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Sextus Empiricus : nous ne savons rien

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Sextus Empiricus : nous ne savons rien

Sextus Empiricus, né au IIᵉ siècle après J.C. à Mytilène (probablement) et mort au IIIᵉ siècle après J.C., est un philosophe grec. Il fait partie du courant sceptique et est médecin de l’école de médecine antique dite empirique. Sextus Empiricus expose la philosophie sceptique héritée de Pyrrhon.

 

Contre les dogmatiques

Sextus Empiricus s’oppose à tous les dogmatismes (stoïcien, épicurien, aristotélicien), mais aussi au scepticisme de la Nouvelle Académie. Il ne les considère pas comme un réel scepticisme. Alors que les premiers affirment avoir trouvé la vérité et que les seconds affirment qu’elle est insaisissable, le sceptique pyrrhonien est celui qui continue la recherche, au lieu de s’arrêter à l’une de ces conclusions.

Il veut atteindre la suspension du jugement (épochè) et la tranquillité de l’âme (ataraxie), en acceptant les phénomènes comme ils se présentent à lui. En effet, il ne s’agit pas de rejeter les phénomènes, mais l’interprétation que nous donnons d’eux et le jugement ainsi porté sur la réalité.

Cela lui permet de proposer un conventionnalisme dont s’inspireront Montaigne et Pascal.

Il condamne le dogmatisme négatif. Ce dogmatisme affirme l’impossibilité de connaître et d’affirmer. Cela est contradictoire, car c’est une affirmation. Au contraire, Sextus Empiricus n’affirme rien, si ce n’est les impressions, qui n’impliquent rien sur l’existence d’un objet réel. Postuler l’existence d’un objet réel ou la vérité d’un système métaphysique, n’est pas nécessaire pour agir. En effet, les impressions suffisent.

 

Lire plus : le scepticisme de David Hume

Les Esquisses pyrrhoniennes

L’intérêt de cette œuvre est d’être la plus détaillée concernant le scepticisme (aussi appelé pyrrhonisme). Sextus Empiricus serait le dernier héritier de la pensée pyrrhonienne.

La tranquillité

Pour Sextus Empiricus, le but de toute philosophie est d’atteindre la tranquillité. C’est pour cela que les philosophes recherchent la vérité. Ils sont perturbés par le fonctionnement du monde qui leur semble chaotique et ils désirent le décrypter. Néanmoins, ces derniers se précipitent dans des croyances faciles, prétextant y parvenir à l’aide de la raison. Or, c’est par une analyse logique poussée que nous découvrons que rien ne justifie ces croyances.  Pour Sextus, la tranquillité résulte de la suspension du jugement.

L’objectif de Sextus est plus la recherche du bonheur qu’une perspective épistémologique.

 

La vérité

Les dogmatiques font reposer leurs prétendues découvertes sur des démonstrations, qui reposent elles-mêmes sur un critère de vérité. Or, pour décider si une démonstration est concluante, il faut que ses parties aient été reconnues vraies. Mais qu’est-ce qui nous permet de reconnaître cette vérité ?

Ça ne peut être une démonstration, puisqu’elle aurait besoin à son tour d’être démontrée. Sextus soulève ici le problème majeur des démonstrations. En effet, elles reposent toujours sur des postulats qu’il faut admettre passivement.

Sextus conclut qu’il n’y a pas de critère de vérité. Rien ne peut nous permettre d’affirmer qu’une chose est vraie, pas plus que d’affirmer qu’elle est fausse. Il y aura toujours dans ces affirmations une part de décision arbitraire.

Selon les dires de Sextus : “Que ces gens (les philosophes) se mettent d’abord d’accord sur une position commune“. Pour Sextus, il n’est pas question de choisir l’une plutôt que l’autre, sous prétexte d’affinités. Si des arguments aussi forts ne parviennent pas à convaincre des personnes aussi éminentes, c’est qu’ils ne touchent pas la vérité.

Pour Sextus, quand nous cherchons la vérité sur un sujet précis :

  • soit nous faisons une découverte.
  • soit nous nions que nous puissions trouver la vérité, elle est insaisissable.
  • soit nous continuons la recherche.

 

Ceci est valable pour tout sujet de recherche. Nous comptons trois types importants de philosophie :

  • la philosophie dogmatique (qui prétend faire des découvertes, comme l’aristotélisme, l’épicurisme, le stoïcisme).
  • la philosophie académique d’Arcésilas (qui nie que nous puissions faire des découvertes).
  • le scepticisme (qui continue de chercher).

