Entre défi d’approvisionnement, tensions internationales et enjeux écologiques, les terres rares sont des métaux fascinants dont il est crucial de comprendre les implications géopolitiques !
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Que sont les terres rares ?
Les terres rares désignent un ensemble de 17 métaux jouant un rôle fondamental dans de nombreux secteurs stratégiques :
- La transition énergétique (moteurs électriques, aimants pour éoliennes ou turbines, batteries, centrales nucléaires)
- Le pétrole (raffinage du pétrole, additifs pour diesel)
- La métallurgie (alliages)
- La chimie (tubes à rayons cathodiques, écrans à cristaux liquides, engrais)
L’importance de ces secteurs aujourd’hui rend donc ces métaux particulièrement stratégiques !
La production des terres rares, un monopole chinois
Jusqu’en 1980, tout le monde produisait des terres rares à son échelle et pour ses besoins personnels. En effet, les terres rares ne sont pas si rares et sont en réalité présentes partout dans le monde !
Les États-Unis étaient donc, par leur taille et par la force de leur industrie, les premiers producteurs avec le gisement californien de Moutain Pass qui représentait 1/3 de la production de terres rares dans le monde en 1984.
Mais en 1986, la Chine commence l’extraction de terres rares et souhaite en faire un atout économique de premier plan : « Le Moyen-Orient a le pétrole, la Chine a des terres rares » Deng Xiaoping.
La Chine compte 3 atouts principaux :
- De grands gisements (dans le Guangdong, le Jiangxi, et celui de Bayan Obo en Mongolie intérieure, le plus grand au monde)
- Des aides massives de l’État
- Des ouvriers peu payés et exposés à des risques sanitaires immenses (très haut taux de cancer parmi eux)
Face à ces 3 atouts chinois et au vu de l’utilité modérée des terres rares dans les années 1990, les pays occidentaux ont un à un fermé leurs mines de terres rares, préférant les importer de Chine.
La Chine est alors devenue le premier producteur d’une trentaine de minerais indispensables et dépasse souvent les 50% de la production mondiale pour ces minerais.
Les terres rares, des armes économiques et géopolitiques
À partir de 2010, la Chine a fait de ses terres rares des armes économiques et géopolitiques en restreignant ses exportations (officiellement pour des raisons écologiques).
Des armes économiques
Le secteur automobile chinois est largement avantagé par le monopole de la Chine. Les marques de voitures électriques chinoises comme BYD ou SAIC bénéficient de moteurs électriques et de batteries à moindre coût là où leurs concurrents étrangers paient souvent de fortes taxes à l’importation. Cela explique le rattrapage de BYD sur Tesla par exemple.
Le secteur éolien chinois est aussi dynamisé par ce monopole puisqu’il faut plus de 2 tonnes de terres rares pour fabriquer une éolienne de 3MW. Cela explique l’existence de géants de l’éolien en Chine comme Goldwind qui représente 10% de la production d’éolienne dans le monde.
Des armes géopolitiques
La Chine n’hésite pas à utiliser son monopole sur les terres rares lors de différends géopolitiques. En 2011, elle a par exemple décrété un embargo sur l’exportation de terres rares vers le Japon à la suite du litige au niveau des îles Senkaku.
Cet embargo a eu des conséquences désastreuses sur des entreprises comme Toyota qui en consommait 10 000 tonnes par an et les importait à 90% de Chine.
L’impact géopolitique des terres rares se voit aussi dans le domaine militaire puisqu’un rapport de 2010 intitulé « Les terres rares dans la supply chain de la défense » a montré que des terres rares importées de Chine étaient présentes dans de nombreuses armes stratégiques de l’US army comme dans les F-16, les F-35 ou encore des missiles, créant ainsi une dépendance insupportable.
Vers une diversification de l’approvisionnement en terres rares
Conscient du risque de laisser un secteur aussi stratégique entre les mains de la Chine, les autres pays du monde ont développé plusieurs stratégies.
- Les États-Unis ont relancé le gisement de Moutain Pass (représente environ 15% de la production mondiale aujourd’hui).
- Des gisements émergent partout dans le monde (l’Australie avec Mount Weld, en Russie, en Thaïlande, en Inde, en Afrique du Sud, en Corée du Nord, en Suède). Cela permet une diversification dans les approvisionnements. Le Japon a par exemple vu sa dépendance passer de 90 à 58% à la Chine en investissant en Inde et au Kazakhstan.
- Le recyclage des terres rares se développe (inauguration en 2012 d’une usine de recyclage à La Rochelle pour recycler les poudres luminophores des ampoules).
Toutefois, le monopole chinois s’annonce durable puisque l’empire du milieu contrôle toujours 70% de la production mondiale, dont certains métaux déterminants comme le dysprosium et le néodyme.
La Chine assure également son monopole en investissant massivement en Afrique pour contrôler les gisements de terres rares à l’étranger.
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