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Que s’est-il vraiment passé avec les fonds de pension britannique ?

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Le 25 octobre 2022, la nouvelle de la future nomination de Rishi Sunak au poste de Premier ministre du Royaume-Uni a soulagé les investisseurs.  Les obligations d’Etat à deux ans ont chuté de 41 points de base pour atteindre 3,39 % car le profil du nouveau locataire du 10 Dowing Street est rassurant car attaché à l’orthodoxie budgétaire. L’objectif est simple, faire oublier le passage de Liz Truss.

 

Liz Truss, 44 jours pour mettre à mal la 6ème économie mondiale

Le mandat de Liz Truss, commence quelques jours avant la disparition de la reine Elizabeth II le 6 septembre dernier. Troisième femme à accéder au poste de Premier ministre du Royaume-Uni après Margaret Thatcher et Theresa May, Liz Truss représente la droite du parti conservateur britannique, ardente défenseure d’une immigration strictement contrôlée, d’une faible imposition et de la doctrine économique du libre-échange.

Le 23 septembre, le gouvernement Truss et notamment le ministre des Finances Kwasi Kwarteng dévoile le « mini-budget », un paquet de mesures prévoyant d’une part de dépenser jusqu’à 150 milliards de livres en vue de limiter les effets pour les consommateurs de la hausse des prix de l’énergie et d’autre part de baisser massivement les impôts avec une baisse des contributions de sécurité sociale, une baisse de l’impôt sur le revenu pour tous les contribuables et une baisse de l’impôt sur les sociétés. 

Censées relancer la croissance au Royaume-Uni, ces mesures ont souffert du scepticisme des marchés entrainant une explosion du rendement des Gilts (obligations d’Etat) et l’effondrement de livre face au billet vert. Le rendement des obligations à 30 ans a même dépassé 5 % en séance, le 28 septembre, pour la première fois depuis 20 ans. Deux jours avant, la livre s’était effondrée face au billet vert, touchant 1,034 dollar, son plus bas niveau historique.

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La mise en exergue des risques de fonds de pension britannique

Le jour même, pour casser cette spirale délétère, la Banque d’Angleterre a dû acheter en urgence de la dette britannique sur les marchés. Les opérations d’achat ont eu lieu quotidiennement, et ont porté sur des titres d’une maturité supérieure à 20 ans. Le montant maximum acquis chaque jour sera de 5 milliards de livres sterling soit, sur l’ensemble de la période, 65 milliards de livres. L’objectif est simple : ramener le calme sur le marché obligataire en déroute.

La crise a mis au jour la fragilité des fonds de pension britanniques. Pour s’assurer de disposer à tout moment des montants nécessaires au paiement des retraites, ils ont utilisé des stratégies reposant sur des produits dérivés, particulièrement vulnérables aux hausses brutales de taux. Les fonds ont alors été confrontés à des demandes de garanties toujours plus grandes. Pour dégager du cash, ils ont vendu en panique leurs obligations d’Etat, alimentant la hausse des rendements, et créant un cercle vicieux.

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Quel avenir pour le Royaume-Uni sous l’égide de Rishi Sunak ?

Les démissions de Kwasi Kwarteng et de Liz Truss fin octobre ont permis un début de retour au calme. Mais ni la livre, à 1,13 dollar lundi 24 octobre, ni les taux britanniques n’ont retrouvé leur niveau d’avant le mini-budget. Malgré une baisse de 30 points de base lundi, le taux à 10 ans évolue à 3,73 % contre 3,16 % mi-septembre.

Ce raté budgétaire historique va laisser des traces durables. Premièrement les agences de notation ont pris conscience du risque politique qui planait au Royaume-Uni et Moody’s a placé sous perspective négative le RU. Deuxièmement, le Trésor britannique va être contraint d’émettre plus d’obligations dès cette année. Enfin, la Banque d’Angleterre va quant à elle se concentrer sur son objectif prioritaire : faire reculer une inflation qui galope à 11% au mois de septembre.

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Pour conclure, cet épisode a montré plusieurs choses : le Royaume-Uni n’est plus une puissance dominante et la livre sterling n’est pas une monnaie de réserve que les investisseurs s’arrachent, les fonds de pension qui se veulent sûrs prennent des risques avec l’argent des cotisations pour chercher toujours plus de profit et la viabilité du Royaume-Uni sans l’UE est à questionner car leur politique macroéconomique isolée est fortement réduite.

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Damien Copitet
Je suis étudiant à SKEMA BS après deux années de classe préparatoire au lycée Gaston Berger (Lille). Nous nous retrouvons toutes les semaines pour l'actualité en bref