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Géopo ESSEC 2022 – Analyse du sujet

Sommaire

Retrouve dans cet article l’analyse du sujet de géopolitique ESSEC tombé au concours 2022 pour les candidats des prépas scientifiques (ECS).

Ca y est le concours BCE 2022 sont bel et bien amorcé avec cette épreuve pour les étudiants de la filière ECS. Un sujet qui en a surpris plus d’un au vu des annales tombées lors des dernières années à l’épreuve de géopolitique ESSEC

Pour votre information, cette épreuve est utilisée par l’ESSEC, l’EDHEC ainsi que l’ENSAE.

 

POUR VOIR LE SUJET D’HGGMC ESSEC DU CONCOURS 2022

POUR VOIR TOUS LES SUJETS ET LES ANALYSES DU CONCOURS 2022

 

L’analyse du sujet de géopolitique ESSEC 2022 

Le contrôle des routes stratégiques depuis 1913, vecteur de domination mondiale des États dans le monde.

Sujet très délicat et pourtant riche en informations et en connaissances à mobiliser, les routes constituent un élément de géopolitique à part entière. Le contrôle et la maîtrise des routes commerciales et d’approvisionnement a longtemps été un objet de friction entre les États.

À l’instar des routes du pétrole stratégiques; celles-ci sont les routes maritimes avec 3 détroits majeurs  (Ormuz, Bab El Mandeb, Malacca,  en plus du canal deSuez), d’où des crises  récurrentes comme la crise de Suez (1956), la Guerre des 6 jours (1967) et l’intervention russe en Tchétchénie (1994) pour contrôler des oléoducs. Cet exemple montre bien que la géopolitique objectale se superpose parfaitement à la géopolitique des routes.

Place donc à l’analyse du sujet :

 

Accroche

Alors que la guerre sévit depuis plusieurs semaines déjà en Ukraine, Camille Morel, chercheuse au Centre d’études stratégiques de la marine (CESM) soulignait le risque géopolitique oublié que pose cette guerre pour le contrôle des câbles sous-marins. « Devenus indispensables au fonctionnement de la société et de l’économie mondiale […] ils font transiter plus de 98 % des communications internationales » C’est pourquoi, la géopolitologue appelle au développement stratégique de satellites géo-stationnaires pour suppléer la dépendance accrue à ces « routes de l’information »

 

Définition des termes du sujet

Le contrôle : terme polysémique car le contrôle peut à la fois signifier la surveillance, l’inspection ou encore le fait de diriger, de dominer au sens de la maîtrise. Au sujet des routes, la surveillance géopolitique passe par les points de contrôle aux détroits tandis que la maîtrise s’opère à travers les ZF, les ports, et les hubs aéroportuaires stratégiques. Le contrôle d’un territoire est une forme d’appropriation : possession, domination, apprentissage et organisation d’un espace. En général le contrôle d’un territoire remplit 4 objectifs spécifiques : assurer la sécurité des biens et des personnes, assurer un maillage complet du territoire, exploiter au mieux ses ressources et limiter les risques ou du moins les effets des risques.

Les routes : employé au pluriel, le terme route appelle à une analyse multi-scalaire. D’abord les routes commerciales terrestres et maritimes où il est question de distinguer les routes principale en l’occurence la route maritime qui passe par les grands ports généralistes d’Asie orientale, traverse l’océan Pacifique, dessert l’Amérique du Nord, traverse le canal de Panamá, puis l’océan Atlantique, dessert l’Europe, passe en Méditerranée puis dans l’océan Indien via le canal de Suez, avant de rejoindre à nouveau l’Asie orientale. Ensuite, il fallait relever les routes d’approvisionnements de matière premières et d’énergie qui enveloppent : gazoducs et oléoducs ainsi que les les câbles sous-marins pour les flux d’information. Enfin dans sa thèse sur l’anti-monde, Roger Brunet évoque les « anti-routes » qui structurent les les routes de la mondialisation grise.

Stratégiques : La stratégie est l’art et la combinaison de moyens pour atteindre un objectif. Ici les routes stratégiques sont les routes au sujet desquels les États connaissent une grande rivalité pour leur contrôle et leur maîtrise. À l’instar des routes qui traversent le bassin indo-pacifique où les Occidentaux veulent y garantir des mers « libres et ouvertes ». C’est que cette liberté et cette ouverture sont menacées désormais.

                                                             // Borne chronologique //

Depuis 1913 : Ici la borne chronologique est classique et désigne le début du programme HGGMC en prépa ECG. Pour le sujet, on aurait pu penser aux accords secrets de Sykes-Picot de 1916 durant la première guerre mondiale qui démantèlent définitivement l’Empire Ottoman en divisant la région du Moyen-Orient aux mains des Occidentaux et qui recomposent la hiérarchie des puissances contrôlant les principales routes stratégiques.

Vecteur de domination : Comme en algèbre, un vecteur indique le sens et la direction de l’objet qui le porte. Vecteur de domination signifie ici que les routes maritimes permettent aux États d’exercer un pouvoir de domination commerciale, géopolitique et géo-stratégique.

