L’autoritarisme en Amérique Latine est quelque chose qui existe depuis longtemps, même si la situation n’est pas du tout la même selon les pays. Découvrez dans cet article les conséquences de l’autoritarisme sur le développement de l’Amérique Latine.
Contextualisation : pourquoi est-ce un sujet crucial ?
Mardi 16 mai 2023, le président de l’Équateur, Guillermo Lasso, a dissous le parlement. En effet, accusé de corruption par les députés par rapport à des contrats concernant le pétrole, il a dénoncé une grave crise politique et a cherché à éviter la destitution. Si cette décision politique peut sembler anodine, c’est en fait un exemple des démonstrations autoritaires de certains politiciens d’Amérique Latine : depuis leur indépendance, les États d’Amérique latine sont tiraillés entre autoritarisme et démocratie. En effet, le XXe siècle a été caractéristique de ces tensions : des caudillos (chefs de guerre à la tête d’une armée au temps de l’Espagne de la Reconquista) aux dictatures, en passant par les expériences populistes et les soulèvements révolutionnaires, il s’agit d’analyser les répercussions qu’ont eues ces régimes sur l’ensemble de la région.
La dissolution du parlement en Amérique Latine : des motivations remises en cause
Premièrement, la dissolution du Parlement n’est pas un fait d’exception en Amérique Latine. En à peine 6 mois, 2 pays ont dissous leur parlement : l’Équateur certes, mais aussi le Pérou. En effet, le 7 décembre 2022, le président péruvien Pedro Castillo a organisé une tentative d’auto-coup d’État qui ressemblait à celle que le dictateur Alberto Fujimori avait menée en 1992. Ce dernier avait annoncé l’instauration d’un « gouvernement d’urgence et de reconstruction nationale » dans le but de lutter contre le terrorisme et le trafic de drogue.
Toutefois, la tentative de Pedro Castillo n’a pas abouti de la même façon : il n’a pas été appuyé par l’armée, c’est pourquoi la dissolution du parlement n’a pas été effectuée. Ainsi, il a été forcé de démissionner et cela a provoqué un mécontentement général, non seulement de la part des Péruviens qui ont rejeté la nouvelle présidente Dina Boluarte, mais aussi des pays de la région avec qui le Pérou entretenait des relations diplomatiques.
D’où viennent ces pratiques ?
En fait, on remarque que de nombreux présidents sont toujours liés aux anciens dictateurs de leur pays et cela pose problème pour plusieurs raisons : premièrement, les enjeux politiques du XXIème siècle ne sont plus les mêmes qu’au XXème. En outre, l’autoritarisme provoque non seulement une fragmentation politique, mais aussi une polarisation politique : l’opinion publique tend à se diviser entre les deux extrêmes et les projets politiques sont difficiles à mettre en place.
Il est important de prendre en compte les relations diplomatiques qu’entretient la région avec le reste du monde
L’autoritarisme des présidents de l’Amérique Latine n’est pas le seul problème : il s’agit d’analyser le fait que la région est financièrement appuyée par des régimes autoritaires tels que la Chine et la Russie. En effet, la Chine est un partenaire commercial de l’Amérique latine qui a prêté plus de 137 milliards de dollars depuis 2005. En outre, Pékin a commencé des projets dans la région avec la création du « canal Oeste/ Este » au Nicaragua et d’une nouvelle route de la soif partant du Salvador.
De son côté Poutine a progressivement développé ses relations diplomatiques en Amérique Latine depuis la pandémie de la Covid-19 et la guerre en Ukraine. De fait, il s’est implanté dans la région non seulement de manière économique avec le Spoutnik (le vaccin russe), mais aussi de manière politique grâce au Nicaragua, à Cuba et au Venezuela avec qui il partage beaucoup de valeurs (radicalité politique et anti-libertaire par exemple). Le puissant trio de la région semble alors développer ses liens avec la Russie dans le but d’accroître son influence en Amérique Latine. Néanmoins, leurs pratiques autoritaires ne sont pas appréciées par les États-Unis : l’administration Biden avait décidé d’exclure ces trois pays du neuvième sommet des Amériques organisé le 10 juin 2022, puisque cette réunion était destinée aux pays démocratiques respectueux des droits de l’homme.
Notons un paradoxe important :
D’un côté, la volonté de la région d’avoir un système démocratique et, de l’autre côté, le fait d’entretenir des relations diplomatiques avec des régimes autoritaires. Par conséquent, la démocratie reste difficile à mettre en place dans ces conditions puisque la région est sous la domination des grandes puissances (russes et chinoises) et dépend d’elles pour de nombreux projets d’investissement industriel.
Et aujourd’hui, quelles sont les potentielles solutions ?
Actuellement, il est attendu de la région qu’elle profite du tournant qu’ont pris les récentes élections de 2022 (cf https://misterprepa.net/nouveau-cycle-politique-historique-en-amerique-latine-la-izquierda-de-la-concertacion/). En effet, avec l’élection de Gustavo Petro en Colombie et celle de Lula au Brésil, presque tous les pays de l’Amérique Latine ont des gouvernements de gauche. Dès lors, c’est l’occasion de développer les relations diplomatiques à l’intérieur de la région, dans le but de mettre en place des projets en commun, notamment pour accroître le développement industriel. Ce dernier reste aujourd’hui insuffisant en Amérique Latine et cela empêche les pays d’exploiter pleinement leurs matières premières, comme le lithium par exemple. En effet, la région est d’une richesse sans fond; elle pourrait devenir une véritable puissance. Cependant, les missions sont nombreuses et les enjeux nouveaux, particulièrement avec le changement climatique. De plus, il reste à savoir si l’union européenne pourrait devenir un véritable allié commercial, compte tenu des dernières réunions entre les dirigeants de l’Union européenne et leurs homologues d’Amérique latine et des Caraïbes.