« On vous dit : vous êtes l’homme le plus puissant du monde, pourquoi ne faites-vous pas quelque chose pour régler tout ça ? » disait Barack Obama lors de son mandat pour montrer que les États-Unis sont vus comme la (seule) nation capable d’arranger tous les maux du monde entier. C’est avant tout par la vision des autres pays qu’ils ont établi un rapport au monde unique dans l’histoire :« la nation indispensable »pour reprendre l’expression de Margareth Albright. Ce rapport a évolué à travers le temps régi par divers doctrines et idéologies, et est différent d’une région du monde, d’un pays à un autre. Il a longuement et continue d’osciller entre interventionnisme et isolationnisme, multilatéralisme et unilatéralisme, dans un ordre international défini par et pour eux depuis 1945. Cependant il semble bouleversé dans la période récente par les volontés de Pékin d’en définir un nouveau et par les États-Unis eux-mêmes (de Donald Trump) qui veulent s’en retirer alors que pourtant défini sur leur modèle.
Animés par une volonté de sauver le monde
Depuis leur indépendance en 1776, les États-Unis ont toujours été animés par la volonté d’imposer leurs valeurs. La « Destinée Manifeste »en est le premier exemple, énoncée par J.O Sullyvan visant à imposer à la barbarie mexicaine, puis amérindienne, les valeurs démocratiques américaines. Sauveurs de l’Europe en 1918 à la fin de la première guerre mondiale, ils changent un ordre séculaire : ce sont désormais les États-Unis qui interviennent en Europe pour y faire perpétuer l’ordre.Pourtant les États-Unis ont dans leur histoire, oscillé entre isolationnisme (majoritaire dans l’histoire étatsunienne) et interventionnisme. L’attaque du 7 décembre 1941 est un tournant dans cette ambivalence qui forgera les décisions américaines de la fin du XXe siècle. Franklin Dilano Roosevelt, le 8 décembre de la même année, souhaite « que son pays abandonne pour toujours l’idée de se vouloir à l’extérieur des affaires du monde ». Ce vœu est réalisé par la suite : les JI’s sauvent l’Europe du fascisme. La consécration des valeurs américaines est leur victoire sur l’URSS marquant la fin de la guerre froide, se devant d’imposer désormais leur mode de vie et leur valeur, passant de puissance tutélaire du monde libre à hyperpuissance incontestée.
Initiateurs de plusieurs alliances et organisations après 1945, ils imposent leur doctrine économique et militaire à travers le monde libre puis le monde entier après 1991. Le capitalisme l’a emporté.Ils humilient l’Europe en réglant la question yougoslave en 1995, tentent d’arranger le conflit Israelo Palestinien, et interviennent partout dans le monde, même sans l’aval de l’ONU, afin d’imposer les valeurs américaines considérées supérieures aux autres.
Remise en question et contestation
Par ses interventions justement, l’image des États-Unis s’est dégradée depuis le début du XXI siècle. Aujourd’hui leur ordre international est contesté. En particulier par la Chine qui veut imposer sa vision des choses : Xi Jinping rêve « d’une Chine maîtresse de l’ordre mondial d’ici à 2049 »date anniversaire du centenaire de la RPC. Nous pouvons évoquer deux points qui ont changé le rapport au monde des États-Unis. Le premier c’est d’avoir à tout prix voulu intégrer la Chine dans l’économie mondiale dès le début des années 1970 avec la diplomatie Ping-Pong visant à maintenir et réduire la puissance soviétique. Nixon évoque dans ses mémoires « ce truc qu’on fait avec les chinois pour baiser les russes, et peut-être en faire des amis futurs ». Intégrer la Chine, tout en se préoccupant de réduire l’influence russe, sans prendre en compte les avertissements d’Henry Kissinger qui dès 1972 avait prévenu « Sur le long terme, les chinois sont plus dangereux que les russes. Dans vingt ans si votre successeur est plus sage que vous, il fera le contraire de vous ». La deuxième erreur est d’avoir fait du terrorisme, après le 11 septembre, une plus grande menace que la Chine. Les États-Unis ont ainsi alloué des ressources initialement prévues pour contenir la Chine dans la guerre contre le terrorisme en Irak et en Afghanistan.Ces guerres qui sont devenues impopulaires autant au niveau mondial qu’aux États-Unis, et a instauré une défiance internationale vis-à-vis de cette hyperpuissance dès lors en déclin. Peu à peu les États-Unis se retirent de la scène internationale.
La « tornade » Donald Trump : un retour en arrière impossible ?
La présidence Trump marque un tournant dans le rapport au monde des États-Unis. À travers ces tweets lapidaires, il nuit à la crédibilité du pays sur la scène internationale et a fait perdre à la démocratie américaine son « exceptionnalisme ». Il veut se défaire de l’dore mondial établi plaçant quasiment sur le même plan alliés et adversaires d’hier : les logiques d’alliances lui paraissent dépassées et a surtout cherché à tirer profit de chaque traité. L’horizon est troublé pour Joe Biden récupérant le nouveau fardeau américain : revenir à l’isolationnisme. Pourtant déjà initié par Barack Obama voulant mettre fin aux guerres inutiles, plus largement continué par Donald Trump se retirant des accords de Paris et menaçant la stabilité de l’OTAN. Joe Biden pourra-t-il faire retrouver aux États-Unis leur image de sauveurs ? Étant donné l’état de la Syrie, de l’Irak et de la crise sanitaire aux États-Unis, le nouveau président semble bien mal embarqué…