Domination : La domination du latin dominare c’est exercer une forme de souveraineté, celle du maître dit dominus. La domination est un type d’exercice de la puissance géopolitique se caractérisant par : 1/ la domination sans partage d’un Etat sur des pays en situation d’infériorité ( ici il est intéressant de remarquer cette forme d’exercice de la puissance par la RPC en mer de chine méridionale), 2/ le refus par cet Etat d’une maîtrise territoriale directe à laquelle est préférée une mainmise indirecte et une hiérarchisation des subalternes, 3/ une pratique récurrente de l’unilatéralisme. Une volonté d’exercer une domination mondiale des routes est souvent source de conflits à l’instar de la crise liée à la nationalisation du canal de Suez en 1956 par Gamal Abdelnasser.

États : Un État est un groupement humain soumis à une même autorité et pouvant être considéré comme une personne morale détenant notamment le monopole de la violence légitime (la force publique). C’est également le territoire, clairement délimité par des frontières,  sur lequel s’exerce ce pouvoir. En définitive c’est l’autorité souveraine se manifestant sur ce groupement humain et sur ce territoire (« les pouvoirs publics »). La distinction des États entre États-nation, État-providence ou État-providence pourrait être superflue dans ce sujet. Les notions u « retour des États » ou de l’«  État-failli » sont quant à elles plus importantes dans la mesure où elles influencent significativement la sécurisation des routes.

                                                                            // Borne spatiale //

Dans le monde : la borne spatiale est on ne peut plus large d’où la nécessite de faire appel à une fine analyse multiscalaire qui consistera à zoomer puis dézoomer selon le besoin. Il est également intéressant d’avoir quelques exemples précis et détaillés qui structureront la fin des sous-parties pour montrer les différences entre les États et les régions du monde mais également au sein de ces espaces.

 

Proposition de paradoxe et problématique

En mars 2021, une rencontre ministérielle a lieu en Alaska entre les EU et la Chine au cours de laquelle le thème central des discussions a porté les routes maritimes traversant le bassin indopacifique, les Occidentaux veulent y garantir des mers « libres et ouvertes » tandis que la RPC y déploie le projet des Nouvelles Routes de la Soie lancée par Xi-Jinping. C’est que cette liberté et cette ouverture sont menacées. Pourtant, les nations qui la composent effectuent de plus en plus d’échanges entre eux, les rendant interdépendants. Selon la logique libérale, cette situation devrait conduire à la paix. Or, celle-ci n’est plus garantie.

Ainsi, en quoi la géopolitique du contrôle des routes est-elle révélatrice de la hiérarchie et de la recomposition des puissances depuis 1913 ?

 

Proposition de plan

I/ Le contrôle des routes et passages stratégiques constitue un enjeu majeur pour les États depuis 1913.

II/ Lequel contrôle est un jeu dangereux semé de rivalités et d’affrontements de puissances.

III/ Le défi est donc de gérer le contrôle de ces routes stratégiques afin de les garder au service d’une économie globalisée.

 

