L’Himalaya est une chaîne de montagnes d’Asie du Sud, qui comporte les sommets les plus hauts du monde, dont l’Everest qui culmine à 8 849 mètres d’altitude. Sur les 14 sommets du monde dépassant les 8 000 mètres, 10 sont dans cette chaîne que l’on appelle aussi “le toit du monde”.
Il y a des millions d’années, l’Inde était une île et d’après la théorie de la tectonique des plaques, l’Himalaya est le résultat de la collision de la plaque indienne et de la plaque eurasienne. Aujourd’hui, 5 pays se situent sur ces sommets : l’Inde, la Chine, le Pakistan, le Népal et le Bhoutan.
L’objectif de cet article sera d’étudier la géopolitique de cette zone géographique exceptionnelle. La région de l’Himalaya est riche, unique et instable, du fait de conflits remontant à la colonisation, qu’elle soit britannique, musulmane ou chinoise.
Le Cachemire : 70 ans de conflit indo-pakistanais
L’Inde et le Pakistan, ainsi que le Sri Lanka, le Bangladesh et la Birmanie, faisaient partie des Indes britanniques. Le Royaume-Uni ne prenait pas en compte les singularités ethniques, culturelles et religieuses de ces territoires qui formaient à l’époque de véritables mosaïques. Mais dès la colonisation britannique, une hiérarchie se fait entre les différentes populations, avec les hindous considérés comme supérieurs aux musulmans.
Aux indépendances, les frontières sont tracées afin de respecter les religions des territoires. La partition se fait entre deux États : l’Inde, qui récupère les territoires à majorité hindoue, et le Pakistan, qui récupère les territoires à majorité musulmane. Le Bangladesh, à l’Est de l’Inde, fusionne avec le Pakistan et devient le Pakistan oriental, séparé du reste de son pays. Afin de respecter cette division, un immense exode a lieu. Plus de 15 millions d’habitants sont déplacés et on compte près de 500 000 morts dans des massacres (d’après le magazine L’Histoire). Des villages entiers, des temples et mosquées sont incendiés. Aujourd’hui, les rapports entre l’Inde et le Pakistan sont toujours conflictuels. Le Bangladesh, avec le soutien de l’Inde, obtient son indépendance du Pakistan en 1971. Dans leur histoire, l’Inde et le Pakistan ont connu trois guerres en 1947, en 1965 et en 1999.
De nos jours, c’est la région du Cachemire qui est au cœur du conflit indo-pakistanais. Situé en Inde, ce territoire est à majorité musulmane. Cela permet au Pakistan d’affirmer sa souveraineté légitime sur le Cachemire, région qui aurait dû lui revenir aux indépendances. C’est la théorie des deux nations. En Inde, le gouvernement nationaliste hindou de Narendra Modi réprime de plus en plus les Indiens musulmans. Au Cachemire, un exode massif des hindous a lieu, lié aux activités violentes de groupes terroristes pakistanais. Ce conflit est directement lié à la colonisation, car avant l’arrivée des Britanniques, le Cachemire était une société laïque dans laquelle hindous et musulmans vivaient en harmonie. Aujourd’hui, le risque est alors une escalade des tensions entre l’Inde et le Pakistan, deux pays qui possèdent l’arme nucléaire.
L’annexion du Tibet : l’implantation de la Chine dans la région
Dans le conflit opposant l’Inde et le Pakistan, la Chine a également un rôle à jouer. Présente dans le Nord de la chaîne de montagnes, elle est voisine du Cachemire. Elle contrôle même une partie de cette région. Pékin est en effet devenue une partie prenante au contentieux sur le Cachemire en concluant en 1963 un accord avec le Pakistan. L’objectif d’Islamabad est de déstabiliser New Delhi en faisant entrer en jeu son grand rival chinois. Depuis, la Chine encourage l’installation de plus en plus de ressortissants chinois dans la région.
