La Serbie traverse une période de turbulences politiques depuis le début du mois de novembre 2024, avec des manifestations de grande ampleur qui secouent les grandes villes du pays. Ces événements sont principalement provoqués par un drame survenu à Novi Sad, où un toit de gare s’est effondré, tuant 14 personnes et en blessant plusieurs autres.
Ce tragique accident a mis en lumière une série de dysfonctionnements dans la gestion des infrastructures publiques et a jeté une lumière crue sur les relations tendues entre la Serbie et son gouvernement. Mais un élément supplémentaire ajoute de la complexité à cette crise : l’édifice en question, un projet de rénovation de la gare, a été réalisé par des entreprises chinoises, renforçant l’angoisse des citoyens vis-à-vis des investissements étrangers et des standards de qualité dans les projets d’infrastructure.
Un drame révélateur de dysfonctionnements institutionnels ?
Le 1er novembre 2024, un auvent en béton de la gare de Novi Sad s’effondre, causant la mort de 14 personnes et en blessant plusieurs autres. Cet accident tragique a immédiatement déclenché des manifestations à Novi Sad, puis dans d’autres villes du pays, en particulier à Belgrade. Les manifestants expriment leur colère contre le gouvernement, qu’ils accusent de négligence et de mauvaise gestion des infrastructures publiques. Les autorités serbes sont directement mises en cause pour leur incapacité à assurer la sécurité des citoyens. Le ministre de la Construction, ainsi que d’autres responsables gouvernementaux, sont particulièrement visés par les appels à la démission.
Ce qui a particulièrement choqué la population, c’est le fait que cet édifice ait été réalisé dans le cadre d’un contrat avec des entreprises chinoises, dans le cadre de l’initiative chinoise des “Nouvelles routes de la soie” (BRI, Belt and Road Initiative). La Chine a investi massivement dans des projets d’infrastructure en Serbie ces dernières années, notamment dans les secteurs des transports et de l’énergie. Si ces investissements ont été salués pour leur capacité à moderniser le pays, l’effondrement du toit de la gare soulève des interrogations sur la qualité des travaux réalisés et la supervision de ces projets par les autorités serbes.
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Serbie : Un contexte de frustration populaire
L’incident de Novi Sad, bien qu’il soit à l’origine du soulèvement populaire actuel, s’inscrit dans un climat général de mécontentement. Depuis plusieurs mois, la Serbie est confrontée à une hausse des tensions sociales en raison de la crise économique et des scandales de corruption qui secouent le gouvernement. Les manifestants ne réclament pas seulement la démission de certains ministres, mais appellent également à un changement de direction politique dans un pays où le sentiment d’injustice est de plus en plus partagé. Les protestations, qui ont rassemblé des milliers de personnes, sont également alimentées par une défiance croissante à l’égard des autorités, accusées d’être responsables d’une gestion opaque et de négligence systématique.
Les liens étroits entre la Serbie et la Chine, en particulier dans le secteur des infrastructures, sont un sujet sensible. D’un côté, ces investissements ont permis de moderniser le pays et de stimuler l’économie, mais de l’autre, ils soulèvent des questions sur les standards de qualité et l’absence de contrôle local sur les projets. L’édifice effondré, financé par la Chine, est un exemple tragique de cette situation : alors que les autorités serbes sont responsables de la supervision des projets, elles dépendent largement des entreprises chinoises pour leur exécution, ce qui complique la prise de responsabilité.
Les manifestations, une contestation politique plus large
Les manifestations en Serbie vont bien au-delà de la seule demande de justice pour les victimes de l’accident de Novi Sad. Elles reflètent une contestation plus large contre un système politique jugé corrompu et inefficace. Depuis l’arrivée de Milos Vucevic au pouvoir, les critiques se sont multipliées concernant la mauvaise gestion des fonds publics et l’accaparement des ressources par des élites proches du pouvoir. Les partis d’opposition ont rapidement saisi l’occasion pour dénoncer l’incompétence du gouvernement. Les manifestations ont pris une tournure politique, avec des appels à des réformes structurelles, et à une refonte de la gouvernance du pays.
Les manifestations en Serbie, qui risquent de se prolonger, pourraient avoir un impact sur les relations internationales du pays, en particulier avec la Chine, un partenaire stratégique important. La Chine est l’un des principaux investisseurs étrangers en Serbie, et ces projets sont présentés par le gouvernement comme essentiels au développement du pays. Cependant, l’effondrement du toit à Novi Sad a jeté un voile d’incertitude sur la gestion de ces projets. Alors que la Serbie poursuit son rapprochement avec l’Union européenne, un tel incident pourrait nuire à ses aspirations d’adhésion, notamment en raison de la mauvaise gestion perçue de ses infrastructures et de son manque de transparence.
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Les événements de Novi Sad ont révélé un système politique et économique défaillant, exposant les failles d’un gouvernement accusé de négligence et d’incompétence. Alors que les manifestations se multiplient, il devient de plus en plus évident que la Serbie se trouve à un tournant politique majeur. Les demandes de réformes et de transparence prennent de l’ampleur, et la question de la dépendance de la Serbie vis-à-vis des investissements chinois est désormais sur la table. Le gouvernement de Milos Vucevic se retrouve sous pression, et les mois à venir détermineront s’il sera capable de répondre aux attentes de la population.