L’ État finance directement l’innovation à travers la recherche publique (7,7 milliards annuels en 2013) mais aussi par l’octroi de prêts aux industries innovantes (c’est notamment le rôle de la BPI dont les capitaux vont être alimentés par la privatisation d’ADP, de la FDJ et d’Engie).
Selon Max Weber, « l’État moderne est un groupement de domination de caractère institutionnel qui a cherché (avec succès) à monopoliser, dans les limites d’un territoire, la violence physique». Le rôle de l’État en économie est contesté. Pour les mercantilistes tels que Colbert, il a un rôle prépondérant de stimulation de l’économie alors que pour les Classiques tels que A. Smith et Ricardo il doit se limiter aux fonctions régaliennes (armée, police et justice) pour permettre la croissance.
Aujourd’hui, l’État est extrêmement important en France pour financer les investissements en R&D et développer des innovations. Selon Schumpeter, les innovations peuvent être de différentes formes :
- produit
- organisation
- marché
- matière première
- procédé
Pour permettre à des innovations de voir le jour, l’État peut jouer sur la marge extensive (nombre de firmes qui exportent) ou sur la marge intensive (quantité exportée par les firmes existantes).
Marge Intensive de l’innovation
Parlons d’abord des politiques horizontales c’est à dire celles qui s’appliquent à tous les secteurs. Depuis 1983 en France le Crédit Impôt Recherche est déduit à hauteur de 30 % des dépenses de recherche inférieures ou égales à 100 millions d’euros et à 5 % au-delà. Le coût total est de 6-7 milliards. Le problème est que 35% de ce financement va aux Grandes entreprises (GE) qui feraient cette R&D de toute manière.
Cependant, le financement de la recherche publique a des effets positifs sur la R&D privée grâce à l’augmentation et l’intensification des interactions entre les centres de recherche publics et les entreprises locales à travers des partenariats de recherche. A Nice, par exemple, le site de Sophia Antipolis fait partie des technopôles français les plus reconnus à l’international avec 1300 entreprises qui y travaillent et 30 000 emplois .
Ensuite, la puissance publique peut décider de cibler certains secteurs ou certaines entreprises en particulier à travers des mesures de soutien direct (subventions, droits de douane, participation publique au capital d’une entreprise, etc.) . C’est une politique dite verticale. Un exemple précis est le programme fédéral ARPA (Advanced Research Project Agency) crée en 1972 aux États-Unis avec pour objectif de financer le développement de technologies à haut risque ayant à la fois une utilité civile et militaire. Il fut très efficace avec le développement du GPS, d’Internet, du laser, ou encore de l’ordinateur personnel). Encore en place aujourd’hui, il est doté d’un budget de 2,970 milliards de dollars américains soit l’équivalent du PIB français.
Marge extensive de l’innovation
Les politiques publiques peuvent stimuler l’innovation en menant des politiques d’immigration et notamment en assurant une immigration intelligente. L’exemple du visa à points au Canada en est une bonne illustration. L’étude de Arkolakis, Lee et Peters (2020) intitulée « European immigrants and the United States’ Rise to the Technological Frontier » montre que si les États-Unis avaient complètement fermé leurs frontières en 1880, son PIB aurait été 30% plus faible en 1920. De plus, les immigrés représentent 10% de la population américaine et pourtant ils représentent 16% des inventeurs et 23% des brevets déposés.
Pourquoi l’immigration stimule l’innovation ?
- éducation (population diplômée du supérieur)
- motivation intrinsèque (l’immigration comme un filtre qui laisse passer ceux qui prennent des risques)
- compétition (les personnes qualifiées qui immigrent permettent de concurrencer les gens en place.)
- multiplication des sources d’inspiration (les idées observées dans leur pays d’origine)
Néanmoins, le risque est d’assister à une fuite des cerveaux ou brain drain aux dépens des PED. Idéalement, les immigrés qualifiés devraient donc pouvoir retourner dans leur pays d’origine ce qui permettrait un meilleur transfert de connaissance et de technologies, facilitant le rattrapage des économies moins développées.
Enfin, l’État peut mener des politiques d’éducation. Une étude sociologique des inventeurs « Taping into Talent: Coupling Education and Innovation Policies for Economic Growth » de Akcigit, Pearce et Prato (2020) montre que la probabilité d’inventer est plus forte plus les parents ont des revenus élevés notamment car ils ont une meilleure éducation. L’éducation détermine le pool d’individus qui pourraient être inventeurs. Tu comprends alors mieux pourquoi l’État français est prêt à débourser 15700 euros par an par étudiant en CPGE (chiffre Statistica, 2020)