Au sein du complexe économique mondial, les termes de l’échange inégaux se révèlent être un concept puissant qui met en lumière les disparités profondes dans les relations commerciales internationales. Notre exploration des termes de l’échange inégaux commence avec les travaux de Raúl Prebisch, un économiste argentin dont les idées ont profondément influencé notre compréhension des inégalités économiques entre les nations. Prebisch a avancé l’idée que les économies en développement se retrouvent souvent piégées dans une situation où elles exportent principalement des matières premières à faible valeur ajoutée, tout en important des biens manufacturés à forte valeur ajoutée.
Les termes de l’échange inégaux c’est quoi ?
Les termes de l’échange inégaux se réfèrent à la situation où les pays en développement exportent principalement des produits à faible valeur ajoutée, tels que les matières premières, tandis qu’ils importent des biens à forte valeur ajoutée, comme les produits manufacturés. Cette disparité crée un déséquilibre dans la valeur relative des biens échangés, désavantageant les pays exportateurs de matières premières.
“Les économies en développement sont prises au piège de l’exportation de matières premières à faible valeur ajoutée” Raúl Prebisch
Avec un peu de maths ça donne ça 😉
On considère un modèle économique simple avec deux pays et deux biens : un pays exportateur de matières premières (Pays A) et un pays exportateur de biens manufacturés (Pays B). Supposons que le bien exporté par le Pays A soit une matière première, et le bien exporté par le Pays B soit un produit manufacturé.
On note :
Pays A :
- Quantité exportée de matière première (Qa)
- Prix de la matière première (Pa)
- Valeur totale des exportations de Pays A = Qa x Pa
Pays B :
- Quantité exportée de biens manufacturés (Qb)
- Prix des biens manufacturés (Pb)
- Valeur totale des exportations de Pays B = Qb x Pb
Si les termes de l’échange sont égaux, alors la valeur totale des exportations de Pays A devrait être égale à la valeur totale des exportations de Pays B. Cela s’exprime mathématiquement comme suit :
Qa x Pa = Qb x Pb
Cependant, les termes de l’échange deviennent inégaux lorsque les prix des produits manufacturés (Pb) sont plus élevés que les prix des matières premières (Pa). Dans ce cas, Pays A reçoit moins de valeur en échange de ses matières premières par rapport aux biens manufacturés qu’il importe de Pays B.
Mathématiquement, si Pb > Pa, alors :
Qa x Pa < Qb x Pb
Cela signifie que Pays A doit exporter davantage de matières premières pour obtenir la même quantité de biens manufacturés qu’il importe de Pays B. Les termes de l’échange sont inégaux en faveur de Pays B.
Lire plus : La Courbe de Kuznets : Analyse de l’évolution des inégalités économiques
Le paradoxe entre l’implantation de Coca en Afrique et son impact négatif sur l’économie et le bien-être du continent
Un exemple précis de cette situation se trouve en Afrique, où Coca-Cola réalise d’énormes bénéfices grâce à la vente de ses boissons gazeuses. Les matières premières nécessaires à la production de ces boissons, telles que le sucre et l’eau, proviennent souvent localement à un coût relativement faible. En revanche, les boissons finies sont vendues à un prix bien plus élevé, créant ainsi une asymétrie dans la répartition de la valeur ajoutée. L’entreprise américaine a une présence mondiale et vend ses produits dans de nombreux pays en développement. Le chiffre clé ici est le suivant : en 2019, Coca-Cola a généré un chiffre d’affaires de 37,27 milliards de dollars, dont une part substantielle provient de ces pays.
« Boire du Coca n’est pas un besoin, mais avoir accès à de l’eau potable l’est. » Cette déclaration, attribuée à de nombreux défenseurs de la justice économique, reflète la critique selon laquelle les entreprises comme Coca-Cola, en offrant des produits qui ne sont pas essentiels aux besoins fondamentaux des pays en développement, contribuent à maintenir les termes de l’échange inégaux. Au lieu d’investir dans des solutions pour les besoins essentiels comme l’eau potable, ces entreprises promeuvent des biens de consommation souvent superflus.
En Afrique, Coca-Cola vend ses boissons gazeuses tout en faisant face à des problèmes d’accès limité à l’eau potable dans de nombreuses régions. Dans certains cas, Coca-Cola a même été critiquée pour puiser de l’eau locale, aggravant les problèmes d’approvisionnement en eau dans les communautés locales. Cela souligne la manière dont les entreprises multinationales, en proposant des produits qui ne répondent pas aux besoins prioritaires des pays en développement, perpétuent les inégalités économiques et alimentent le cercle vicieux des termes de l’échange inégaux.
Lire plus : Les théories socio-économiques du développement
Sujets en lien
ESSEC 2015 : Croissance et inégalités
HEC 2022 : L’ouverture commerciale est-elle toujours facteur de prospérité économique et sociale ?