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L’influence géopolitique des ONG

Sommaire

Les Organisations Non Gouvernementales (ONG) constituent des acteurs non étatiques essentiels sur la scène internationale, agissant sans but lucratif et indépendamment des États. Depuis le XIXe siècle, elles répondent aux problèmes sociétaux émergents, comme la pauvreté et les conflits armés, avec des pionniers tels que le Comité international de la Croix-Rouge (CICR) fondé en 1863 par Henry Dunant. Ce rôle humanitaire s’amplifie après la Seconde Guerre mondiale, lorsque l’ONU leur accorde un statut consultatif à travers l’ECOSOC, leur permettant de s’impliquer sur des questions internationales d’envergure.

À partir des années 1960, les crises politiques (guerre froide, décolonisation) incitent à la création d’ONG focalisées sur les droits de l’homme, le développement et la lutte contre la faim, comme Amnesty International ou Action contre la faim. La guerre du Biafra marque un tournant dans l’aide humanitaire avec la fondation de Médecins Sans Frontières en 1971, qui s’engage dans le concept d’ingérence humanitaire. Le contexte de la mondialisation dans les années 1980-1990 multiplie le nombre d’ONG et diversifie leurs missions, de l’aide d’urgence à l’environnement, avec l’apparition de grandes ONG comme Greenpeace et WWF, influençant les organisations internationales et formant le socle d’une « société civile mondiale ». Cette phase d’expansion est renforcée par les Nouvelles Technologies de l’Information et de la Communication (NTIC), qui offrent aux ONG de nouveaux moyens d’action et de sensibilisation.

 

Les ONG comme forces influentes et partenaires internationaux

En se professionnalisant et se multinationalisant, les ONG prennent une influence croissante dans les relations internationales. À titre d’exemple, Médecins sans Frontières est présent dans 24 pays, emploie plus de 38 000 personnes, et des organisations comme Oxfam disposent de budgets conséquents, souvent composés de fonds privés et publics. Loin de leur rôle consultatif originel, les ONG adoptent des stratégies de plaidoyer, de lobbying, et de sensibilisation pour exercer une pression sur les États et dénoncer des injustices mondiales. Leur capacité d’expertise leur permet de soutenir les traités internationaux, tels que l’interdiction des mines antipersonnel en 1997 et le traité sur l’interdiction des armes nucléaires en 2017, initiatives souvent récompensées par le prix Nobel de la paix.

Les ONG collaborent également étroitement avec les organisations internationales, dont elles sont devenues des partenaires essentiels. Leur présence sur le terrain complète les actions des organisations comme le Programme alimentaire mondial (PAM) et le Haut Commissariat pour les Réfugiés (HCR), contribuant aussi aux Objectifs du Millénaire pour le développement (OMD). Certaines institutions, comme l’Union européenne et la Banque mondiale, délèguent une partie de leurs projets d’aide aux ONG, qui bénéficient ainsi d’une légitimité renforcée. Dans le cadre des Nations Unies, les ONG prennent part aux instances de décision, contribuant à élaborer des normes et jouant un rôle moteur dans les débats mondiaux relatifs au développement durable et aux droits de l’homme.

 

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Limites et critiques des ONG dans leur rôle international

Si les ONG influentes, principalement issues des pays du Nord, exercent une réelle pression sur les États démocratiques, leur influence reste partielle et limitée. Leur pouvoir dépend de la volonté des États de les intégrer dans leurs politiques, ce qui pose problème dans certains pays réfractaires, comme les États-Unis ou la France, et encore davantage dans les régimes autoritaires (Chine, Russie). Dans ces contextes, les ONG font face à des restrictions ou des accusations d’ingérence, et leur impact est restreint par rapport aux firmes économiques, contre lesquelles elles peuvent mobiliser un pouvoir de boycott citoyen plus direct. D’autre part, elles sont également concurrencées par des ONG contrôlées par l’État (les GONGOs), qui restreignent leur influence réelle.

Les ONG n’échappent pas non plus aux critiques internes, comme celle du « Charity Business » dénoncée par l’ancienne présidente d’Action contre la faim, Sylvie Brunel, pointant la montée d’une bureaucratie coûteuse et l’esprit de compétition qui pousse certaines organisations à privilégier des missions rentables ou médiatisées. Cette logique commerciale va parfois à l’encontre des valeurs d’engagement. Des scandales ont aussi entaché la réputation de grandes ONG, comme l’affaire de l’Arche de Zoé et les abus révélés au sein d’Oxfam, qui ont soulevé des accusations de néocolonialisme et d’exploitation dans le milieu humanitaire. Ces incidents soulignent le paradoxe de certaines ONG, incarnant des valeurs éthiques tout en reproduisant des inégalités et des dérives sur le terrain.

 

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Conclusion

Ainsi, les ONG représentent une conscience morale dans l’ordre mondial, mais leurs pouvoirs restent tributaires de leur relation avec les États et les organisations internationales. Si elles symbolisent une mondialisation où les problématiques dépassent la compétence des États, leur capacité d’action s’accroît lorsqu’elles coopèrent avec ces derniers, même si leur rôle d’opposant et de contre-pouvoir aux politiques gouvernementales reste fondamental pour certaines questions internationales. Les ONG continuent donc de rappeler aux États leurs responsabilités face aux enjeux humanitaires, environnementaux, et éthiques de notre époque.

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Image de Augustin Hirtzberger
Augustin Hirtzberger
Etudiant en première année à Audencia après deux années de classe préparatoire au lycée Hoche.