L’actualité de cet été 2023 n’a pas manqué de le rappeler, l’Italie est touchée de plus en plus souvent par des épisodes de sécheresse intense. Cela a eu un impact significatif sur la quantité d’eau et nous interroge alors sur la question de l’optimisation de l’eau. Mais en Italie, ces réseaux hydrauliques sont défectueux. Nous revenons dans cet article sur cette problématique.
Une gestion de l’eau potable aux origines antiques
Bien que l’Italie n’existait pas à l’Antiquité, le peuple romain est pour autant considéré dans nos mentalités comme les ancêtres des italiens. Ainsi, les vestiges laissés par l’Impero Romano, tels que les célèbres aqueducs, traduisent, déjà à l’époque, une volonté de gérer l’eau potable.
Les Romains, très vite, comprirent l’importance de la gestion de l’eau courante. L’Impero Romano étant alors en pleine extension, une démographie en hausse, l’eau du Tevere (Tibre) n’était plus suffisante. Ils durent donc, comme le faisaient leurs voisins de Mésopotamie, construire des aqueducs pour récupérer de l’eau potable à plusieurs kilomètres. Mais également, ils innovèrent sur la récupération de l’eau de pluie. Par exemple, l’eau ruisselante entre les gradins des amphithéâtres romains se retrouvait stockée dans des grandes cuves pour un usage public.
Ainsi, à travers cette restructuration des villes romaines antiques, l’Impero Romano affirmait sa puissance et sa grandeur. Gérer l’eau est alors devenu à ce moment un enjeu politique. Aujourd’hui encore, ce savoir-faire romain se perçoit à travers les nombreuses fontaines de la ville : Fontana di Trevi, Fontana dei Quattro Fiumi, Fontana della Barcaccia…
Après la chute de l’Impero Romano, la dégradation des aqueducs, acheminant l’eau nécessaire à la salubrité des villes romaines, s’est accentuée. Il faudra attendre la volonté papale du XVème siècle avant de revoir une réseau hydraulique plus ou moins restauré.
Mais alors qu’en est-il aujourd’hui ? Est-ce que l’Italie a hérité de ses ancêtres cette gestion de l’eau potable ?
Panorama de la situation hydraulique italienne
Selon un rapport de l’Istituto Nazionale di statistica (Istat) réalisé en mars 2023, l’Italie est le 2ème pays de l’Union Européenne à prélever le plus d’eau douce potable. Et dans le même temps, elle se classe parmi les mauvais élèves en ce qui concerne sa gestion de l’eau. Alors, est-ce que l’Italie gaspille-t-elle l’eau potable ?
Nous constatons tout d’abord que le Nord de l’Italie, de par sa proximité avec de nombreuses sources d’eau potable, prélève plus d’eau que dans le Sud de la Penisola (Péninsule). En quelques chiffres, la région de la Vallée d’Aoste prélève l’équivalent de 438 litres d’eau par jour et par habitant, là où la Sicile est à 181 litres par jour et par habitant.
De plus, les réseaux hydrauliques italiens sont mal entretenus puisque, selon l’Istat, la moitié de l’eau entrante dans ces réseaux est perdue. Les plus grandes pertes en eau se trouvent au Sud. À titre d’exemple, Torino a eu une perte de 27% sur le total d’eau entrant dans leur réseau tandis que Palermo est à 49% sur la même période.
Ces pertes sont majoritairement dues à un mauvais entretien des canalisations. Mais, cet entretien nécessitant des fonds conséquents, certaines municipalités ne sont pas en capacité financière d’investir dans ces rénovations. En effet, il est important de noter qu’en Italie, l’entretien de ces réseaux hydrauliques est à la charge des municipalités. De ce fait, le Sud, plus pauvre que le Nord, présente plus de difficultés face à cette demande d’entretien régulier.
Des mesures politiques controversées
Les besoins en eau sont en hausse notamment au cours des périodes estivales, 1/4 des prélèvements d’eau italiens surviennent en été. Plus précisément, la demande en eau pour la production, par exemple, a augmenté de 4% par rapport à 2015. Ainsi, il n’est désormais plus rare de voir des municipalités mettre en place des rationnements d’eau au cours de l’été. En 2021, 15 communes du Nord ont opté pour ce type de mesure, soit 4 de plus qu’en 2020.
Mais c’est à propos du projet de loi « concurrence » défendu par le gouvernement italien que les contestations se font entendre. En considérant l’eau comme un bien commun, le principe voudrait que cette gestion ne rapporte aucun profit à des entreprises tierces. En 2011, un référendum d’initiative populaire avait rejeté une proposition similaire qui visait in fine la privatisation de l’eau. Un référendum que le président du Conseil de l’époque, Silvio Berlusconi n’avait pas pris en compte. Le slogan de ce mouvement qui refait aujourd’hui surface était :
- « Si scrive acqua e si legge democrazia ! » = « Cela s’écrit eau, mais cela se lit démocratie ! »
Ainsi, deux camps s’opposent sous cette question de la gestion de l’eau. L’un estime que la mise en concurrence d’entreprise sur ce marché est une opportunité pour les municipalités, c’est-à-dire une occasion pour mieux entretenir leur réseau hydraulique. L’autre considère que l’eau ne peut être privatisée et espère que le Piano Nazionale di Ripresa e Resilienza (Plan nationale de relance et de résilience), dont les fonds sont conférés par l’UE, permettra d’investir massivement dans l’entretien du réseau hydraulique.
À savoir…
Pour autant, l’Italie n’a rien à envier à sa voisine transalpine, la France, en ce qui concerne une chose : la réutilisation des eaux usées. L’Italie réutilise 8% de ses eaux grises pour sa production agricole, tandis que la France en utilise que 1%. C’est cependant, encore loin de l’Espagne qui est à 14% ou Israël à 80%.
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