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La croissance conduit-elle à une convergence des niveaux de vie entre les pays ? (plan détaillé)

Sommaire

La Chine, souvent citée par Krugman pour sa « croissance par transpiration« , a vu son niveau de vie s’améliorer spectaculairement, passant de 97% de sa population vivant avec moins de 2 dollars par jour en 1981 à seulement 10% en 2010 selon Sala-i-Martin (The world distribution of income 2006) . Cette croissance fulgurante semble donner le ton à un rapprochement  des niveaux de vie chinois de ceux des pays développés.

 

Pourtant, le rythme de croissance chinois a ralenti (il y a des facteurs structurels qui l’expliquent), alors que le niveau de vie chinois (le PIB / habitant) ne correspond pas encore à celui des « pays développés ». C’est un pays à « revenu intermédiaire supérieur » (BM), un pays qui a conquis un statut de « rival systémique » pour la Commission européenne, mais, peut-être un « colosse aux pieds d’argile » (cf la situation de ses marchés financiers). De plus la croissance chinoise a souvent pu être critiquée à propos des conditions déplorables de travail ainsi qu’à propos du questionnement sur le respect des droits humanitaires. 

 

Définitions :  

Croissance = Ici on se concentrera croissance économique, c’est à dire l’augmentation du PIB sur le long terme.

Niveau de vie = PIB / habitant.

 

1. La croissance semble être le meilleur sentier pour retrouver un niveau de vie à la hauteur de celui des PED

 

A. Dans l’analyse de SOLOW, l’accumulation de capitaux explique le rattrapage des PED vers les PDEM


  • Dans la théorie pure du modèle

 

Basé sur l’hypothèse que les rendements marginaux du capital sont décroissant, les pays se dirigent inéluctablement vers un état stationnaire.
Les facteurs de productions étant moins productifs le revenu par tête se mettra à stagner pour les PDEM, laissant alors le temps aux PED de connaître à leur tour une accumulation du capital et donc rattraper les PDEM.


  •  A cela s’ajoute la croissance des échanges. 

 

La mondialisation productive favorise les mouvements de capitaux des pays à un rendement moins élevé vers ceux à un rendement supérieur. Autrement dit,  les capitaux étants plus rentables et plus productifs dans les PED, la croissance des échanges va traduire ces envois de capitaux qui favorise le rattrapage des PED vers les PDEM 

(il est possible ici de préciser que cela est dans un cadre particulier, celui de l’efficience des marchés financiers : cf Eugène Fama)

 

B. La croissance génère des externalités positives qui profitent aux PED

 

Les théoriciens de la croissance endogène l’affirment : la croissance a des effets de création d’externalités positives. Plus précisément chez Romer, on peut retrouver les externalités qui pourraient expliquer la convergence des économies. En effet l’accumulation du capital humain et la diffusion des connaissances pourrait expliquer ce pourquoi Gerschenkron disait que les pays ne rencontraient pas tous les mêmes obstacles avant d’atteindre une étape de développement avancée.

 Les efforts fournis par les PDEM serviront d’exemples aux PED pour avancer sur de bonnes traces. (par exemple le développement d’un vaccin contre le Covid par les PDEM : technologie qui a profitée aux PED)

 

Ce fut par exemple le cas des pays européens qui, dans les années 1950, ont stimulé la croissance avec des investissements massifs, en profitant de l’expérience des EU

 

C. Le PIB des PDEM est plus difficile à accroître que celui des PED

 

Les néo-schumpétérien Aghion et Howitt, mettaient en garde par rapport à ce type de pratiques, mais, ils montraient que l’effort de franchissement de frontière technologique qui doit être fait chez les PDEM pour garantir la poursuite de leur croissance est plus coûteux et plus long que les moyens qu’ont les PED pour croître. Les PED peuvent se contenter de copier les technologies à un moindre coût (pas besoin de dépenser dans la R&D) (par exemple sont entrés sur le marché du mobile plus tard mais copient la technologie pour produire à plus bas coût et favoriser leur croissance)

