En août 2021, 4 millions d’américains ont quitté leur travail car un certain nombre de travailleurs non-qualifiés savent que oui de l’autre côté de la rue il y a des offres d’emploi et mieux rémunérés. Le phénomène s’appelle The Great Resignationou Big Quit, la grande démission en français et il touche les cafés, les restaurants mais aussi la santé et l’éducation. De fait, de nombreuses questions apparaissent : Est-ce que la pandémie a inversé le rapport de force sur le marché du travail ? Est-ce que les salaires vont fortement augmenter ? Est-ce que par conséquent les salaires vont nourrir l’inflation ?
Le phénomène aux États-Unis
Durant la pandémie, ce sont surtout les jeunes et les plus âgés qui sont sortis du marché du travail. Les premiers pour, peut-être, reprendre des études, les seconds pour partir… en retraite. Les aides aux ménages sous forme de chèques ont pu donner de l’air à ceux qui voulaient faire une pause. Les performances de la Bourse ont aussi permis à certains de gonfler leur patrimoine. Selon une étude de la Réserve fédérale de Saint-Louis (Missouri), ils sont ainsi plus de 3 millions à avoir anticipé leur départ en retraite.
Cela amplifie un problème structurel ancien aux États-Unis : le taux de participation au marché du travail (ceux en emploi ou en cherchant un) a chuté de près de 2 points en dix-huit mois, à 61,6 %, en septembre. Et les crises créent des effets de palier : le taux de participation était de 66 % aux États-Unis avant la « Grande Récession » de 2008… S’ils sont 20 millions de salariés à avoir quitté leur travail depuis le début du printemps, la tendance s’est accélérée sur les trois derniers mois. Géographiquement, ce sont les régions du Midwest et le Sud, loin des côtes, qui sont les plus touchées par ce phénomène.
Cette sortie d’actifs, conjuguée à la reprise et au changement de nature de certains postes, crée des pénuries qui accélèrent le flux des démissions. Car la loi de l’offre et de la demande est particulièrement élastique aux États-Unis : les employeurs peuvent licencier sans préavis leurs salariés… qui peuvent aussi les quitter d’un jour à l’autre.
Sur les routes de Pennsylvanie, les offres d’emploi s’affichent en grand sur les panneaux publicitaires. RHI Magnesita, un industriel de York, offre même 3.000 dollars de bonus à l’embauche. Et beaucoup de grandes chaînes ont relevé leur salaire minimum à 15 dollars de l’heure, contre parfois 10 à 12 dollars précédemment. Cela à de quoi motiver des démissions en masse dans les métiers de services mal payés, qui connaissent des taux de démission record : 6,8 % dans l’hôtellerie et l’alimentation. La vente de détail a elle aussi connu en août un taux de départ plus élevé que la moyenne
Qu’en est-il en France ?
D’après le Banque de France, 300 000 emplois restent actuellement à pouvoir, on observe notamment d’importantes pénuries de main d’œuvre dans le secteur de l’hôtellerie et de la restauration très touché en 2020-21. Plus généralement, en septembre 2021, les ruptures conventionnelles ont augmenté de 9 % par rapport au mois de septembre 2019.
Les démissionnaires déclarent rechercher de meilleures conditions de travail, salaire, perspectives de carrières, mais aussi un meilleur équilibre entre leurs vies professionnelles et personnelles. Ils peuvent également être à la recherche de sens et de valeur dans leurs missions. Et en effet, au-delà des simples démissions, les réorientations gagnent également du terrain : un Français sur deux songerait à se reconvertir
Ce rejet du monde de l’entreprise est néanmoins à modérer dans l’Hexagone où la plupart des démissionnaires qui changent de poste restent toutefois dans le même secteur d’activité. En conclusion, pour les économistes de Natixis tout dépend des difficultés de recrutement, est-ce qu’elles sont durables ou non ? Pour eux la réponse est non en Zone Euro et aux États-Unis, mais un seul pays devrait craindre la vraie inflation et c’est le Royaume-Uni.