 

Il ne s’agit ni d’être indifférent à l’égard de la vérité, ni de considérer que tout se vaut. Le scepticisme consiste à objecter à ceux qui se prétendent possesseurs de la vérité que leurs arguments ne sont pas à la hauteur de leurs prétentions. Les sceptiques estiment que la vérité est trop importante pour être laissée à ceux qui affirment la détenir.

 

Lire plus : comment accéder à la vérité ? (Henri Bergson)

 

Alors, comment vivre ?

Mais ne pas pouvoir se décider sur la véracité des choses obscures ne signifie pas ne plus vivre. Pour vivre, le sceptique se fie aux choses apparentes, sans assurer qu’elles correspondent à une quelconque vérité. Ainsi, il se conformera aux coutumes locales pour mener sa vie. Il suivra ses affects pour répondre à ses besoins naturels, apprendra un métier pour se nourrir. Le tout est de faire ceci sans jamais croire toucher quelque chose qui dépasse les apparences. Il s’agit de s’adapter au moment présent, sans chercher à parvenir à une vérité en soi.

Le sceptique peut très bien entreprendre des recherches sur le fonctionnement du monde, mais à condition de ne pas prétendre parvenir à une vérité. Ces recherches ne doivent avoir pour but que de produire des arguments permettant de contrer ceux qui sont utilisés par des dogmatiques. Le scepticisme n’exclut pas l’étude. Bien au contraire, c’est en connaissant bien les théories des différents dogmatiques que le sceptique pourra opposer les unes aux autres.

La tranquillité du sceptique n’est pas une insensibilité. Le sceptique ressent la douleur, la faim, et tous les autres maux sensibles. Seulement, il ne se préoccupe pas sur le fait qu’ils soient des biens ou des maux. Ils lui sont moins pénibles qu’à ceux qui craignent la douleur.

Les dix modes

Sextus Empiricus présente dix modes pour démontrer l’impossibilité d’atteindre une vérité certaine. Il souhaite démontrer l’importance de la suspension du jugement.

  1. La diversité des animaux : du fait de la différence entre les animaux, les mêmes choses ne produisent pas les mêmes impressions d’une espèce à l’autre.
  2. Les différences entre les humains : du fait de la diversité des corps et âmes parmi les humains, les dogmatiques sont en désaccord sur divers sujets, notamment sur ce qu’il convient de faire et ne pas faire.
  3. La différence des sens : chaque sens n’offre qu’une perception particulière d’une chose. Il ne permet pas de juger la nature de cette chose.
  4. Les circonstances : le jugement d’un homme dépend de l’état dans lequel il se trouve.
  5. L’effet des distances, des lieux et des positions : la perception d’un objet change en fonction de la distance de son observateur, ainsi que du lieu et de la position dans lesquels il se trouve.
  6. Les mélanges : aucun objet réel extérieur n’est perçu sous le sens par lui-même, de sorte que l’impression produite est un mélange de l’objet et de ce avec quoi il est observé.
  7. La quantité et la constitution : une chose profitable devient nuisible du fait que nous l’employons en quantité démesurée. Alors qu’une chose dommageable en quantité excessive peut être bénigne en quantité raisonnable.
  8. La relation : toute chose est relative par rapport à celui qui juge. Elle apparaît relativement à tel animal, tel humain, tel sens, selon telles circonstances. Elle est également relative à ce qui est observé conjointement, elle apparaît relativement à tel mélange, telle constitution, telle quantité et à telle position.
  9. La fréquence ou la rareté des rencontres : selon le caractère continu ou rare de son occurrence, une chose paraît tantôt remarquable ou de valeur, tantôt l’inverse.
  10. L’opposition entre les lois, les coutumes, les mœurs, les croyances religieuses et les doctrines philosophiques : il n’est pas possible de dire ce qu’est l’objet réel selon sa nature. Il est seulement possible de dire ce qu’il paraît être selon tel mode de vie, telle loi, telle coutume.

 

Lire plus : Socrate : comment bien vivre ?

 

Je vous donne ci-dessous plusieurs sources que je consultais en prépa pour me cultiver en philosophie :

Les Bons Profs (chaîne YouTube)

Digischool (site Internet / chaîne YouTube)

Cyrus North (chaîne YouTube)

Le Précepteur (chaîne YouTube)

 

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Stéphane Westermann
Après deux années de prépa ECG au Lycée Georges de la Tour à Metz, j'ai pu intégrer Neoma avec pour objectif d'assister les étudiants dans l'excellence de leur Culture Générale et de leur langue allemande !