Des protestations inhabituelles ont éclaté au sein du pays le plus d’Amérique Centrale : le Panama. Le pays, connu pour être un des plus grands paradis fiscaux du monde, fait face à une importante crise sociale. Cela se traduit par des manifestations, des embouteillages et des pénuries. Cela faisait pourtant des des années que le Panama était relativement stable. Revenons sur les raisons de ces protestations de masse dans un pays qui était jusqu’à lors un exemple de prospérité.
Un point sur la situation du pays
Comme dans beaucoup de pays, le coût de la vie a augmenté et c’est à cause de cela que les manifestations ont éclaté. La situation a commencé avec une grève des professeurs à laquelle s’est ajoutée ensuite les syndicats ou encore des groupes indigènes. Parmi les demandes du peuple, on retrouve la réduction des prix pour l’alimentation, l’énergie et les médicaments mais aussi l’augmentation du budget pour l’éducation et un meilleur combat contre la corruption.
Le président Laurentino Cortizo s’est exprimé sur le sujet : « je comprends l’insatisfaction de nombreux secteurs face à la situation dans laquelle nous sommes. Il s’agit d’effets de la pandémie et des conséquences du conflit en Ukraine. Le gouvernement a accepté le dialogue et a répondu avec plusieurs mesures. Par exemple, le prix de l’essence a été baissé et une aide pour l’alimentation a été annoncée. Mais cela ne semble pas suffisant car les manifestations se poursuivent.
Les protestations se font partout dans le pays et concerne toutes les catégories sociales ce qui n’avait jamais eu lieu avant au Panama. L’inflation touche tout le monde au sein du pays. Le Panama a, pour rappel, pour monnaie le dollar tout comme l’Equateur et le Salvador. Par le passé, le pays avait réussi à ne pas subir les effets des crises inflationnistes connues par les États-Unis. Mais désormais, avec le choc économique de la pandémie et le contexte mondial d’inflation avec le conflit en Ukraine, la situation au Panama est différente. L’indice des prix à la consommation a augmenté de près de 5% en un an. Par rapport à d’autres pays de la région, cela reste peu mais les habitants le ressentent dans leur vie de tous les jours.
D’autres chiffres alarmants pour le Panama
Le chômage frôle les 10% ce qui reste peu rapport au Costa Rica par exemple mais le travail informel est bien plus élevé au Panama (près de 50% du travail). Les inégalités au sein du pays expliquent également le mécontentement de la population. Le Panama a connu des décennies de forte croissance (6% et plus par an) grâce à son canal et au secteur des services. Grâce à cela, la pauvreté a beaucoup reculé depuis 1990 mais le coefficient de Gini (indicateur concernant les inégalités) classe le Panama parmi les pays les plus inégaux d’Amérique Latine et des Caraïbes.
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En 2015, un rapport officiel a révélé que les 10% des familles les plus riches du Panama avaient des revenus 37 fois plus élevés que les 10% des familles les plus pauvres. Pour cette raison, beaucoup d’habitants souhaitent un changement du modèle libéral instauré en 1990. Ce modèle date de l’invasion américaine en 1990 qui a donné suite au régime de Manuel Noriega. Avec ce modèle, la prospérité touche une infime partie de la population du pays alors que la majorité devient de plus en plus pauvre.
Une crise économique ET politique?
En plus de la situation économique, il semble que la démocratie panaméenne fasse l’objet de failles politiques. Pour certains politologues, le gouvernement exerce le pouvoir dans le dos des citoyens et dans son propre intérêt. La confiance du peuple envers les dirigeants a bien diminué et ce également à cause de la corruption. En effet, pour beaucoup d’habitants, la corruption est vue comme étant intrinsèque à la politique nationale. Il s’agit en réalité d’une vision héritée du régime dd Manuel Noriega. Cependant, plus de 56% des panaméens continent de penser que la corruption a augmenté cette année.
De plus, le pays manque de transparence en termes d’imposition et est connu pour être laxiste au niveau des régulations bancaires et fiscales. C’est pour cela que le Panama est considéré comme un paradis fiscal. Un des récentes scandales a été celui des Panama Papers où, après des enquêtes, il a été révélé que les pouvoirs politiques et de nombreux millionnaires ont utilisé le pays pour cacher leurs fortunes et échapper à des milliards de dollars d’impôts. Il y a également eu des scandales de corruption durant la pandémie en plus des autres cas reliés à Odebrecht. Ce dernier étant le principal scandale de corruption en Amérique Latine.
Conclusion
C’est dans ce contexte que le Panama est passé de pays stable à pays au bord de l’explosion sociale. La possibilité d’un dialogue entre les manifestants et le gouvernement reste ouverte mais ne semblerait pas être la solution à tous les problèmes du pays.