Lire plus : ESH HEC 2018 : Croissance-Développement (19.5/20)

2. Mais parfois cette croissance ne semble pas suffisante pour faire converger les pays et peut même creuser les divergences 

 

A. Les rendements marginaux du capital ne sont pas toujours décroissants

 

Comme montré par le paradoxe de Lucas, les capitaux ne se dirigent pas toujours vers les PED qui sont censés avoir la meilleure rentabilité marginale du capital. En effet, les investisseurs préfèrent souvent les économies développées, perçues comme plus sûres et offrant de meilleures infrastructures, des institutions stables et une main-d’œuvre qualifiée. Cela empêche les pays en développement de capter les flux d’investissements nécessaires pour booster leur croissance et, par conséquent, rattraper les pays plus avancés, maintenant ainsi, voire amplifiant, les écarts de niveaux de vie.

 

B. La croissance peut aussi produire des externalités négatives qui remettent en question la réalité de l’augmentation des niveaux de vie 


  • Une croissance qui repose sur l’inégalité augmente-elle le niveau de vie?

 

La croissance des PED, certes, mais quelle croissance ? Au cours des 50 dernières années Piketty montre que malgré les périodes de croissance mondiale, les inégalités ont continué d’augmenter. Ce à cause d’un rendement du capital tendancieusement plus élevé que la croissance potentielle. Ainsi les pays dont la croissance est approfondie par une baisse des taux d’imposition marginaux supérieurs font augmenter leurs inégalités. Alors finalement, en plus de remettre en question la réalité de cette augmentation du niveau de vie qui ne touche que les classes les plus hautes, ce type de croissance engendre une mauvaise répartition des revenus et crée des surabondances d’épargne qui peuvent déboucher sur une crise de la demande keynésienne.

Or ces inégalités peuvent bloquer le processus de croissance (ou l’enrayer), ce qui interdit la poursuite d’un rattrapage.


  •  Une croissance qui repose sur la dépendance augmente-elle le niveau de vie?

 

D’abord, la dépendance excessive aux exportations peut exposer un pays à la « maladie hollandaise« , où l’afflux de devises lié aux exportations de matières premières cause une appréciation de la monnaie, réduisant ainsi la compétitivité des autres secteurs.


  •  Une croissance polluante ou extractive augmente-elle le niveau de vie?

 

Enfin, le concept de « croissance appauvrissante » introduit par Jagdish Bhagwati montre que dans certains cas, une croissance économique rapide peut paradoxalement réduire le bien-être national. Cela se produit lorsque les gains générés par la croissance sont érodés par des coûts croissants, tels que l’augmentation des prix des matières premières ou une dégradation environnementale, ralentissant ainsi le processus de rattrapage des pays en développement par rapport aux économies avancées.

Lire plus : Rapport sur les inégalités mondiales 2022

C. Le cas Européenn prouve également les limites de ce rapport

 

Même au sein de l’Union européenne, qui devrait théoriquement favoriser la convergence grâce à un marché commun, des divergences persistent. Les effets d’agglomération, tels que décrits par Krugman, accentuent les écarts en concentrant la croissance dans certaines régions au détriment d’autres. Les pratiques non coopératives et les forces centrifuges, comme analysées par Cayla, contribuent également à cette fragmentation. Malgré les avantages indéniables du marché commun en termes de croissance globale, la fragmentation territoriale demeure un défi, comme l’a montré le CEPII dans son étude :  « L’UE, combien a-t-on gagné à la faire ? Combien perdrait-on à la défaire ? »

 

Conclusion

 

Finalement en ouverture on pourrait penser à redéfinir la mesure de niveau de vie, et proposer une considérations nouvelle à l’aide des «capabilités» proposées par Sen (Repenser l’inégalité). C’est-a-dire, la liberté pour un individu de choisir un mode de vie auquel il attribue de la valeur.



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Aymeric Verdeau-Borne