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Quelles politiques migratoires pour les pays de l’OCDE ?

Sommaire

Notion importante dans le programme de classe préparatoire en première année, la Mondialisation désigne l’extension des flux commerciaux, financiers et humains. Les flux humains de la Mondialisation concernent principalement les migrations, un phénomène au coeur de débats houleux et passionés en Europe, ainsi qu’aux Etats-Unis. Pour appréhender un peu mieux ce phénomènes aux conséquences transnationales, nous nous pencherons sur le rapport de la Banque Mondiale et de l’Agence Française de Développement “Migrants, Réfugiés et Sociétés”

 

Avant de débuter la synthèse de ce rapport, il est nécessaire de se pencher de plus près sur le terme « migrant » et sur le concept de « migration ». Ce sont des prérequis indispensables pour comprendre ce rapport. 

Cadre sémantique et théorique pour comprendre les migrations

Selon les Nations Unies, un migrant est une personne « qui a résidé dans un pays étranger pendant plus d’une année, quelles que soient les causes, volontaires ou involontaires, du mouvement, et quels que soient les moyens, réguliers ou irréguliers, utilisés pour migrer ». Ce terme assez vague englobe plusieurs catégories, dont notamment celle de « réfugié ». La Convention de 1951 définit les réfugiés comme des personnes se trouvant « hors de leur pays d’origine en raison d’une crainte de persécution, de conflit, de violence […] et qui, en conséquence, exigent une « protection internationale ». 

 

La migration correspond au déplacement de populations d’un pays à un autre. Si ce terme est beaucoup employé dans le débat public, il est souvent mal compris à cause d’une définition insuffisamment exigeante, d’où la nécessité de revenir sur ses fondements, c’est-à-dire les causes qui poussent des personnes à migrer. La théorie des Pull and Push factors est régulièrement employée pour expliquer ce phénomène. 

 

Théorie des Pull and Push Factors

En partant du constat que la migration est un arrachement, il faut une combinaison de facteurs pour pousser une personne à migrer et quitter biens et familles. Tout d’abord nous retrouvons les « Pull Factors », c’est-à-dire des phénomènes qui attirent une personne dans un pays. Par exemple, un marché de l’emploi développé ou des conditions de vie favorables. Les « Push Factors » sont des phénomènes provoquant le départ d’une personne hors de son pays. Par exemple, lorsque le marché de l’emploi est saturé ou lorsque la société est sclérosée. 

 

Synthèse du rapport Migrants, Réfugiés et Sociétés

Retrouvez ici les points clés découlant de la synthèse du rapport “Migrants, Réfugiés et Sociétés” 

Construire une matrice des catégories de migrants…

La fonction novatrice de ce rapport est d’établir une classification pratique des catégories de migrants, en se basant sur deux paramètres : (1) l’alignement des migrants aux besoins des pays d’accueil, et (2) les motivations qui poussent les personnes déracinées à partir (recherche d’opportunités, menaces…). En mettant en relation ces ceux paramètres, quatre catégories de migrants sont ainsi identifiées :

  • Les migrants à la recherche d’opportunités de travailavec des compétences ou aptitudes recherchées par les pays d’accueil. Dans ce cas, l’alignement est élevé et les motivations sont « faibles » car les personnes déracinées n’encourent pas un danger de mort. 
  • Les réfugiés (définis par la convention de 1951) dont les compétences entrent en accord avec les besoins des pays d’accueil. Ici, l’alignement et les motivations sont élevées. 
  • Les réfugiés dont les compétences ne s’alignent pas avec les besoins des pays d’accueil. Par exemple, des jeunes mineurs isolés ne pouvant pas travailler à cause de leur jeune âge. Les motivations sont élevées mais l’alignement reste faible. 
  • Les migrants à la recherche d’opportunités de travail et de meilleures conditions de vie mais dont les compétences ne correspondent pas aux besoins des pays d’accueil. Dans ce cas, l’alignement et les motivations sont faibles. Si ces personnes ne sont pas considérées comme « réfugiés » il convient toutefois de noter que la plupart ont été soumis à de violents traumatismes durant leur voyage, et que les risques encourus sont très élevés. 

