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Inégalités aux États-Unis

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Au sortir de la Seconde Guerre Mondiale, les Etats-Unis étaient engagés dans une forme de capitalisme favorisant l’expansion et la prospérité des classes moyennes : une économie centrée sur la consommation de masse des ménages, un Etat keynésien soutenant l’économie, un taux marginal d’imposition élevé… Si la concentration des richesses et la pauvreté y étaient déjà présentes, les politiques redistributives permettaient de nuancer la propension du système à l’inégalité. Nonobstant, la décennie 1980 a constitué un remaniement radical du capitalisme, incarné par les deux mandats de Ronald Reagan : libéralisation et privatisation de l’économie, démantèlement progressif de l’Etat-providence, austérité budgétaire, triomphe du monétarisme de Friedman et de l’Ecole de Chicago… La logique de cette nouvelle forme de capitalisme n’est alors plus l’inclusion des travailleurs dans l’économie, mais plutôt une course à la croissance favorisant la concentration du profit, l’évasion fiscale et l’accroissement des inégalités. Aujourd’hui, même si le PIB par habitant en PPA du pays se maintient au 4èmerang mondial (en 2019 et en excluant les micro-Etats), les inégalités restent très fortes et se répercutent sur la santé des Américains.

La richesse entre les mains d’une partie minoritaire de la population 

Accrues par les crises de 2008 et de 2020, les inégalités sont aujourd’hui criantes et croissantes aux Etats-Unis : 1% des plus riches américains détient 34% du patrimoine national selon l’économiste Thomas Piketty dans son ouvrage Le Capital au XXIème siècle. En effet, le rendement du capital est supérieur à la croissance et à l’augmentation des salaires, si bien que la richesse reste – et se concentre – dans les mains d’une même frange minoritaire de la population. De surcroît, la financiarisation de secteurs de plus en plus diverses de l’économie couplée à l’omniprésence de l’investissement spéculatif participe aussi à la radicalisation des inégalités, les plus riches utilisant leur capital financier pour créer encore plus de capital financier.

 

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Un marché du travail trop flexible ? 

Toutefois, malgré de telles différences de richesse entre les individus, il convient de mettre en avant le faible taux de chômage américain. Il a atteint un minimum historique avant la pandémie de 2020 : environ 3,5% de la population. Cette réussite apparente est directement liée à la flexibilité du marché du travail américain. S’il est ainsi plus facile de trouver un emploi, il est aussi plus aisé de le perdre. En effet, la grande flexibilité du marché du travail est à l’origine d’une expansion du sous-emploi et de la précarisation du travail (licenciements plus récurrents, salaires plus bas et irréguliers…), renforcée par l’essor de « l’économie collaborative » et de « l’ubérisation » de la société. De ce fait aux Etats-Unis, contrairement à dans d’autres pays développés, l’emploi n’est pas une sécurité contre la précarité. On parle alors de « working poors » pour désigner les travailleurs dont l’emploi ne leur permet pas de vivre décemment. Pour lutter contre le chômage, il existe une assurance chômage depuis 1935, gérée individuellement par chaque Etat tout en respectant des lois cadres fixées à l’échelon national (durée de 26 semaines en général, montant plafonné mais très variable selon les Etats…). Plus globalement, l’Etat dépense près de 1000 milliards de dollars d’aides sociales (aide alimentaire, aide au logement…) pour assister les plus démunis, sans pour autant atteindre des résultats probants.

 

Les inégalités « ethno-raciales« 

Enfin, la pauvreté touchait 37,2 millions d’américains en 2020 (soit 11,4% de la population) et est le reflet des iniquités dites « ethno-raciales » qui gangrènent le pays ; la pauvreté touche en effet deux fois plus les populations noires que blanches. Plus globalement, les Noirs et les Hispaniques sont plus pauvres que les Blancs et les Asiatiques. Si de telles études statistiques basées sur la « race » ou le groupe ethnique semblent déplacées pour un lecteur français, c’est une pratique courante et de longue date aux Etats-Unis. Ainsi, on observe que la ségrégation raciale, pourtant abolie au milieu XXème siècle, persiste de facto par des discriminations structurelles économiques (difficultés d’accès à la propriété, aux prêts bancaires…) et sociales (refus des grandes universités, élévation sociale presque impossible, ghettos…).

 

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Auriane Ducherpozat