L’économie sera politique ou ne sera pas !
Une citation attribuée au célèbre politicien et écrivain français André Malraux disait « le 21ème siècle sera spirituel ou ne sera pas ». Cette citation m’en a en effet inspiré une autre version, quelque peu éloignée : « L’économie sera politique ou ne sera pas ». Je m’explique sur cette citation : En effet, généralement lors d’une dissertation d’ESH, on ne traite que de problèmes économiques et si l’on ne comprend pas que ces problèmes économiques sont inextricablement liés à des volontés politiques (rationnelles), on passe selon moi à côté de quelque chose. Généralement les solutions aux problèmes économiques sont connues, en grossissant le trait, si un pays est déprimé économiquement parlant, il faudrait faire une politique de relance, s’il y a trop d’inflation, il faudrait faire une politique d’austérité pour calmer cette inflation… Or dans la plupart des cas, les solutions qui peuvent paraître évidentes ne sont pas mises en place ou alors de manière extrêmement partielle, Comment la théorie économique peut-elle expliquer cela ? On pourrait résumer la réponse en une phrase, en effet les problèmes sont de nature économique mais les solutions, elles, sont politiques. Or le côté politique est dirigé par un gouvernement, des parties prenantes, qui ont aussi des intérêts privés rationnels en tant qu’agents économiques.
Par exemple, certains auteurs qui forment l’école de pensée du « Public Choice » pensent que les cycles ne sont pas déterminés uniquement par des causes macroéconomiques (bulles spéculatives, crises de surproduction etc…) mais bien par le contexte électoral. Pour William Nordhaus, prix Nobel 2019 d’économie (pour d’autres travaux concernant l’écologie), dans « Political business cycle », (1975) la situation économique d’un pays est liée à la rationalité du gouvernement en place, et à sa volonté de réélection. Un exemple assez parlant de cela, est l’exemple français de François Hollande au cours de son mandat 2012-2017. Celui-ci débute sa politique en pratiquant une politique de rigueur pour consolider le budget de l’État en vue de la fin du mandat. Ceci fut d’ailleurs selon une étude publiée par l’OFCE (observatoire français des conjonctures économiques) le lundi 5 septembre 2016, une erreur car l’augmentation de la fiscalité a été un vrai fardeau pour les ménages et les PME (erreur de multiplicateur fiscal de la part du gouvernement Hollande), plus de 40 milliards d’euros supplémentaires d’impôts sur les ménages et les entreprises, ce qui a déprimé la consommation entre 2012 et 2013. La suite de sa politique, et notamment la fin fut une politique de relance. Pourquoi ? Parce qu’en donnant une image dynamique de sa politique et plus de pouvoir d’achat aux ménages, il pensait accroitre ses chances de réélections.
Un exemple de cycle politico-économique
On a donc bien ici, un exemple de cycle politico-économique qu’il est bon d’évoquer en copie notamment pour un sujet concernant l’État. Parmi ces théories incriminant en quelque sorte les gouverneurs, il y a un autre aspect que l’on pourrait développer ici, qui est la théorie du lobbying développée par Buchanan & Tullock dans « the calculus of consent », (1962). Un exemple simple de cette théorie est l’exemple du lobby des armes aux États-Unis, la plupart de la population américaine voudrait une réglementation plus forte des armes mais il est impossible de le faire car ce lobby des armes représenté par la N.R.A. est bien trop puissant. En effet comment demander à Donald Trump de réglementer l’afflux d’armes aux États-Unis alors que dans le même temps la N.R.A a financé sa campagne à hauteur de 31,2 millions de dollars (selon un article du Monde datant du 06/11/2019) ? C’est bien ce que l’on appelle la théorie de la recherche de rente, certaines associations ou organisations telles que la N.R.A usent de moyens légaux (la subvention à des partis politiques pour les campagnes) ou de moyens illégaux (pots de vins), dans le but d’avoir une position préférentielle, qui leur permet d’obtenir ce qu’ils veulent du gouvernement en place.
Tout cela pour dire que dans tous les cas l’économique est toujours relié au politique, en effet, les décisions en matière de politiques économiques sont en général prises par des hommes politiques et non par des économistes objectifs. Ainsi, il est intéressant de garder cela à l’esprit et de le développer en 3ème partie quand on aborde les réformes possibles. En effet pourquoi certaines réformes qui paraissent plutôt évidentes ne sont pas mises en place ? Tout simplement parce que le décisionnaire politique pour plusieurs raisons (entrave dans ses chances de réélection, volonté de ne pas se mettre les lobbys à dos…) n’y a pas intérêt. Comme disait Charles De Gaulle dans « Mémoires de guerre », (1954) : « Ce qui est salutaire à la nation ne va pas sans blâmes dans l’opinion ni sans pertes dans l’élection ». Cette citation montre bien le conflit d’intérêt qui existe entre l’intérêt collectif (politique qu’il faudrait mener) et l’intérêt privé rationnel du politique (politique que mène le politique pour arriver à ses fins). Ainsi on peut bien affirmer que l’économie est politique ou ne l’est pas du tout.