C’est l’annexion du Tibet en 1950 qui permet à la Chine de s’imposer comme puissance en Himalaya. Ce n’est pas la première fois dans l’histoire que la Chine envahit le Tibet. Au 18e siècle, elle avait fermé la région aux étrangers pendant presque deux siècles. Le Tibet, région centrale du bouddhisme en Asie, a subi un véritable “génocide culturel à l’encontre de son peuple”, pour reprendre les termes du dalaï-lama. Ce dernier reçoit d’ailleurs le prix Nobel de la paix en 1989.
En 2008, lors des Jeux olympiques de Pékin, les Tibétains ont profité du fait que la Chine était au centre de l’attention pour faire parler d’eux. De nombreuses manifestations ont éclaté et plusieurs moines bouddhistes et civils tibétains se sont immolés par le feu pour protester contre le sort réservé à leur peuple et à leur nation. Pourtant, bien que le Tibet soit une région immense (un quart du territoire chinois), les Tibétains représentent seulement 6 millions d’habitants, contre 1,4 milliard de Chinois.
Aujourd’hui, l’indépendance du Tibet semble peu probable. Deux des principales raisons sont la richesse de la région en ressources et les nombreuses sources de grands fleuves asiatiques qu’abrite le Tibet. Le Fleuve Jaune ou encore le Mékong, qui desservent une dizaine de pays en Asie du Sud et du Sud-Est, proviennent du Tibet. L’enjeu géopolitique est beaucoup trop grand pour la Chine pour qu’elle abandonne ce territoire stratégique et immense.
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Le Bhoutan et le Népal, petits pays entre deux géants asiatiques
Le Bhoutan et le Népal sont deux pays enclavés entre la Chine et l’Inde, dans les sommets himalayens. Le Bhoutan, avec près de 800 000 habitants, est un petit pays culturellement et religieusement proche du Tibet. Grâce à des barrières montagneuses, cette région a souvent été protégé des invasions, qu’elles soient mongoles ou musulmanes. Le pays est en revanche placé sous protectorat britannique au début du 20e siècle. Aujourd’hui, le Bhoutan est considéré comme un pays stable et pacifique.
Le Bhoutan est également connu pour mesurer le niveau de bonheur de ses habitants, qui a remplacé le produit national brut bhoutanais. Cet indice, appelé le “bonheur national brut”, est instauré par le roi en 1972 et se base sur quatre principes fondamentaux : la croissance et le développement économiques responsables, la conservation et la promotion de la culture bhoutanaise, la sauvegarde de l’environnement et la bonne gouvernance responsable. Ce pays semble alors faire figure d’exception dans la région, autant pour ses singularités démographiques et territoriales que politiques.
Le Népal, comptant 30 millions d’habitants, est souvent considéré comme un pays inaccessible. Longtemps resté fermé aux étrangers, ce n’est qu’en 1951 qu’il s’ouvre au monde extérieur. Aujourd’hui encore, le Népal demeure un État isolé dans le monde, de par sa position géographique. Mais ce pays s’est montré comme étant un acteur important dans le tourisme en Himalaya. Le tourisme des sommets s’est même transformé en tourisme de masse. Les monts népalais voient même aujourd’hui passer des embouteillages de randonneurs. Pourtant, l’alpinisme dans cette région extrême pose de réels problèmes de sécurité et de protection de l’environnement. Chaque année, des dizaines de personnes meurent en voulant gravir des monts népalais, qui sont aujourd’hui de véritables poubelles. Depuis 2024, les autorités népalaises distribuent à chaque alpiniste un sac poubelle d’une contenance de 8 kilos. Chacun doit revenir en ayant rempli ce sac, sous peine d’une amende pour chaque kilo non rempli.
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Conclusion
Finalement, l’Himalaya est une région aussi prometteuse qu’instable géopolitiquement. Elle est au cœur des nouvelles dynamiques mondiales, centrées autour de l’Asie du Sud-Est. Ses deux géants, la Chine et l’Inde, compte bien gagner en influence dans cette région. En revanche, le risque est l’escalade des tensions entre ces pays possédant l’arme nucléaire.