Le 26 mars 1991, le traité d’Asunción a créé le Mercosur. Ici, nous allons nous intéresser à l’accord de libre-échange entre l’Union européenne et le Mercosur, et en quoi il représente un début prometteur pour plus de commerce entre l’Amérique du Sud et l’Union européenne, mais cet accord peut conduire à différentes conséquences. Depuis son annonce, l’accord commercial entre l’Union européenne et les pays du Mercosur n’a cessé de susciter des débats et de diviser les opinions. Cet article va examiner en quoi le pacte Mercosur joue un rôle crucial dans le processus de développement des pays d’Amérique latine. Mais d’un autre côté, ce pacte continue d’être énormément critiqué, notamment par la France, les Pays-Bas ou encore l’Irlande en 2023.
La situation des pays d’Amérique Latine avant l’accord
L’accord de libre-échange entre l’Union européenne et le Mercosur représente un véritable espoir pour ces pays qui, depuis l’échec des stratégies d’industrialisation par substitution aux importations dans les années 70, peinent à s’affirmer comme grandes puissances mondiales. Ces dernières années, des pays comme le Brésil, la Colombie et le Chili se distinguent par leur production d’énergies renouvelables. C’est pourquoi une ONG américaine, dans son rapport, perçoit l’Amérique latine aujourd’hui comme un potentiel leader mondial dans ce domaine pour l’avenir. Ce qui pousse à un tel constat, c’est qu’au Brésil, d’ici 2030, les prévisions indiquent que les projets lancés dans les énergies renouvelables devraient alors permettre de porter les capacités à 217 GW supplémentaires aux 27 GW déjà produites. De plus, l’augmentation de la demande mondiale stimule l’agriculture en Amérique latine, un secteur qui contribue déjà à la production de 13 % de l’agriculture mondiale.
Ainsi, tous ces efforts pour favoriser la croissance économique portent leurs fruits, et cet accord en est la preuve.
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Que peut-on prévoir avec cet accord ?
Suite à l’augmentation de l’attractivité du Brésil, avec la possible arrivée de nouveaux investisseurs internationaux et l’évolution du pacte Mercosur, qui va passer à la troisième étape de la typologie de Balassa, les grandes puissances mondiales manifestent un intérêt croissant pour ces pays, les considérant comme de potentiels partenaires. Ainsi, en éliminant plus de 90 % des droits de douane imposés par le Mercosur et l’Union européenne aux produits venant de part et d’autre de l’Atlantique, le marché européen s’ouvrirait ainsi plus largement aux produits agricoles sud-américains, sur la base de quotas. Avec cet accord, le Mercosur pourrait fournir jusqu’à 26 % du rumsteck servi en Europe, selon une étude récente. L’Union européenne entend également augmenter et « sécuriser » ses importations de cuivre, de fer et de lithium, ainsi que d’autres métaux en provenance du Brésil, du Chili et du Mexique.
Pour l’Union européenne, on peut donc prévoir une réduction de sa dépendance vis-à-vis des marchés traditionnels comme ceux des États-Unis et de la Chine et une augmentation du PIB de 0,1 %. Pour le Mercosur, on estime une augmentation du PIB de 0,5 %.
Malgré tout, cet accord est face à de multiples critiques.
La critique environnementale, agricole et éthique
L’accord entre l’Union européenne et le Mercosur renforcera la spécialisation du Mercosur dans le secteur primaire. Pour l’Union européenne, cela affecte principalement les secteurs agricoles. Par exemple, on estime que les importations de bœuf de l’Union européenne en provenance du Mercosur augmenteront de 52 % d’ici 2030. Les différentes études soulignent aussi la distorsion de concurrence entre l’Union européenne et le Mercosur. Les réglementations de production agricole dans le Mercosur restent faibles par rapport aux réglementations de l’Union européenne. Cela pose un risque majeur, et des questions se posent quant à l’efficacité du contrôle européen. Ces importations pourraient conduire à de nouveaux scandales sanitaires et affecter la confiance des consommateurs européens dans la sécurité alimentaire. Alors que l’accord entre l’Union européenne et le Mercosur vise à intensifier les flux commerciaux, on estime que la déforestation supplémentaire résultant de l’accord entre l’Union européenne et le Mercosur, ainsi que l’augmentation des exportations de viande bovine, couvrira une large gamme. D’un côté, cet accord est considéré comme néocolonial, car les économies latino-américaines vont ouvrir leurs marchés publics au lieu de développer des services publics de qualité. De l’autre, l’Union européenne prévoit de leur vendre plus de pesticides, y compris ceux interdits en Europe, et des véhicules thermiques dont nous ne voulons plus. Les Européens continuent à puiser les matières premières des pays du Sud pour maintenir nos modes de vie gourmands en ressources, laissant à ces pays les conséquences environnementales et sociales : déforestation, pollution, perte de biodiversité, violations des droits humains.
Pourquoi cet accord malgré ses inconvénients ?
Malgré tout, on peut voir qu’il existe toujours une volonté de faire signer cet accord parce que, pour la Commission européenne, il est crucial de renforcer les liens avec l’Amérique latine, car elle considère que :
-Il y a une fenêtre d’opportunité avec Luiz Ignacio Lula da Silva à la présidence, qui est plus enclin à lutter contre la déforestation illégale en Amazonie.
– Mais aussi car les enjeux économiques et géopolitiques nous imposent d’aller de l’avant. En effet, cet accord est considéré comme le plus important jamais conclu par l’Union européenne en termes de commerce. Il aiderait l’Union européenne à diversifier ses sources d’approvisionnement face aux défis géopolitiques liés à la coupure des relations avec la Russie et les rivalités avec la Chine. De plus, se rapprocher des pays d’Amérique du Sud qui sont des démocraties semble primordial à l’heure où la démocratie régresse un peu partout, particulièrement en Afrique.
En résumé, l’accord entre l’Union européenne et le Mercosur augmentera les échanges commerciaux, mais aura des effets négatifs sur l’environnement, l’agriculture et la santé. De plus, cet accord est anachronique et en contradiction avec les enjeux environnementaux, sociaux et sanitaires actuels. Il va à l’encontre des orientations de la Commission européenne, notamment le Green Deal visant la neutralité carbone d’ici 2050, la préservation de la biodiversité et l’agriculture durable prévue par la stratégie “De la ferme à la fourchette”.