Le Maccarthysme représente une période troublante de l’histoire des Etats-Unis, caractérisée par la suspicion généralisée et la répression idéologique. Prenant ses racines dans le contexte de la guerre froide, cette ère est souvent qualifiée de « chasse aux sorcières » en raison des méthodes implémentées au niveau fédéral pour traquer les communistes et leurs supposés sympathisants. Le Maccarthysme connaît son apogée entre 1950 et 1954, période marquée par l’ascension fulgurante et la chute précipitée du sénateur Joseph McCarthy, dont le nom est devenu synonyme de cette période sombre. L’expression est toutefois déclinée à la période d’après-guerre dans son ensemble pour désigner un temps plus large d’endiguement du communisme aux Etats-Unis.
La genèse du Maccarthysme : 1946-1950
Le Maccarthysme naît de la paranoïa anticommuniste qui se développe aux États-Unis à l’aube de la guerre froide. Dans divers endroits du globe, les communistes gagnent du terrain et menacent le modèle démocratique occidental. Alors que l’influence du communisme croît en Corée et au Vietnam, les Etats-Unis mettent en place la doctrine Truman et le plan Marshall pour tenter d’endiguer son expansion. Rapidement, la crainte que des sympathisants communistes puissent œuvrer au sein des institutions fédérales se répand dans la société américaine, et ce jusqu’aux plus hautes sphères de l’Etat.
Dès 1946, le président Harry Truman met en place une commission chargée d’enquêter sur la loyauté des fonctionnaires fédéraux afin d’identifier et écarter les éléments subversifs. La Commission des activités anti-américaines de la Chambre des représentants (HUAC) mène des investigations approfondies sur les supposés communistes, notamment dans le milieu du cinéma. La publication d’une liste noire entraînera notamment la mise à l’écart de nombreux artistes, exacerbant les tensions et la méfiance au sein de la société américaine. Il y règne alors un climat d’autocensure décrit comme suit par Hannah Arendt en 1949 : « Ici, l’atmosphère politique générale, surtout dans les universités et les collèges, est actuellement peu agréable. La chasse aux rouges est en marche et les intellectuels américains, surtout dans la mesure où ils ont un passé radical et sont devenus antistaliniens au fil des années, se mettent en quelque sorte à l’unisson du département d’État »
Malgré ses mesures, le gouvernement Truman est rapidement critiqué par les Républicains conservateurs pour sa prétendue complaisance envers les communistes. Le 9 février 1950, le sénateur Joseph McCarthy prononce un discours à Wheeling, en Virginie-Occidentale, dénonçant la présence de communistes au sein même du département d’État : « J’ai ici en main une liste de 205 noms… une liste de noms qui ont été divulgués au département d’État comme étant des membres du Parti communiste et qui néanmoins sont toujours en poste et façonnent toujours la politique du département d’État ». L’expression « Maccarthysme » est par la suite employée pour dénoncer, ou saluer, la chasse aux communistes qui va suivre.
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L’apogée du Maccarthysme : 1950-1954
Entre 1950 et 1954, Joseph McCarthy et ses partisans mettent en place une véritable traque des personnes qu’ils soupçonnent être affiliées au communisme. Celle-ci n’épargne personne, pas même les personnalités les plus influentes du pays. En 1951 McCarthy s’en prend violemment au général George Marshall, qui souhaite que la guerre en Corée ne s’étende pas à la Chine.
En 1952, à la suite de l’arrivée de Dwight Eisenhower à la Maison Blanche et du triomphe électoral des Républicains au Congrès, Joseph McCarthy obtient la présidence de la sous-commission d’enquête permanente du Sénat, souvent surnommée la « commission McCarthy », bien que ce dernier ne l’ait présidée que deux ans. La répression déjà en marche va alors s’intensifier au biais de méthodes contestées.
La commission emploie d’ambitieux moyens pour combattre le communisme à grande échelle. Des méthodes inquisitoires sont mises en place afin de ne laisser aucune chance à ceux qui sont perçus comme une menace pour la société américaine. Refuser de comparaître à une commission parlementaire est un délit, et plusieurs personnes seront incarcérées car elles considèrent que la commission viole la liberté d’expression. Obsédé par sa phobie du communisme, Joseph McCarthy outrepasse les règles de fonctionnement de la commission : il signe seul des assignations de témoin, déforme volontairement certains faits et obtient le droit d’engager ou de remercier seul les membres du staff tandis que le vote était traditionnellement privilégié.
La chute de Joseph McCarthy
En 1953, trois ans après le discours de Wheeling, des voix commencent à s’élever contre les dérives et abus de pouvoir de Joseph McCarthy. Albert Einstein dénonce le Maccarthysme, qu’il perçoit comme « un danger incomparablement plus grand pour la société américaine que ces quelques communistes qui peuvent être dans le pays ».
Mais ce sont les attaques virulentes du sénateur McCarthy à l’égard de l’armée américaine qui précipiteront sa chute. L’affaire, très médiatisée, révèle au grand jour les excès de la commission qu’il préside. Nombre de ses alliés se retournent contre lui et il perd instantanément le soutien des médias et de l’opinion publique. En 1954, il quitte la tête de la commission avant qu’une motion de censure déposée contre lui par le sénateur républicain Ralph Flanders ne mette fin à sa carrière politique.
Au total, 26 000 employés fédéraux firent l’objet d’une enquête entre 1947 et 1953 d’après Hérodote. Parmi eux, 7000 démissionnèrent, et 739 furent révoqués, au motif d’appartenance à des organisations submersives, de pratique homosexuelle ou de consommation de drogues.
Bien que le Maccarthysme ait pris fin avec la chute du sénateur, ses implications perdurent à l’heure où la société se radicalise. La stigmatisation des opinions contraires et l’utilisation de la peur à des fins politiques restent des préoccupations actuelles. Le Maccarthysme a laissé un souvenir amer au sein de la société américaine, rappelant les dangers de l’intolérance et de l’imposition d’une pensée unique. En revisitant cette période sombre, il est essentiel de reconnaître les leçons du passé et de s’engager à défendre les principes démocratiques fondamentaux.
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