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Pourquoi l’Union européenne a du mal à s’agrandir ?

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C’était il y a près de neuf ans déjà. Le premier Juillet 2013 (cela avait en fait été acté par Bruxelles dès décembre 2011), la Croatie devenait officiellement le vingt-huitième membre de l’UE (le vingt-septième vu que depuis le Brexit est passé par là). Depuis, c’est le calme plat au niveau des entrées et tout le monde se demande qui pourra bien être le prochain à intégrer la plus grande ACR du monde. Plusieurs options s’offrent aux courageux pronostiqueurs : Un Etat supplémentaire d’Europe de l’est ? Un Etat ayant jusque-là toujours voulu rester en dehors de ce projet comme la Norvège, la Suisse ou l’Islande ? La Turquie, véritable serpent de mer lorsque l’on parle d’adhésion à l’Union Européenne depuis déjà plus de deux décennies ? Les hypothèses sont multiples et méritent toutes d’être passées en revue. Pourtant aujourd’hui, seules les candidatures des pays des Balkans sont considérées sérieusement à court, voire moyen terme par Bruxelles. Pourquoi un tel dédain pour les autres Etats ?

 

Une option improbable : qu’un Etat ayant jusque-là refusé d’adhérer au projet européen revienne sur sa décision

Soyons clairs : si un jour un pays comme l’Islande, la Norvège ou le Liechtenstein voulait intégrer l’Union Européenne, il obtiendrait très rapidement ce qu’il demande. En effet, il s’agit d’Etats profondément amis historiquement de l’UE, déjà intégrés dans certains dispositifs de l’Union Européenne tels que l’espace Schengen. Ils remplissent de plus de nombreux critères économiques comme culturels. Bref, s’ils ne sont pas dans l’Union Européenne, c’est tout simplement qu’ils ne le souhaitent pas et qu’ils tirent plus de bénéfices à être en dehors qu’à l’intérieur et ne veulent pas déléguer une partie de leur souveraineté à une organisation supranationale.  Il est donc évident que cette position n’est pas prête de changer (aucun d’entre eux n’est à ce jour candidat à l’adhésion à l’UE selon les informations communiquées par l’organisation).

NB : le cas de la Suisse est relativement équivalent à celui des trois Etats précédemment mentionnés. Il faudrait toutefois, au préalable à toute adhésion, que certaines mesures notamment concernant le système bancaire soient effectuées. Mais là encore, cela ne semble aujourd’hui encore pas être à l’ordre du jour.

 

Intégrer un Etat d’Europe de l’Est, une possibilité rendue illusoire à cause de l’oppressante présence de la Russie

Beaucoup de pays d’Europe de l’Est sont souvent proposés comme de futures recrues potentielles pour l’Union Européenne. En effet, mis à part l’adhésion de la Croatie en 2013, les deux dernières grandes vagues d’adhésion en 2004 et 2007 ont concerné des pays de cette régions et qui étaient pour la plupart d’anciennes démocraties populaires de l’URSS. Toutefois, il faut rappeler que ces adhésions se sont faites dans une période où, après l’implosion du bloc soviétique au début des années 1990 (date officielle de la fin de la Guerre Froide), la Russie était très largement affaiblie. Maintenant qu’elle semble être revenue sur le devant de la scène internationale contemporaine et qu’elle a toujours des vues sinon géopolitiques au moins économiques sur les pays d’Europe de l’Est, continuer les adhésions dans cette région ressemble à tout sauf à une bonne idée.

Par deux fois l’UE a tenté depuis le début du XXIème siècle de se mêler des crises entre la Russie et ses pays voisins : en Géorgie en 2008 et en Ukraine en 2013 puis cette année. Les deux fois on ne peut vraiment pas dire que ça ait été un franc succès et par deux fois les limites de l’UE ont été montrées. Depuis, l’UE, même si elle n’hésite jamais à condamner le régime de Poutine, semble avoir abandonné ses rêves d’extension vers l’Est. Il pourra y avoir des traités d’amitié ou de coopération économique, mais rien de plus.

 

La Turquie, un mirage ayant donné de l’espoir avant une douche froide depuis quelques années

Au début des années 2000, il convient de rappeler que l’Union Européenne a fait les yeux doux à la Turquie (et que l’inverse était vrai bien évidemment). Pourtant, ce mariage un temps espéré a depuis pris du plomb dans l’aile. En effet, plusieurs points coinçaient, avant même la montée en puissance d’Erdogan qui a définitivement semble-t-il enterré le projet :

  • La reconnaissance du génocide arménien. C’était un des prérequis demandés par l’Union Européenne avant toute intégration, que le gouvernement turc reconnaisse sa responsabilité concernant les terribles évènements advenus entre 1915 et 1916. Devant le refus obstiné de celui-ci, l’intégration devenait illusoire
  • La situation à Chypre. Depuis 1974 et l’invasion par la Turquie, Chypre est scindée en deux entre la partie nord du pays sous contrôle turc et la partie basse qui seule reste sous contrôle chypriote. Dès lors, Chypre étant membre depuis 2004 de l’UE, il devient compliqué d’imaginer dans ces conditions une intégration de la Turquie à cette organisation.
  • Des craintes culturelles et économiques. En cas d’adhésion, la Turquie aurait été en 2025 le pays le plus peuplé de l’Union Européenne et donc celui le plus représenté dans les institutions de l’ensemble. De plus, le niveau de développement bien plus faible de la Turquie par rapport aux autres pays de l’UE aurait nécessité une solidarité accrue de la part des pays européens. Ajoutez à cela que la Turquie est un pays à majorité musulmane ce qui n’est pas le cas de l’UE, ce qui représente donc un obstacle culturel majeur, et vous obtiendrez trois nouveaux éléments réduisant grandement toutes les chances de la candidature turque.

 

Lire aussi: La dépendance de l’Union européenne au gaz russe

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Julien Vacherot
Étudiant à HEC Paris en Stratégie fiscale et juridique internationale et responsable géopolitique, j'ai pour but de vous faire partager ma passion et de vous aider dans cette matière et partout où c'est possible