L’Afrique face à l’urgence sanitaire
Le continent africain, éprouvé par ses mauvaises performances en matière de développement, suscite les inquiétudes quant à sa gestion de la crise sanitaire internationale due à la pandémie de Covid-19. Toutefois, L’Afrique semble relativement épargnée par la pandémie jusqu’à présent. Deux thèses permettent d’expliquer cela : la première est que la pandémie ne fait que commencer en Afrique et que, par conséquent, elle connaitra les mêmes difficultés que les pays occidentaux mais avec les complications liées au manque d’infrastructures médicales et de lits de réanimation, la seconde est que, pour des raisons climatiques, géographiques et humaines, l’impact du Covid-19 sera moins virulent que les autres pays.
Les difficultés liées à la gestion du confinement sont symptomatiques de déficiences internes dans les États. A titre d’exemple, au Mali, pays ou 80% de l’économie relève du secteur informel, instaurer des mesures de confinement semble impossible : la majeure partie de la population vit au jour le jour pour pouvoir subvenir à ses besoins. La décision de ne pas fermer les lieux de culte, pourtant fortement souhaitable, n’a pas été prise pour des raisons électorales. La mosquée de Bamako continue de connaitre la même affluence que pendant les jours normaux.
Le jour du concours se fait de plus en plus proche, intéressons-nous, par conséquent, à la manière dont les États africains gèrent cette crise sanitaire. Quels sont les atouts et les faiblesses de l’Afrique ?
La jeunesse de la population africaine : un bouclier contre le Coronavirus
Il y a, sur le continent, une mémoire de la gestion administrative, sanitaire et politique des anciennes épidémies, en effet l’épidémie d’Ebola vient d’être contrôlée en République Démocratique du Congo. En Afrique Australe, le VIH a relativement été contenu. Sur le plan de la communication, les États ont pu combattre les fake news qui, en temps normal, se répondent plus vite encore que le virus et permettre ainsi d’instaurer une pédagogie nécessaire pour promouvoir les gestes et les comportements à adopter pour se protéger du Covid-19.
De plus, le magazine Le Point publiait le 06 Juin dernier un article intitulé « Covid-19 : la jeunesse, un atout pour l’Afrique ». En effet, on constate que le continent ne comptabilise que 2% des cas d’infection dans le monde et seulement 1% des décès. Même si l’incapacité du continent à produire suffisamment de tests ne permet pas de calculer avec précision la virulence de la maladie. Nous sommes en droit de constater que nous sommes loin des prévisions les plus alarmistes qui prédisaient à l’Afrique chaos et ravages face au Covid-19.
Les démographes émettent une thèse qui lierait la propagation de la maladie à l’âge de la population. Les données des premiers pays affectés montrant une létalité de la maladie concentrée chez les personnes âgées d’au moins 60 ans et une quasi-absence de mortalité chez les moins de 20 ans. Cette théorie explique entre autres pourquoi l’Afrique, avec son médian de 18,7 ans, son espérance de vie de 60 ans et seulement 4,8% de la population âgées de plus de 60 ans (à titre d’exemple, en France, presque 20% de la population est âgées de plus de 65 ans) est moins touchée que les autres foyers dans le monde. Ainsi à contagiosité égale à celle des pays occidentaux, les populations africaines, bien plus jeunes que les populations européennes, développent moins de cas sévères de Covid-19 et connaissent ainsi moins de décès.
L’instauration, très délicate, d’une politique de confinement
Sur un continent où la majorité de la population vit au jour le jour avec moins de 2 dollars par jour, instaurer une politique de confinement stricte reviendrait à condamner les plus démuni. Selon l’OIT (Organisation internationale du travail), 85% de la population africaine relève du secteur informel. A Nairobi, au Kenya, tout un quartier est bloqué, il s’agit d’Eastleigh, cœur de l’économie informelle du pays. En temps normal, des marchandises venues de Chine, de Turquie et d’Inde y sont vendues. Mais du fait de la pandémie, le trafic maritime a chuté de 30% et le quartier a été confiné. Les commerçants estiment ne pas avoir les moyens de faire face à cette crise. Une autre difficulté à laquelle l’Afrique fait face est la chute du cours des matières premières et la dépréciation des monnaies nationales. Les investisseurs sont plus réticents que jamais et le tourisme est à l’arrêt.
L’épidémie s’accélère en Afrique
« Il a fallu 98 jours pour atteindre la barre des 100 000 cas et 18 seulement pour franchir celle des 200 000 », affirmait Matshidiso Moeti, directrice régionale de l’OMS pour l’Afrique. De nouveaux foyers apparaissent notamment dans les milieux ruraux.
« Avant que nous ayons accès à un vaccin efficace, je crains que nous devions vivre avec une hausse constante dans la région, avec des foyers à gérer dans de nombreux pays, comme c’est le cas actuellement en Afrique du Sud, en Algérie et au Cameroun, qui nécessitent de très fortes mesures de santé publique », a-t-elle poursuivi. « Nous espérons sincèrement ne pas voir de systèmes de santé débordés », a-t-elle conclu.