Les inégalités entre les plus riches et les plus pauvres n’ont cessé d’augmenter ces trente dernières années.
Le coefficient de Gini – un indicateur qui montre dans quelles mesures sont répartis au sein d’une société les revenus – a augmenté dans les pays de l’OCDE. Le revenu des 10% de la population les plus riches est aujourd’hui 9,5 fois plus élevé que celui des 10% les plus pauvres.
Une inégalité est avantage ou un désavantage procuré à un individu du fait de sa détention ou non d’une ressource socialement valorisée, selon L. MAURIN dans son ouvrage Comprendre les inégalités (2018).
L’inégalité peut être économique, sociale, de genre etc. Il existe différents outils pour mesurer les inégalités comme le rapport interdécile – le rapport D1/D9 – les différences de revenu en fonctions des positions sociales. On peut notamment mesurer les inégalités grâce à des indices ou des coefficients, tels que l’IDHI ou encore le coefficient Gini.
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I. La réduction des inégalités se justifie au regard de ses effets positifs sur la croissance économique même si certains le contestent.
A. Les effets néfastes des inégalités sur la croissance économique justifient leur réduction.
- On observe un changement de perception radical concernant la relation entre croissance et inégalité. En effet, le FMI reconnait qu’il y a urgence à réduire les inégalités pour stimuler la croissance.
- C’est l’inverse de la courbe de KUZNETS. Nous ne pensons plus que la réduction des inégalités débouche sur une croissance économique ; mais, c’est de la réduction des inégalités que naît une croissance économique. C’est notamment de cela que découle l’idée d’une Europe sociale dans les années 1970.
- De la même manière, l’OCDE reconnait l’impact négatif d’une inégalité de revenu sur la croissance à moyen terme. L’idée qu’il existe une relation positive entre la réduction de l’inégalité et croissance économique est alors avérée.
- KEYNES montre notamment que les inégalités limitent la consommation des ménages à bas revenus et par conséquent pèse sur la croissance.
- AGHION, lui, incite sur le fait que les inégalités entravent l’accumulation du capital humain donc la mobilité sociale et le développement de compétences. Ainsi, les inégalités limitent l’innovation, pourtant vectrice de croissance.
B. Les effets économiques positifs de la redistribution justifient leur réduction par une action correctrice de l’État.
- La redistribution permet de corriger la répartition primaire par les prélèvements, PIKETTY insiste sur le rôle de l’impôt progressif dans la réduction des inégalités. Un système de redistribution apporte un revenu de transferts conséquent pour les ménages et particulièrement les ménages précaires. Alors que, dans les années 1950, le revenu de transfert représentait 10% du revenu disponible, aujourd’hui, il en représente 35% et jusqu’à 70% pour les ménages les plus en difficultés.
- De plus, cela représente une recette fiscale pour l’État qui peut investir dans des projets d’infrastructures ou encore aider au développement des services publics, cela participe à l’activité économique et à la réduction des inégalités.
C. Pourtant, les effets économiques positifs sont aléatoires donc contestés.
- La redistribution peut être contreproductive si elle est à des niveaux trop élevés et pèse ainsi sur la croissance (voire courbe de LAFFER).
- C’est pourquoi il serait peut-être plus intéressant de se tourner vers de l’incitation plutôt que la redistribution. Les inégalités sont moteurs de la croissance car c’est une incitation à l’innovation, elle-même vectrice de croissance économique.
- Les inégalités peuvent être transitoires comme le montre la courbe de KUZNETS, la croissance permet à un certain moment de réduire les inégalités.
- Dans une conception de la justice sociale selon HAYEK, G.MANKIW dans son Précis d’Économie montre que l’inégalité de revenu équivaut à une inégalité de compétences et que celle-ci est justifiée.
II. La réduction des inégalités se justifie sur les plans sociaux et éthiques mais tout dépend des conceptions retenues de la justice sociale.
A. L’accroissement des inégalités menace la cohésion sociale.
- On fait le constat de l’accroissement des inégalités et de leur retour qui justifie en lui-même leur réduction selon PIKETTY. On remarque que l’ascenseur social est en panne ce qui découle sur une inégalité scolaire encore plus importante et qui bloque les rouages de la méritocratie et donc ne permet pas la mobilité sociale.
- De plus, un accroissement des inégalités est facteur de discriminations, de tensions sociales et donc ne permet pas une cohésion sociale optimale. Il y a un risque d’exclusion sociale que Robert CATSEL appelle « la désafiliation », il s’agit d’une rupture des liens sociaux. Par exemple, 1500 jeunes sortent chaque année du système scolaire sans diplômes. Serge PAUGAM montre que les inégalités peuvent déboucher sur une disqualification sociale. Ces sociologues montrent que l’exclusion est une situation qui est le résultat d’un processus où les inégalités sont les vectrices principales.
B. Réduire les inégalités est un moyen d’assurer plus de justice sociale.
- Certaines inégalités sont justes et d’autres injustifiables. Il n’y a pas à corriger toutes les inégalités mais à vouloir une société égalitariste au sens de TOCQUEVILLE, c’est-à-dire, une société où nous allons vers le progrès sociale, et où il y a une forte mobilité sociale.
- Quant à RAWLS, l’accroissement des inégalités peut apparaître justifié à condition que la situation des plus pauvres s’améliore.
Pour conclure, le retour des inégalités marque la nécessité de réduire les inégalités. Elles doivent être corrigées pour permettre le retour d’une croissance économique.
Or, toutes les inégalités ne sont pas injustes, et même elles sont parfois vectrices de croissance. Cela dépend de la conception de la justice sociale pour appliquer des mesures qui nous permettent d’être dans une société égalitariste.
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