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Espagne, moteur de la croissance de l’Europe

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En 2024, l’Espagne s’est imposée comme l’un des principaux moteurs économiques de l’Europe, affichant une croissance de 3,2 %, un chiffre bien supérieur à celui des grandes puissances du continent. À titre de comparaison, la France et le Royaume-Uni peinent à dépasser 1 % (respectivement 1,1 % et 0,9 %), tandis que l’Allemagne connaît une récession avec un taux de -0,2 %. