Le 20 novembre prochain, la 22ème Coupe du Monde de l’histoire débutera dans une atmosphère très ambivalente. Entre festivités et énormes polémiques, un mondial n’aura jamais fait autant débats. Entre problématiques environnementales, menaces de boycott et absence de droits humains, l’organisation de coupe du monde aura été vivement critiquée.
Une CDM pour développer le soft power qatari
Le 2 décembre 2010, se déroulait un énorme coup de théâtre lors de l’attribution de la Coupe du Monde. Le Qatar, à la surprise générale, obtenait l’organisation du Mondial de football 2022. Pourtant beaucoup d’autres pays candidats possédaient beaucoup plus d’infrastructures sportives comme les États-Unis. Le constat était simple : le Qatar n’avait aucune infrastructure en état d’accueillir un grand évènement sportif. Aujourd’hui, le Qatar a 8 stades qui vont accueillir les différents matchs dont 6 neufs ultra modernes et 2 rénovés. Ce petit État au large du Golfe Persique ne se trompait pas à ce moment sur le message envoyé. À travers sa manne pétrolière, le Qatar voulait développer un soft power culturel et attirer les investisseurs pour développer le pays. La politique qatarie reposait uniquement sur l’extraction d’hydrocarbures (47% du PIB en 2019).
Aujourd’hui, le Qatar connaît un fort développement de ses infrastructures (hôtels, gratte-ciel, aéroport international ouvert en 2014), ce qui lui a permis de connaître une augmentation significative du nombre de touristes dans les années 2010 (plus de 2 millions de touristes en 2019). Sa compagnie nationale QatarAirways atteint même des records de chiffre d’affaires (1,54 milliard de $ en 2021-2022), montrant une position centrale dans le système aérien. Cette position que la compagnie va conserver avec le mondial en novembre-décembre 2022. En effet, QatarAirways va affréter pas moins de 150 vols par jour durant l’évènement. Face à des modèles plus diversifiés et plus puissants au Moyen Orient comme l’Arabie Saoudite (projet de ville futuriste Neom) ou les Émirats Arabes Unis, la concurrence est rude pour peser sur la péninsule. De plus, ce mondial est l’illustration du poids croissant du monde arabe dans les relations internationales. Ainsi, l’organisation du mondial représente une opportunité de faire émerger la puissance qatarie.
De nombreux points noirs qui prédisent la pire CDM de l’histoire ?
La Coupe du Monde est l’évènement planétaire par excellence pour bien figurer aux yeux des autres nations. Néanmoins, ce n’est pas réellement le cas du Qatar. Le nombre incalculable de polémiques créent un malaise vis-à-vis de l’évènement final. La construction des stades a représenté un lourd tribut pour des dizaines de milliers de travailleurs immigrés débarquant au Qatar. Des conditions de travail ubuesques (chaleur, conditions sanitaires, logement des ouvriers en périphérie des villes) ont vu périr 6500 personnes sur les chantiers qataris. De nombreuses ONG comme Human Rights Watch ont dénoncé « une Coupe du Monde de la honte » avec notamment le droit des homosexuels et LGBT qui est opprimé.
La destruction de l’environnement attise aussi vivement les critiques. Le Qatar a construit pour l’occasion des stades climatisés pour éviter de mettre en péril la santé des joueurs et des spectateurs. Une aberration environnementale, alors que la prise de conscience écologique n’a jamais été aussi présente. Le trafic aérien va être plus que jamais dense au-dessus du Qatar avec des vols affrétés uniquement pour voir des matchs. Ainsi, le Qatar est le pays qui rejette le plus de CO2 dans l’atmosphère par habitant.
Pour finir, les règles de la part d’un pays hôte n’ont jamais été aussi strictes (gestes de politesses particuliers, règles vestimentaires, produits interdits sur le territoire, règle liée aux contacts physiques, interdiction…) pour ne pas porter atteinte aux valeurs du Qatar. L’organisation de ce Mondial met ainsi en exergue des problèmes éthiques comme les droits de l’homme supprimés. Ces difficultés sont aussi environnementales, ce qui vient entacher le message politique qatari.
CDM 2022 : un malaise croissant en Occident
De nombreuses hypothèses ont été émises quant aux sanctions que l’Occident allait prendre vis-à-vis de cette organisation. L’attribution du Mondial en 2010 avait fait grande polémique, notamment avec des accusations de corruption, entre la FIFA présidé par Sepp Blatter à l’époque et le Qatar, qui n’ont pas pu être prouvées. Néanmoins, certains pays, comme la Norvège, avaient déclaré boycotter l’évènement en cas de qualification. Or, aucune des nations des 32 nations qualifiées n’a suivi cette idée.
Aujourd’hui, le malaise n’a jamais été aussi élevé dans l’opinion publique. Beaucoup de sondages énoncent qu’une grande part de la population serait favorable à un retrait de leur sélection (48% des Allemands par exemple). Le boycott n’a jamais eu les effets escomptés, même si c’est pour manifester en faveur des droits humains. Le boycott américain aux Jeux Olympiques de Moscou en 1980 peut faire office d’exemple.
Des pays comme la France annonce l’absence d’écrans géants pour retransmettre l’évènement au sein de ses grandes villes. L’Occident ne sait guère comment agir pour obtenir des résultats concrets tant les enjeux financiers prennent le pas. De nombreuses interrogations portent sur la réussite et la portée de l’événement. Cette Coupe du Monde à double tranchant marquera de façon indéniable les esprits, que ce soit positivement ou négativement.