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VISION 2030 : un réel tournant pour l’Arabie Saoudite ?

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En 2016, Mohamed Ben Salmane, prince héritier de l’Arabie Saoudite, a proposé un plan prometteur de modernisation et de développement. Ce plan, nommé Vision 2030, a pour objectif principal de changer le modèle économique du pays vers un nouveau modèle de développement plus libéral afin de préparer l’après pétrole.

Pour rappel, l’Arabie Saoudite est une monarchie absolue dirigée par la dynastie Saoud. L’actuel souverain de la monarchie est Salmane al Saoud qui est âgé de 86 ans. Mais en réalité, le pays est dirigé par le prince héritier : Mohamed Ben Salmane (MBS). En rupture avec la gérontocratie traditionnelle, le prince héritier a pour ambition de dynamiser le pays et d’en améliorer son image d’où l’ambitieux projet de Vision 2030.

 

Une lutte contre le piège de la rente ou le «mal hollandais» (Dutch Disease)

Mohamed Ben Salmane a bien compris que les ressources qui permettent à l’Arabie Saoudite de créer leurs principaux revenus ne sont pas renouvelables et qu’il va donc falloir transformer sur le long terme leur système économique. En effet, le pays est considérablement dépendant de la rente pétrolière puisque ses recettes représentent environ 40% du PIB du pays.

Pour permettre de construire cette transition, MBS compte investir dans de nouveaux secteurs de développement. D’abord, le secteur privé devrait continuer de gagner de la place dans l’économie saoudienne et devrait passer de 45% à 60% d’ici 2030. De plus, assez paradoxalement avec le modèle économique actuel du pays, le royaume ambitionne de faire partie des leaders mondiaux dans le domaine des énergies renouvelables. Rappelons qu’actuellement, l’Arabie Saoudite fait partie du top 10 mondial des pays qui émettent le plus de gaz à effets de serre.

Afin de changer la donne actuelle et d’améliorer son image auprès du reste du monde, Vision 2030 est fondé autour de 3 projets phares portés par le fond souverain saoudien appelé le Public Investment Fund (PIF) : la ville futuriste The Line Neom, un parc d’attraction d’exception nommé Qiddiya ainsi que le projet touristique Red Sea prévoyant de transformer de nombreuses îles au large de la côte ouest en destination touristique haut de gamme.

Etudions par exemple le projet de la cité futuriste : The Line. Ce projet, estimé à 500 milliards de dollars, se veut être comme une révolution pour notre civilisation et comme une réponse innovante à la crise climatique. Selon le prince héritier et la communication autour de ce projet, la ville pourra accueillir environ 9 millions de personnes au sein d’une infrastructure longue de 170 kilomètres, haute de 500 mètres et large de 200 mètres. En créant une ville linéaire, l’Arabie Saoudite compte révolutionner notre manière de vivre en y supprimant les voitures, en créant un microclimat au sein d’une ville climatisée naturellement avec de l’eau et de l’énergie entièrement renouvelable. Ce projet fou semble tout droit sortir d’un film de science-fiction et de nombreuses personnes ne croient pas en la réalité du projet d’autant plus que MBS a annoncé récemment que la ville devrait être construite d’ici 2030.

 

Vision 2030 : une révolution sociétale ?

Pour réussir à mettre en place l’ensemble des réformes du projet, MBS est convaincu que le système sociétal actuel du pays est un frein à celles-ci. Pour rappel, l’Arabie Saoudite est socialement très conservateur. Par exemple, l’homosexualité y est réprimée, les femmes n’obtiennent le droit de conduire qu’en 2017, la pratique de la torture et de la flagellation est courante et certaines exécutions capitales ont encore lieux au sabre ou par crucifiement.

Le mode de gouvernance et la bureaucratie sont, pour MBS, un frein à ses projets. Par ailleurs, pour nuire à ses principaux rivaux, il a fait de la lutte contre la corruption une de ses priorités. Ce volet social de la réforme vise plus particulièrement les jeunes et les femmes sur le ton d’un discours hypernationaliste. Ainsi, il compte inclure plus activement les femmes dans la vie active. Par exemple, de nombreuses femmes ont été récemment promues à de hauts postes comme par exemple Sarah Al Suhaimi à la tête de la Bourse de Riyad. Dans l’urgence de leur situation, MBS prône un état fort, privilégié par une gestion verticale et plus autoritaire du pouvoir.

 

Les entraves à la réforme

Cependant, les réformes ambitieuses prônées par Mohammed Ben Salmane rencontrent plusieurs difficultés. Premièrement, la situation conflictuelle dans laquelle se trouve l’Arabie Saoudite au sein d’une zone déstabilisée peut être vue comme une entrave au capital sympathie du pays et donc freiner les Investissements directs étrangers, indispensables selon le prince héritier à la création de projets tels que The Line. Parmi ces conflits se retrouvent ceux en première ligne avec l’Iran ou encore le Qatar.

Enfin, la volonté d’accroitre la privatisation est freinée par l’absence d’un cadre juridique facilitant la réforme ainsi que par une bureaucratie entravante. Par exemple, la Saoudi Aramco a longtemps repoussée sa privatisation.

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Aloïs Fallard