000 km2. Prenant sa source sur les hauteurs de l’Himalaya, le Mékong traverse la Chine, le Laos, la Birmanie, la Thaïlande, le Cambodge et le Viêt Nam.
Environ 70 millions d’habitants vivent directement dans son bassin versant. Il est notamment utilisé pour l’irrigation, la pêche et la pisciculture, la production hydroélectrique et la fourniture d’eau pour l’industrie et les particuliers.
Une commission internationale — Mekong River Commission est créée en avril 1995. Elle est consacrée à une gestion transrégionale des conflits et problèmes liés au fleuve. Seuls la Thaïlande, le Laos, le Cambodge et le Viêt Nam ont signé la convention. La Birmanie et la Chine n’ont de leur propre gré qu’un statut d’observateur.
Cette convention réaffirme le désir de coopération de ces pays autour des enjeux de la région, et l’importance d’une commission indépendante vis-à-vis des instances internationales. Ce désir d’indépendance se fait encore sentir aujourd’hui. Les instances évoluent en effet vers une plus grande autonomie de financement de la part des membres. Cependant, le financements des projets sont souvent l’objet de partenariats, notamment la Banque Asiatique de Développement. Le poids de la Chine est également d’une influence majeure dans les décisions.
La position de la Chine dans la géopolitique asiatique
La position de retrait de la Chine est un choix stratégique. En effet, celle-ci contrôle actuellement les eaux du fleuve en amont du bassin du Mékong. Elle détient ainsi un pouvoir économique et politique fort. La construction de onze barrages sur le cours supérieur du Mékong se fait au détriment des pays en aval. La Chine contrôle 70 % de l’eau en aval pendant la saison sèche qui réduit une grande partie du débit du fleuve.
En effet, la construction de barrages hydro-électriques au Yunnan menace l’avenir du fleuve et des populations en aval. Le Vietnam en est la principale victime en raison de l’appauvrissement des espaces dédiés à la riziculture. La biodiversité est également menacée, bloquée par les barrages.
29% de l’énergie du pays vient de l’hydroélectricité. Il est donc dépendant du Mékong pour une grande partie de ses activités économiques. De plus, cette énergie est au cœur de la politique de transition écologique du Vietnam : stratégie de développement de l’énergie renouvelable pour 2030.
On peut donc voir que la gouvernance régionale est limitée par la puissance de la Chine qui est en amont du fleuve et le contrôle.
Le Barrage des Trois Gorges : le reflet de la puissance chinoise en Asie
C’est le plus grand barrage du monde avec une capacité de 20 000 MW. La Chine produit 30% de l’énergie hydroélectrique mondiale. Celle-ci représente 15% de l’électricité du pays. Elle a plus de 13 barrages sur 34 avec une capacité supérieure à 3 000 MW. La plupart sont notamment localisés dans le Sichuan et le Yunnan. La politique hydroélectrique chinoise s’est accélérée depuis 2010 avec la mise en service d’une vingtaine de barrages dont le barrage des Trois Gorges.
La Chine développe aussi des barrages dans le cadre de la stratégie des nouvelles routes de la soie : la Belt and Road Initiative. Ainsi, elle finance un barrage au Pakistan, le projet Karot. Les entreprises d’Etats chinoises signent des contrats pour construire ces barrages mais aussi les exploiter une fois leur mise en service opérée. Ainsi, elles ont aussi aidé l’Ethiopie a mené les négociations pour le barrage Renaissance pour pouvoir le construire. La Chine cherche donc à avoir la gestion des grands barrages mondiaux dans des pays alliés. Grâce à ces entreprises nationales, elle a obtenu la gestion des lignes électriques du barrage Belo Monte au Brésil, ce qui lui donne un pouvoir important.
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L’énergie hydroélectrique est au cœur de la puissance chinoise dans la géopolitique mondiale. C’est un enjeu de pouvoir et de dépendance car la Chine dispose des entreprises et de la technologie
Le cas du Laos
Le Laos repose beaucoup sur l’énergie hydroélectrique car le pays est traversé par plusieurs fleuves. Ainsi, c’est le 16ème producteur mondial et le 4ème en Asie. L’hydroélectricité représente 73% de l’énergie du pays. Cette production est en hausse (+ 857% depuis 2000). Le pays compte sur cette énergie verte pour développer le pays dans les décennies à venir. C’est aussi une source de revenus importante car le Laos exporte une partie de son électricité vers ces voisins. Le pays dispose de 44 barrages opérationnels. Une grande partie a été financée par la Chine grâce à la Banque asiatique de développement et la BAII.
Mais le Laos est dépendant des investissements étrangers mais aussi des entreprises étrangères qui exploitent ses barrages. En effet, le pays ne possède pas d’entreprises nationales ni des savoir-faire nécessaires pour construire et gérer des barrages hydroélectriques.
Par exemple, le barrage de Nam Theun 2 mis en service en 2010 est exploité à 40% par EDF et à 35% par la Thaïlande. Il exporte la majeure partie de sa production vers la Thaïlande.
Les prétentions de la Chine au Tibet
Selon une étude, Pékin construit et planifie 139 barrages dans le Tibet historique, qu’importe les dommages écologiques. Prévu pour produire 60 GW, soit 3 fois plus que l’actuel record mondial des Trois-Gorges, le projet du barrage de Motuo illustre la démesure de Pékin dans ses projets. La Chine souhaite profiter de cet espace où le plus grand canyon du monde permettrait de produire de l’électricité en grande quantité grâce au dénivelé.
Ce barrage renforcerait la puissance de la Chine et son indépendance énergétique tout en poursuivant sa transition écologique.
Grâce à l’énergie hydroélectrique, les pays asiatiques peuvent faire leur transition énergétique. Ils réduisent aussi leur dépendance à l’égard des énergies fossiles.