Une liste non exhaustive de concepts à mobiliser

  • Détroits, canaux et caps : Par exemple; la mise en travers à quelques kilomètres au Nord de Suez le 24 mars 2021, d’un super porte-conteneurs Evergreen de 20 000 evp aura suffi à mettre une partie du transport maritime mondial dans une situation de légère angoisse avec l’incertitude d’une simple contrariété de retard ou d’une véritable contrainte opérationnelle et commerciale lourde.
  • Nouvelles routes de la soie : Il s’agit de s’inscrire dans une tradition qui depuis l’amiral Zeng He a assuré par ses jonques une influence en Afrique orientale aujourd’hui aboutissement des routes de la soie maritime. Il s’agit aussi de ne pas négliger dans la compétition régionale le facteur maritime dès lors que le Japon thalassocratique se mobilise, que l’Inde est à la recherche d’une maîtrise de « l’Océan des indiens ». Mais c’est aussi pour la Chine une façon de contrôler le détroit de Malacca, noeud gordien de son commerce international où la piraterie de la région à partir de Chittagong menace ses intérêts. Il s’agit enfin de rendre sa puissance plus complète car on imagine mal une grande puissance au XXie siècle ne pas se doter de cet outil. C’est ainsi que la CIA a identifié un « collier de perles » (allusion au groupe californien string of pearls de ports que les Chinois aménagent, fréquentent et protègent des îles Coco à Chittagong ou Gwadar au Pakistan). C’est pour cela que les Chinois se sont dotés de deux porte-avions opérationnels et de la deuxième marine du monde.
  • Les routes terrestres de la soie et les corridors économiques : qui y sont branchés appartiennent aussi au registre des nouvelles frontières de la Chine ou du moins sont-elles ressenties comme telles par ses compétiteurs. L’ouverture est ainsi structurée par ces ponts terrestres, réactivation des vieilles routes de la soie créées il y a 2000 ans pour relier Xi’an capitale ancestrale de l’Empire mandchou et Antioche. Le projet est ambitieux pour ne pas dire pharaonique : quelques 70 États regroupant 4,5 milliards d’habitants et représentant 40 % du PIB de la planè Il donne la mesure de la capacité de la Chine à vouloir se produire sur la scène internationale comme une grande puissance épicentre d’un développement commun « Asie/Europe/ Afrique » et comme initiatrice d’une nouvelle donne géopolitique polycentrique. Le but de OBOR (One Belt One Road) est bien de créer de nouveaux hubs commerciaux internationaux, le long de deux routes principales : la Maritime Silk Road et la Silk Road Economic Belt et d’assurer l’intégrité du territoire chinois en orientant les lignes de force des trafics de demain.
  • Littoraux : interface terre-eau entre un hinterland et un espace maritime (foreland), organisation originale de l’espace, exploitation des ressources marines, tourisme, échanges.
  • Façades maritimes : contact terre/mer, contact entre l’hinterland et le foreland, centré autour du port.
  • Territorialisation : appropriation des territoires.
  • Littoralisation : concentration des activités et populations sur le littoral, mise en valeur des littoraux pour être plus proche des routes maritimes comme à l’époque coloniale.
  • Maritimisation : degré de dépendance de plus en plus forte des nations à l’ouverture océanique, fait essentiel de la mondialisation.
  • Puissance maritime : État pouvant prétendre à la maîtrise des mers, dont le pouvoir de domination repose sur cette maîtrise, culture de la mer (esprit thalassique). Passe par les flottes marchande et militaire, le contrôle des points de passage, la construction navale. Permet la sécurité des approvisionnements, et de limiter la capacité de nuisance des autres.
  • Hubs maritimes : centre d’éclatement pour le transport de marchandises, en général conteneurisé Le terminal à conteneurs est le lieu du transbordement des conteneurs entre les navires-mères engagés sur les grandes lignes transocéaniques et les navires feeders engagés sur des lignes régionales qui desservent des ports secondaires. Les hubs maritimes sont situés à l’intersection des grandes routes est-ouest et des routes nord-sud. Les hubs de transbordement n’ont pratiquement pas de trafic d’hinterland : Algésiras, Gioa Tauro, Marsaxlokk en Méditerranée ; Salalah, Colombo, Singapour dans l’Océan Indien. En revanche, les hubs de la Northern Range sont des hubs de transbordement et des ports d’hinterland : Rotterdam, Anvers, Hambourg, Le Havre.
  • Réseau en hubs and spokes : trafic en étoile autour d’un nœud géographique dans lequel s’opèrent les correspondances. Concerne surtout les transports maritimes et aériens. Le hub peut apparaître comme un multiplicateur de des nations, tout en étant relié par des flux denses à des centres très éloignées géographiquement. Le hub permet une connexion multimodale et s’appuie sur l’inter-modalité.
  • Inter-modalité : ensemble des techniques facilitant le passage d’un mode de transport à un autre. L’inter-modalité exige une multi-modalité (coordination entre les différents moyens de trans- ports).
  • La localisation des infrastructures et le fonctionnement des réseaux de transports déterminent trois types de structures spatiales :
  • Les régions centres : essentiellement métropoles. Concentration hommes/activités en font des régions offrant une bonne connexion avec le reste du monde, tout en s’efforçant d’établir des liaisons avec l’intérieur.
  • Les régions de passage : des espaces traversés par les nouvelles infrastructures de transports dont les impacts économiques et humains sont variables, car les flux générés ne sont pas toujours contrôlés par les régions traversées. (Effet tunnel, etc.)
  • Les espaces périphériques : (1) des périphéries qui se marginalisent et qui peuvent être oubliées dans la mondialisation (angles morts) ; (2) des périphéries qui se développent et peuvent présenter un intérêt dans la mondialisation (périphéries qui commencent à s’intégrer via agriculture ou tourisme).
  • Les Routes des Conteneurs : Centrées sur l’Asie-Pacifique, contribuent au basculement. Une grande artère : l’artère circumterrestre conteneurisée avec des branchements, lignes secondaires & hubs (Singapour) et hubs secondaires (Algesiras, Kingston). Routes confrontées au problème du gigantisme : construction de 18 000 EVP (Maersk) alors qu’en Afrique,
    ports prévus pour des 2-3 000 EVP.
  • Ouverture de nouveaux passages : canaux (projet Isthme de Kra en Thaïlande pour contourner Malacca) &  Land bridges.
  • Méditerranée Asiatique (François Gipouloux ) (2009) :
    Gipouloux entend montrer comment s’est constitué un corridor maritime articulé sur les bassins interconnectés des mers du Japon et de Chine en reliant entre eux des éléments dont la chaîne de connexion semblait rompue.
    Il distingue bien les deux phénomènes majeurs de l’émergence de l’Asie contemporaine : la diffusion du modèle d’industrialisation japonais à la faveur des délocalisations provoquées à partir de 1985 par la flambée du yen, et l’irruption de la Chine dans l’économie mondiale. Il met en lumière la cohérence de vastes zones économiques transnationales aux maillages multipolaires dans lesquelles l’État-nation n’est plus le fil conducteur. Par exemple, « les villes peuvent avoir une logique et une finalité qui n’est pas celle des États ».
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Zak Bennis