… pour mesurer les coûts et bénéfices des migrations

Ce cadre théorique permet selon le rapport d’accompagner la politique migratoire des Etats en mesurant les coûts et bénéfices des migrations. Dans les deux premières catégories définies ci-dessus, l’alignement des migrants aux besoins des pays d’accueil est élevé. Il est autant question de migrants peu qualifiés, mais enclins à travailler dans des secteurs où la population locale y est réticente, que de migrants qualifiés capables d’améliorer la productivité de certains pans de l’économie. Dès lors, les coûts d’accueil et d’intégration sont inférieurs aux gains générés par ces personnes. Ce rapport définit donc ces types de migrations comme profitables et encourage ce type de mobilité. 

Si les migrations ne posent théoriquement pas de problèmes dans le cas précédent, la question est plus épineuse lorsque l’alignement des migrants avec les besoins des pays d’accueil est faible. En effet, les coûts d’accueil et d’intégration sont cette fois-ci supérieur aux bénéfices que les pays d’accueil peuvent en tirer. Les migrations qui constituaient un avantage dans le cas précédent deviennent une source de difficulté pour les pays d’accueil. Que faire alors ? Si les migrants sont considérés comme des réfugiés, la question ne se pose en réalité pas. Les pays d’accueil doivent se soumettre au droit international et par conséquent les accueillir. Mais dans le cas contraire ? Toute la difficulté des Etats réside dans le quatrième cas (définit ci-dessus). 

Plusieurs pistes de réflexion pour amortir les coûts dans les pays d’accueil

Dans ce quatrième cas, le rapport envisage le renvoi de ces personnes dans leur pays d’origine : une mesure certes terrible pour les personnes déracinées, mais nécessaire pour assurer la pérennité du système migratoire et des règles internationales. D’où la nécessité, d’après le rapport, de faire des droits de l’homme et la dignité des personnes la pierre angulaire de cette politique. Certains pays ont déjà mis en place des instruments Ad Hoc pour protéger les migrants non reconnus comme réfugiés. Le renvoie dans les pays d’origine doit aussi se faire en concertation avec les pays frontaliers. En effet, de nombreux migrants se retrouvent bloqués dans des pays de transit, où leurs conditions sont plus qu’incertaines – c’est le cas au Mexique ou au Maroc. Des arrangements financiers et une politique de coopération doivent être institués lors des déplacements. 

Pour éviter les expulsions, le rapport insiste sur deux mesures à mettre en place. Sur le long terme, une politique d’aide au développement afin de renforcer (1) l’éducation et (2) le marché de l’emploi – rappelons nous qu’une société sclérosée et qu’un marché de l’emploi peu développé sont deux puissants « Push Factors ». Sur le court terme, il s’agit de renforcer les coopérations entre pays d’origines et pays d’accueil pour proposer de nouvelles voies de migrations légales. 

Dans le troisième cas, (réfugiés dont les compétences ne s’alignent pas avec les besoins des pays d’accueil) les pays doivent aussi repenser leur politique d’accueil. Compte tenu de la situation déplorable de nombreux réfugiés – beaucoup vivent dans l’attente durant de nombreuses années – il est nécessaire de passer d’une approche court-termiste à une politique d’accueil de moyen terme. D’une part en leur donnant un droit au travail dès le début tout en leur permettant d’accéder au système d’éducation et de santé. D’autre part en autorisant la mobilité interne pour soulager certaines zones en tension – notamment près des frontières. Leurs compétences pourraient alors être mises au service des besoins de certaines régions. 

 

Lire plus : L’immigration, un danger pour le marché du travail ? 

Adopter une approche multilatérale : clef de voûte d’une politique d’accueil réussie

Les migrations génèrent des tensions croissantes entre Etats au moment même où la coopération est plus que jamais indispensable. D’après le rapport, la coopération pourrait prendre une forme bilatérale ou multilatérale en fonction des différentes situations. La coopération bilatérale servirait à (1) adapter les compétences des migrants des pays d’origine aux besoins des pays d’accueil, (2) faciliter le transfert de compétences des migrants vers leur pays d’origine – exemple du Global Skill Partnership. La coopération multilatérale est nécessaire au niveau régional pour répartir les migrants en fonction des besoins de chacun des pays – exemple du Single Market and Economy. Au niveau national, la coopération devrait inclure d’autres parties prenantes comme le secteur privé, les partenaires sociaux et les autorités locales qui définiraient ensemble les besoins en main d’œuvre du marché local.

Lire plus : Migrations internationales et conflits planétaires

 

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Jonathan Fellous