La Banque de Turquie a procédé à sa première hausse des taux d’intérêt depuis deux ans. Elle a porté de 8,5 % à 15 % son taux pour tenter d’enrayer une inflation qui avoisine les 40 %. La nouvelle gouverneure de la Banque de Turquie, Hafize Gaye Erkan, a néanmoins déçu les marchés qui s’attendaient à une augmentation plus élevée.
Une première hausse de taux d’intérêt depuis deux ans
La Banque centrale turque abandonne pour la première fois depuis deux ans les mesures économiques non conventionnelles promues par Recep Tayyip Erdogan. En effet, la Turquie a opéré un revirement majeur de sa politique monétaire. La banque centrale a relevé jeudi 22 juin 2023 son taux directeur, en le doublant quasiment, jusqu’à 15 %. À contre-courant des théories économiques classiques, le chef de l’État, réélu fin mai, soutenait que les taux d’intérêt élevés favorisent l’inflation. Résultat, l‘inflation a explosé jusqu’à 85 % à l’automne dernier selon les chiffres officiels, à plus de 100 % sur un an, selon des économistes indépendants.
Quant aux réserves de change de la banque centrale turque, elles sont en terrain négatif pour la première fois depuis plus de 20 ans. En effet, 30 milliards de dollars ont été dépensés pour soutenir la monnaie nationale entre le début de l’année et le scrutin présidentiel, une mesure pour laquelle beaucoup d’économistes critiquent l’institution bancaire.
Lire plus : 4 auteurs indispensables sur l’inflation
L’augmentation de la Banque centrale turque est jugée insuffisante
Les investisseurs ont été déçus par un geste qu’ils attendaient plus agressif, ils prévoyaient entre 20 et 25 % et jusqu’à 40 % pour Goldman Sachs. Les conséquences se sont fait sentir directement puisque la monnaie turque a perdu 3 %. Ils redoutent que la Banque de Turquie échoue dans son objectif de ramener l’inflation vers les 5 %, sa cible de moyen terme. Le dollar a grimpé jusqu’à 24,31 livres et l’euro à 26,75 livres. La devise chute ainsi à des nouveaux plus bas. Elle perd plus de 23 % cette année par rapport aux deux principales devises.
Cependant, le communiqué souligne que « le resserrement monétaire sera encore renforcé autant que nécessaire, de manière opportune et progressive jusqu’à ce qu’une amélioration significative des perspectives d’inflation soit obtenue ».
Lire plus : Après « la monnaie hélicoptère », c’est au tour de « l’aspirateur monétaire » ?
La nouvelle gouverneure de la Banque de Turquie, Hafize Gaye Erkan, peut-elle renverser la situation ?
Depuis 2000, sept gouverneurs de la Banque de Turquie se sont succédé avant la nomination de Hafize Gaye Erkan. Ils ont été limogés sans ménagement quand ils ne donnaient pas satisfaction à Ankara. Longtemps opposé aux relèvements des taux, le président Erdogan ne tolérait aucun opposant à sa doctrine économique centrée sur un seul objectif, une croissance élevée.
La nouvelle gouverneure de la Banque de Turquie, promue il y’a quelques jours, va cependant devoir mener le tournant de la rigueur monétaire après des années de laxisme au profit de la croissance qui ont installé durablement l’inflation et la défiance à l’égard de la livre turque. Première femme à prendre les rênes de cette institution bancaire et partisane d’une politique plus conformiste, l’ancienne cadre de Wall Street, Hafize Gaye Erkan, est diplômée en ingénierie financière de Stanford. Elle a tout appris de la finance pendant la dizaine d’années qu’elle a passée chez Goldman Sachs, entre 2005 et 2014. Cette dernière a ensuite gravi les échelons jusqu’au sommet de la banque régionale américaine First Republic Bank.
Lire plus : Joseph Stiglitz prend la parole sur la hausse des taux d’intérêt
Pour conclure, la nouvelle gouverneure de la Banque de Turquie, Hafize Gaye Erkan, a pris la décision d’augmenter les taux directeurs, une première depuis deux ans. Le taux est désormais passé à 15%, soit une hausse de 6,5%, insuffisante cependant selon les marchés financiers qui avaient anticipé une hausse plus conséquente.