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Les semi-conducteurs ou le symbole des tensions géopolitiques mondiales

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Le combat autour des semi-conducteurs ne se voit guère à l’œil nu, pour autant les États-Unis, la Chine et désormais l’Europe se disputent le leadership de la fabrication des puces électroniques, laissant émerger des tensions géopolitiques mondiales.

Les semi-conducteurs sont essentiels pour les appareils électroniques

Par définition, les semi-conducteurs sont des matériaux dont les propriétés leur permettent d’être à la fois un conducteur électrique et un isolant. Par abus de langage, le terme semi-conducteur désigne aussi les puces utilisant ces matériaux, sur lesquels sont gravés les composants électroniques. Ces puces à semi-conducteurs permettent aux appareils électroniques de recevoir, traiter et stocker des informations. Elles sont présentes dans la plupart des produits manufacturés (ordinateurs, data centers, automobiles, dispositifs médicaux, robots industriels, algorithmes d’intelligence artificielle) qui fonctionnent à partir de l’électricité. Elles sont la base de la technologie moderne et comme le rappelle Alice Pannier, responsable du programme géopolitique des technologies à l’Institut français des relations internationales, « elles sont au cœur de nos vies numériques et de nos vies tout court ».

Le corollaire de cette omniprésence implique une forte dépendance de nos sociétés aux semi-conducteurs, un simple problème d’approvisionnement ce sont des pans entiers de l’économie qui doivent s’arrêter, comme l’industrie automobile après la pandémie : « Au niveau mondial, 11,3 millions de voitures n’ont pas pu être produites en 2021 en raison du manque de puces », rappelle la Commission européenne.

Le marché mondial des semi-conducteurs est valorisé à 505 milliards d’euros et est appelé, selon les projections, à grandir de 60 % d’ici 2030 par rapport à 2021. Quelque 1 150 milliards de semi-conducteurs sont transportés d’un continent à un autre chaque année. En effet, avant d’être livrée, une puce doit subir 500 opérations différentes qui s’étalent sur quatre à six mois et lui font traverser 70 fois une frontière internationale. « Ce processus peut être divisé en trois grandes parties : d’abord, la conception des puces et les logiciels qui vont avec ; ensuite, le développement des machines industrielles nécessaires à la production des puces ; enfin, la fabrication des puces elles-mêmes», explique Christopher Miller, professeur à la Fletcher School. Pour des raisons d’optimisation des coûts, les rôles se sont répartis entre les Etats-Unis pour la conception et les logiciels, l’Europe et le Japon pour l’outillage industriel, et l’Asie pour la fabrication des puces », poursuit-il.

Il y a quelques décennies, les États-Unis et le Japon régnaient en maîtres sur cette industrie, dont l’américain Intel était le leader incontesté. Même si la puce à semi-conducteur a été inventée aux États-Unis, c’est aujourd’hui l’Asie, et plus particulièrement Taïwan, qui domine sa production : l’île produit plus de 60 % des semi-conducteurs dans le monde, et 92 % des plus sophistiqués L’entreprise TSMC (Taiwan Semiconductor Manufacturing Company), assure à elle seule plus de la moitié du marché mondial de la fonderie de ces puces électroniques.

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Les semi-conducteurs exacerbent les tensions géopolitiques mondiales

Le rôle stratégique et l’importance des semi-conducteurs sont soulignés dès 2020, avec la pandémie de Covid-19 et les confinements à répétition qui mettent à l’arrêt les chaînes de production des puces. Ce constat a poussé toutes les grandes économies mondiales à agir, en commençant par les Etats-Unis avec le CHIPS and Science Act, signé en août 2022 par Joe Biden, qui prévoit 280 milliards de dollars pour encourager la recherche et la fabrication de semi-conducteurs aux Etats-Unis. Dont 39 milliards de dollars d’aides pour la fabrication des puces sur le sol américain.  L’Europe cherche quant à elle à rattraper son retard face aux États-Unis et l’Asie. L’EU Chips Act, finalisé en avril 2023 à Bruxelles, va mobiliser 43 milliards d’euros de fonds publics et privés pour doubler à 20 % la part de l’Europe sur le marché mondial des semi-conducteurs, d’ici à 2030.

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Néanmoins, depuis quelques mois, Pékin et Washington se livrent une guerre froide au sujet des semi-conducteurs. Concrètement, les Etats-Unis ont choisi de rallier les Pays-Bas à leur guerre des puces contre la Chine et ce n’est pas le fruit du hasard. Ce petit pays abrite le joyau de l’Europe dans les semi-conducteurs : ASML, numéro un mondial des équipements de lithographie, l’étape la plus critique de fabrication de puces. A la demande des Etats-Unis, le gouvernement néerlandais interdit depuis le 30 juin la vente de la dernière génération de machines à la Chine.

La Chine possède une arme de rétorsion redoutable qu’elle utilise depuis quelques jours maintenant. Le 3 juillet 2023, les douanes et le ministère chinois du Commerce ont annoncé que les exportations de gallium et de germanium seraient soumises à visa à partir du mois d’août. Autrement dit, l’administration chinoise peut désormais bloquer à tout moment les exportations de ces terres rares entrant dans la fabrication des semiconducteurs les plus performants. Depuis quelques jours, les exportateurs chinois doivent demander des licences auprès du ministère du Commerce s’ils veulent commencer ou continuer d’expédier à l’extérieur du pays. Or, la Chine fournit 94 % du gallium utilisé dans le monde et 83 % du germanium.

Enfin, les semi-conducteurs exacerbent également un conflit plus asiatique et historique, celui entre la Chine et Taïwan. C’est un scénario catastrophe donne des sueurs froides à tous les acteurs : l’invasion de Taïwan par la Chine. « 90 % des puces les plus puissantes utilisées dans le monde sont produites à Taïwan. Et l’île n’est qu’à 180 kilomètres des côtes chinoises » Or, Pékin rappelle régulièrement sa volonté d’annexer l’île en organisant de très importantes manœuvres militaires autour.

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Pour conclure, cette guerre des semi-conducteurs qui fait rage entre Washington et Pékin est le symbole de nouvelles tensions géopolitiques mondiales. Certaines grandes entreprises ont fait état ces derniers mois de plusieurs tentatives d’espionnage ou d’infiltrations dans leurs réseaux d’origine chinoise.

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Damien Copitet
Je suis étudiant à SKEMA BS après deux années de classe préparatoire au lycée Gaston Berger (Lille). Nous nous retrouvons toutes les semaines pour l'actualité en bref