L’énergie est indispensable à l’économie mondiale, ce qui en fait un enjeu économique mais aussi géopolitique majeur dans la compétition entre des acteurs étatiques ou non-étatiques. La mise en place d’un développement durable, plus que jamais nécessaire et au cœur de l’actualité, requiert aussi une mutation du domaine de l’énergie et de son approvisionnement à l’échelle mondiale. En réalité, les différents types d’enjeux de l’énergie s’imbriquent entre eux tel un système qu’il s’agit d’essayer de comprendre : un sujet transversal autour de l’énergie est totalement dans l’esprit des concours.
La définition du terme « enjeu » est par ailleurs à connaître par cœur tant les potentiels sujets de concours incluant ce terme sont nombreux. Un enjeu renvoie aux risques ou aux chances pour les acteurs économiques et politiques, pour les territoires et pour les sociétés. Il désigne ce que les populations, les territoires et les Etats ont à perdre ou à gagner face à un sujet donné.
Il en est bien évidemment de même pour la notion de géopolitique, qui désigne d’après Yves Lacoste “l’étude des rivalités de pouvoir, quel qu’il soit, sur des territoires”.
Un enjeu économique
Tous les pays ont besoin d’énergie mais pas tous ont les moyens et les gisements pour assurer leur autosuffisance en matière d’énergie. C’est pourquoi les Etats bien dotés cherchent à exporter une production toujours plus importante d’énergie pour en tirer une rente maximale.
Par exemple, les Etats-Unis sont devenus depuis 2010 le premier pays exportateur mondial de pétrole (devant l’Arabie Saoudite et la Russie) et de gaz (devant la Russie et le Qatar) grâce à l’utilisation d’une technique d’extraction non-conventionnelle – la fracturation hydraulique – permettant l’exploitation de pétrole et de gaz de schiste. Cette technique a une forte empreinte écologique, si bien que les enjeux économiques autour de l’énergie empiètent sur ceux environnementaux.
Certains Etats fondent même leur stratégie de développement économique sur l’extraction et l’exportation d’hydrocarbures. Ce choix débouche souvent, pour les pays en développement, sur un accroissement de la dépendance du pays à la demande internationale et aux cours mondiaux des matières premières énergétiques. Cette dépendance est donc économique mais elle peut aussi se faire ressentir dans les rivalités de pouvoir à l’échelle internationale : l’énergie est aussi un instrument géopolitique.
Un enjeu géopolitique
Par la dépendance qu’elle peut générer entre des acteurs, en particulier les Etats, l’énergie est aussi un objet fondamentalement géopolitique. En effet, les Etats assez développés et bien dotés en gisements pétroliers ou gaziers rendent dépendants les Etats vers lesquels ils exportent leur énergie.
Par exemple, on estime qu’en 2030, l’Union européenne importera 75% de sa consommation de pétrole, de gaz et de charbon, contre 50% en 2000. L’UE cherche à réduire sa dépendance énergétique à l’égard de Moscou – 39% de sa consommation de gaz vient de Russie – en mettant en place des projets comme celui du gazoduc Nabucco, qui devait initialement acheminer du gaz non russe, en provenance d’Azerbaïdjan ou du Turkménistan et en se branchant sur les tubes traversant la Turquie pour éviter le transit par la Russie, vers l’Europe centrale. Ce projet, visant à diversifier les sources d’approvisionnement énergétique de pays comme la Hongrie ou la Pologne, qui dépendent respectivement à hauteur de 80% et 90% de la Russie pour leur consommation de gaz, a été initié en 2002 mais sa réalisation est toujours incertaine à ce jour.
L’énergie peut aussi, comme on l’a vu, générer de la dépendance pour les pays en développement bien dotés en gisements pétroliers ou gaziers. Certains pays en développement comme le Vénézuéla, le Nigéria ou de nombreux pays du Golfe se rendent ainsi dépendants des cours mondiaux du pétrole et du gaz et de la demande mondiale, ces deux éléments étant eux-mêmes conditionnés par la situation géopolitique internationale.
Or l’indépendance est un des trois piliers de la notion de puissance d’après Serge Sur.
Un enjeu environnemental
La transition énergétique passe par la diminution ou la disparition progressive des énergies fossiles dans le total de l’énergie consommée, au profit de l’augmentation de la part des énergies renouvelables. De nombreux pays développés comme la France ou l’Allemagne se sont engagés à mener cette mutation de leur mix énergétique et ont commencé à le faire.
L’exemple de l’énergie éolienne montre à quel point l’énergie recèle des enjeux à la fois économiques, géopolitiques et environnementaux. Certains pays développés cherchent à accroître leur production d’énergie éolienne, une énergie verte, en accord avec leur engagement dans un développement durable. Or les batteries nécessaires au bon fonctionnement des éoliennes se composent de métaux rares incluant des terres rares, dont la production mondiale est assurée par la Chine à hauteur de 95%. En plus des transports déjà polluants de ces métaux pour leur importation en Europe, la Chine utilise, pour extraire de tels métaux, des techniques de forages très polluants. Guillaume Pitron décrit ce problème en profondeur dans son livre paru en 2018 intitulé La guerre des métaux rares, très conseillé tant il expose de nombreux enjeux géopolitiques contemporains.