L’analyse du sujet 2 de culture générale ECRICOME 2025 est tombée, découvrez le dès maintenant.
Nous rappelons que chaque année, les candidats peuvent choisir entre deux sujets lors de l’épreuve. Avec des coefficients élevés selon les écoles et la filière, il est essentiel de comprendre ce qui est attendu de vous.
Mister Prépa met à votre disposition un kit de réussite pour la culture général.
POUR VOIR LES SUJETS DE CULTURE GÉNÉRALE ECRICOME 2025
POUR VOIR L’ANALYSE DU SUJET 1 DE CULTURE GÉNÉRALE ECRICOME 2025
POUR VOIR NOS CONSEILS, LES SUJETS ET LES ANALYSES DU CONCOURS 2025
L’analyse du sujet 2 de Culture Générale ECRICOME 2025
Article rédigé par Sébastien Costa et Antoine Mas (étudiants à HEC Paris).
Cet article n’a pas vocation à être un corrigé exhaustif du sujet, simplement à proposer des pistes de réflexion.
Introduction
Tout d’abord, le sujet consistant en un seul mot, il faut essayer de lui trouver le plus de significations possibles, en pensant à la fois à des synonymes, des mots de la même famille, ou à des antonymes, et penser la notion le plus possible selon des perspectives variées : morales, politiques, métaphysiques, artistiques…
Il fallait ici être vigilant à la nature du mot qui est donné, “l’inhumain”, qui est un substantif, à distinguer de l’adjectif “inhumain”. Utilisé avec un article défini, le mot prend une tournure beaucoup plus forte.
- L’inhumain peut d’abord se définir selon deux degrés. L’inhumain comme ce qui est extérieur à l’humanité, qui constitue une altérité radicale (ex : l’animal), ou comme ce qui manque d’humanité (ex : un comportement cruel).
- Il est donc d’abord possible de définir l’inhumain selon une perspective politique et morale. Ainsi, sera hors-humanité l’ensemble des individus auquel on n’accorde par le statut d’être humain. Ne pas accorder ce statut, c’est par exemple rendre possible tout un ensemble de persécutions et de souffrances.
- Une définition davantage tournée vers la psychologie permettait d’envisager l’inhumain comme tout ce qui défie la raison, se situe dans le domaine de l’irrationnel.
- L’inhumain pouvait être rapproché du domaine du monstrueux au sens large, avec une double dimension de fascination et de répulsion. Des exemples tirés de l’histoire de l’art ou de la littérature pouvaient permettre d’illustrer judicieusement cet aspect.
Il était donc nécessaire de bien faire ressortir la polysémie de ce terme, qui ne se rattache pas seulement à la cruauté et à la persécution (sens le plus courant, et davantage rattaché à l’adjectif) mais permet plus largement de réfléchir à une définition de l’homme.
Proposition d’un plan possible
Dans le cas d’un sujet notion, il faut autant que possible essayer d’aller du plus “évident”, du plus “concret”, vers le plus abstrait.
Il peut également être possible de réaliser un plan en réfléchissant à la notion sous différents angles : moral, puis politique et enfin essayer d’en dégager les aspects plus métaphysiques. C’est ce que nous ferons ici pour notre plan.
Dans un premier temps, il semble essentiel de dégager les présupposés moraux du sujet et l’inscription de la notion d’inhumain dans le champ politique et social. Lorsque l’on parle de l’inhumain, c’est généralement à titre péjoratif, pour désigner une situation que nous jugeons intolérable, c’est-à-dire que ne correspond pas à nos valeurs et aux principes que nous tenons pour fondamentaux.
Kant pouvait être à ce moment convoqué dans la réflexion, en particulier les Fondements de la métaphysique des moeurs (1785), dans la deuxième formulation de l’impératif catégorique, au chapitre II, Kant écrit “Agis de telle sorte que tu traites l’humanité, aussi bien dans ta personne que dans la personne de tout autre, toujours en même temps comme une fin, et jamais simplement comme un moyen”.
Cette référence pouvait permettre de situer l’un des critères fondamentaux des grands textes humanistes, c’est-à-dire, d’instituer philosophiquement le principe de la dignité humaine. L’inhumain c’est donc dans un premier temps refuser ce principe de dignité.
Il était possible de poursuivre la réflexion en citant des exemples historiques de moments où l’homme traite son semblable comme un “moyen”. Le cas de la conquête des Amériques et de la mise en esclavage des populations autochtones pouvait se révéler judicieux s’il était par exemple associé à la controverse Valladolid. La question du statut des “Indiens” (“ont-ils une âme ? Sont-ils pleinement humains ?”) oppose alors Bartolomé de Las Casas, défenseur du droit des Indiens à affirmer leur humanité pleine et entière, à Juan Ginés de Sepulveda, qui justifie au contraire leur domination car considérés comme inférieurs (et donc relégués hors-humanité).
