Ridley Scott est connu pour avoir sorti diverses pépites au cours des quarante dernières années. De Blade Runner à Gladiator en passant par Seul sur Mars, sa filmographie regorge de films qui nous ont marqué. Alors quand son nouveau film House of Gucci fut annoncé pour décembre 2021, avec en plus un casting pléthorique (Lady Gaga, Adam Driver, Salma Hayek, Al Pacino, Jeremy Irons, Jared Leto, sans oublier Camille Cottin, soyons un peu chauvin), il devient tout de suite indispensable pour tout fan de cinéma de se rendre dans les salles obscures. Alors si en plus je vous dis qu’il s’agit d’une référence facile à ressortir dans une copie de géopolitique aux concours sur la mondialisation, sautez sur l’occasion et lisez attentivement ce qui va suivre.
Un film symbolisant l’internationalisation des flux
House of Gucci retrace entre les années 1980 et la fin des années 1990 l’évolution de la famille Gucci donc du groupe éponyme qu’elle possède encore à l’époque. Au début du film, ce sont deux visions du goupe qui s’opposent : celle de Rodolfo Gucci (Jeremy Irons) et celle de Aldo Gucci (Al Pacino). Rodolfo veut garder l’entreprise telle qu’elle était lorsqu’il a fondé : une compagnie familiale et à très forte dominante européenne. Il s’oppose en cela à son frère Aldo qui lui veut faire entrer Gucci de plein pied dans le processus de mondialisation, notamment en s’internationalisant via les États-Unis et le Japon. Si Rodolfo, détenteur de 50% des parts du groupe, tente un long moment de repousser l’inévitable, Aldo finit par obtenir gain de cause, son frère mourant comme si il appartenait à un monde passé et n’avait plus la place dans un secteur économique en pleine mutation. Le fils de Rodolfo Maurizio est alors nommé coordinateur des opérations internationales et l’entreprise entre résolument dans l’internationalisation en attirant des clients de tous les horizons.
La multiplication des acteurs liée à la mondialisation est aussi présente dans House of Gucci
Ici, on peut majoritairement citer deux types d’acteurs qu’on ne connaissait pas ou en tout cas beaucoup moins avant la mondialisation.
Tout d’abord citons le cas des fabricants de contrefaçons, qui si leur apparition ne date pas du début du processus de mondialisation dans les années 1980, se sont multipliés comme des petits pains depuis cette date. S’étant un moment installé à New-York, Maurizio Gucci voit un jour sa femme Patrizia Reggiani faire irruption dans son bureau furieuse. En effet, celle-ci en se promenant dans un marché sur les conseils de sa femme de ménage tombe sur un étal rempli de contrefaçons Gucci forcément vendues à prix cassé. Dès lors, un débat s’engage portant sur l’intérêt ou le danger de ce type de concurrence pour des entreprises telles que Gucci, débat qui existe encore aujourd’hui. D’un côté, on peut comme Patrizia Reggiani qualifier cette concurrence de déloyale et représentant un danger pour l’entreprise puisqu’elle peut être dommageable à l’image de Gucci dont tout le monde même sans y mettre le prix peut se procurer des produits à prix cassés, qui plus est moins cher ce qui représente évidemment un manque à gagner pour l’entreprise. Aldo Gucci de l’autre peut voir celle-ci comme une formidable opportunité de faire grandir l’aura de la marque Gucci de manière exponentielle vu qu’à présent tout le monde pourra se payer du Gucci, ce qui peut également se comprendre.
Second élément important, la multiplication du nombre de fonds d’investissements venus de tous les pays. En effet, lorsque Maurizio recherche des fonds pour avoir les moyens de racheter les parts de l’entreprise détenues par le reste de sa famille, il contacte des investisseurs irakiens, déjà connus pour avoir racheté et redressé en leur temps Tiffany, autre grande marque du luxe mondial.
Les dérives de la mondialisation et les tensions au sein d’une entreprise, sujet central d’House of Gucci
Si House of Gucci est un film ancré de plein fouet dans le phénomène de mondialisation, il en montre aussi certaines des dérives les plus sombres. Parlons un peu plus des nouveaux actionnaires irakiens que nous venons de mentionner. Alors que Maurizio Gucci mène un ambitieux plan de développement de l’entreprise sur cinq ans destiné à redresser celle-ci économiquement tout en en conservant les standards de qualité, les actionnaires attendent eux des résultats économiques maximisés immédiatement, quitte à ce que l’entreprise Gucci perde un peu de ce qui fait son âme. Ils finissent par tenter de bouter Maurizio, dernier membre de la famille ayant fondé l’entreprise. On voit bien ici un exemple d’un phénomène souvent critiqué par les détracteurs du phénomène de mondialisation néolibérale : les actionnaires et le chiffre d’affaires (d’où découlent leurs dividendes, justes retour selon eux pour leurs investissements) sont rois, au détriment de tout le reste (conditions de travail, qualité des produits vendus…)