La courbe de Kuznets, développée par l’économiste Simon Kuznets (1901-1985) en 1955, est une notion fondamentale dans l’étude des inégalités économiques. Récompensé du prix Nobel d’économie en 1971 pour ses recherches sur ce sujet, Kuznets a établi un lien intéressant entre le niveau de richesse d’un pays, mesuré par le PIB par habitant, et le degré d’inégalité économique. Dans cet article, nous nous pencherons sur cette fameuse courbe, explorant ses différentes phases et examinant les raisons de son impact sur l’économie des nations. Nous aborderons également les critiques émises à l’égard de cette théorie et l’importance de rechercher des solutions pour réduire les inégalités dans un monde en perpétuelle évolution.
La courbe et son analyse
La courbe de Kuznets est représentée par un graphique en forme de U inversé. L’axe des ordonnées représente le niveau d’inégalités, généralement mesuré par le coefficient de Gini, tandis que l’axe des abscisses représente le temps ou le revenu par habitant.
Selon la théorie de Kuznets, le développement économique passe par deux stades.
1 – Au premier stade, le pays investit massivement dans le capital infrastructurel et le capital naturel, ce qui constitue le principal mécanisme de croissance. À ce stade, les inégalités stimulent la croissance en favorisant ceux qui épargnent et investissent le plus, phénomène connu sous le nom de « malédiction de Kuznets ». En effet, ce sont eux qui s’accaparent les richesses nouvellement créées. Ainsi, le revenu total augmente mais les inégalités croissent aussi.
2 – Au deuxième stade de développement, les disparités de répartition des revenus s’amenuisent, car les nations en plein essor économique connaissent une transition spontanée des travailleurs du secteur secondaire vers le secteur tertiaire, qui présente un potentiel supérieur en matière de création de valeur ajoutée. Parallèlement, l’introduction d’un système social par l’État dynamise la consommation chez les actifs à revenus modestes en facilitant une redistribution étatique via les “revenus de transfert”
Critique de la courbe de Kuznets
Cependant, la courbe de Kuznets a été critiquée par d’autres économistes, dont Thomas Piketty en 2005. En 2005, Piketty remet en question la causalité entre croissance économique et disparités de revenu. Cette relation pourrait laisser penser que l’accroissement des inégalités au fil du temps est un phénomène endogène naturel qui se résorbe spontanément. Cependant, Piketty soutient, à partir de données provenant à la fois de la France et des États-Unis, que la réduction des inégalités n’est pas automatiquement liée à la croissance du PIB par habitant. Si l’on se penche sur l’histoire économique, les baisses du niveau d’égalité ont ont principalement été influencée par des événements inattendus touchant le capital (comme par exemple les guerres ou l’inflation et les catastrophes) ainsi que par le système fiscal (notamment l’impôt sur le revenu).
Conclusion
La courbe de Kuznets joue un rôle essentiel dans la compréhension de l’évolution des inégalités économiques, en prenant en compte le temps et le niveau de développement d’un pays. Néanmoins, cette théorie n’échappe pas aux critiques, et la question de la réduction des inégalités demeure un défi complexe qui exige une analyse approfondie des mécanismes économiques et sociaux. La pleine appréhension de cette courbe doit ainsi orienter les politiques publiques vers des solutions efficaces et équilibrées, afin de promouvoir un développement économique inclusif et durable, tout en luttant contre les disparités sociales.
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