Dès lors la notion “d’humanité” se révèle comme un concept mouvant, sujet à de multiples évolutions dans l’histoire, au gré des conquêtes et des évolutions politiques et morales. La Renaissance, l’Humanisme et les Lumières pouvaient s’avérer des moments importants où des définitions universelles de l’homme apparaissent, fondées sur le respect de la personne humaine, l’égalité des peuples selon leur degré de “progrès”, et le droit à la liberté. Pour un exemple concret, on pouvait ici mobiliser l’ouvrage Des cannibales, dans lequel Montaigne se demande en quel sens les Tumpinambas, un peuple d’Amérique du Sud ayant vécu dans l’actuel Brésil, est “barbare”. Après une analyse plus précise du terme “barbare” et des pratiques de cette population, Montaigne en arrive à la conclusion que nous, européens, les surpassons de toute part en terme de barbarie. Les deux auteurs de cet article ne peuvent que recommander l’excellente vidéo de Gauthier Tumpich (le décodeur philosophique) à ce sujet.
Dans un second temps, approcher la question de l’inhumain, non plus à l’échelle de l’humanité toute entière, mais à l’échelle de l’homme pris individuellement, pouvait permettre d’approfondir la réflexion.
L’inhumain, comme nous l’avons vu avec les populations autochtones, est une catégorie souvent associé à l’inconnu, à ce qui suscite la méfiance, la peur.
De même, chez l’homme, l’inhumain c’est ce qui produit une répulsion, un dégoût, ou une angoisse. La figure du monstre pouvait dès lors être pertinente, car permettant d’opérer une transition avec la figure du “sauvage”, évoquée précédemment. Dans la littérature, des écrivains comme Edgar Allan Poe ou H.P Lovecraft pouvaient permettre d’évoquer la fascination des écrivains pour les figures monstrueuses. Des exemples tirés de la mythologie pouvaient également être pertinents.
Le monstrueux, c’est aussi ce qui, à l’échelle de l’homme, est source d’angoisse, constitue notre part voilée. Une référence à la notion d’inconscient, théorisée par Freud, pouvait permettre de donner à la notion “d’inhumain” une portée nouvelle. La notion de “ça” développée dans Le Moi et le Ça (1923), permettait d’évoquer la part pulsionnelle de l’homme, et la manière dont la civilisation, à travers le “Surmoi”, rend ce dernier propre à la vie en société. Le meutre, provoquée par les pulsions primaires de l’homme, constitue un retour de cette part “inhumaine” de l’homme dans le cadre social.
Enfin, en suivant un raisonnement progressif, et en allant vers le plus abstrait, il pouvait être possible de réfléchir à la dimension métaphysique du sujet. L’inhumain, n’est-ce pas ce qui nous est le plus étranger ? Ce qui se situe le plus hors de notre portée ? Et partant, ce qui nous permet le mieux de saisir les limites de notre propre humanité ?
Cette manière d’envisager l’inhumain pouvait nous amener à réfléchir à la place que prennent les religions dans l’histoire humaine. Pouvons-nous par exemple comprendre l’idée de divinité comme une manière de penser notre fascination pour l’éternité et la toute puissance ?
De nombreux exemples, empruntés à l’art d’inspiration religieuse, pouvait permettre d’illustrer la fascination de l’homme pour l’absolu. Le Jugement dernier, fresque réalisée par Michel-Ange pour la chapelle Sixtine entre 1508 et 1512, pouvait par exemple illustrer cet aspect.
En poursuivant notre réflexion, nous pouvions finalement évoquer la notion de “mal”, comme une manière de penser, à la frontière entre la morale et la métaphysique, la fascination de l’homme pour la cruauté et la mort. L’inhumain, loin d’être seulement ce qui nous répugne, est aussi ce qui est pour nous l’objet de la plus grande fascination, et partant, permet de dresser un portrait de l’homme fait de tendances contradictoires. Un écrivain-philosophe comme Georges Bataille, dans La littérature et le mal (1957) tente de réfléchir à la fascination des auteurs, à travers les siècles, pour ce qui se rapporte à l’inhumain sous la forme de la violence, du vice.
Conclusion
Dans un sujet notion, la conclusion est un moment important, qui doit permettre de rendre compte de la richesse du chemin parcouru, et de la diversité des aspects du sujet qui ont été envisagés. Ainsi, pensé sous un angle successivement moral, psychanalytique et finalement métaphysique, l’inhumain nous sera apparu non pas comme l’inverse de “l’humain” mais plutôt comme un aspect fondamental de sa nature, nécessairement contradictoire, faite de tendances opposées, comme dans la phrase de Pascal, “l’homme n’est ni ange ni bête” tirée des Pensées (1670).