Régulièrement, le Conseil d’Analyse Économique (CAE) est chargé de publier des notes sur un thème, soutenues par des analyses menées par des économistes de divers courants de pensée. Ces notes fournissent des explications claires, objectives sur la vie économique, et sont bien souvent oubliées des étudiants. Pourtant, le programme d’ESH est fortement relié à l’actualité et les notes du CAE, lorsqu’elles sont bien exploitées, peuvent constituer un réel atout dans la construction d’un plan de dissertation. En juillet 2022, le CAE publie une note sur l’attitude des français face aux politiques climatiques. Un bilan de cette note s’impose alors, au vu de son actualité criante.
Dans Le climat après la fin du mois (2019) , Christian Gollier part d’un constat économique simple : l’environnement est un bien commun. Selon la définition de ce dernier, l’environnement est donc rival (la consommation du bien par un agent empêche la consommation du bien par un autre agent) et non excluable (on ne peut pas empêcher un agent de consommer ce bien). Les politiques climatiques, visant à protéger l’environnement, tendent à rendre excluable ce bien commun afin de minimiser les conséquences néfastes des agents via des mesures diverses (taxe pigou, principe du pollueur payeur, marché des quotas d’émissions).
Quelle est alors l’attitude des français face à ces politiques, selon la note du CAE publiée en juillet 2022 ?
De prime abord, les français semblent majoritairement enclins à adapter leurs habitudes de consommation en faveur du climat mais ils estiment que les politiques climatiques nuisent à leur confort et à leur pouvoir d’achat. La taxe carbone avec transferts par exemple, plus qu’un moyen efficace de lutte contre le réchauffement climatique, est perçue comme régressive. En effet, en termes de redistribution, les politiques climatiques avantageraient davantage les catégories aisées tandis que les classes moyennes et à bas revenus seraient pénalisées.
Quels sont alors les critères qui influent sur le soutien des français aux politiques climatiques ?
Le CAE met en lumière 3 critères décisifs faisant varier le soutien des français aux politiques climatiques. Premièrement, la perception de l’efficacité des politiques sur l’environnement. Plus les politiques sont jugées efficaces pour la lutte contre le réchauffement climatique, plus les français y sont favorables. Deuxièmement, l’effet redistributif de ces politiques explique le soutien des français aux politiques climatiques. Ainsi, une politique jugée néfaste pour le budget des ménages les plus pauvres subira une baisse du soutien et de l’approbation des français. Enfin, l’effet anticipé d’une politique sur le budget du ménage pèse à 12% dans le soutien apporté à cette politique. Par rapport aux autres pays européens, la France considère comme prioritaires l’efficacité des politiques climatiques et leurs effets sur les ménages à bas revenus plutôt que les effets des politiques sur leur propre budget. L’ensemble de ces critères influencent à hauteur de 50% le soutien des français aux politiques climatiques et conditionnent donc fortement leur opinion sur celles-ci.
Néanmoins, est-il possible de changer la perception des français sur les politiques climatiques ?
Si l’opinion des français et le soutien qui en découle semblent solidement ancrés, ils n’en demeurent pas moins révisables. En effet, la perception que les français ont des politiques climatiques tient principalement à l’efficacité qui leur est attribuée. Ainsi, plus les français sont renseignés sur les effets des politiques climatiques, plus leur soutien à celles-ci est important. L’accès à l’information est donc un critère essentiel dans l’explication et la variation du soutien apporté à ces politiques. Pour la taxe carbone avec transferts par exemple, le soutien à cette mesure ne devient majoritaire qu’après deux visionnages de vidéos pédagogiques offrant des explications objectives. La désapprobation de cette politique climatique se heurte donc au pouvoir éclairant de l’information.
Toutes les politiques climatiques sont-elles soumises au même jugement de la part des français ?
Une fois l’information et la transparence accessibles, comment expliquer les différences de soutien selon les politiques climatiques ? Contrairement aux idées reçues, les facteurs socio-démographiques expliquent seulement 14% du soutien des français aux politiques climatiques. Ce sont le financement et l’utilisation des recettes générées par une politique climatique qui modifient le soutien des français. Ainsi, ces derniers sont en faveur d’un financement via l’impôt sur les plus riches et de l’investissement dans des alternatives vertes grâce aux recettes générées. Toutefois, certains facteurs socio-démographiques ne sont pas à négliger dans l’explication du soutien aux politiques climatiques des français. L’âge demeure un critère essentiel dans cette explication, les jeunes étant plus enclins à soutenir ces politiques. Le positionnement politique est aussi fortement corrélé en France au soutien à ces mesures : les personnes se revendiquant plutôt à droite expriment plus de réticence face aux politiques climatiques que les personnes se revendiquant de gauche.
In fine, le soutien des français aux politiques climatiques tient à des facteurs bien précis et constitue une spécificité française.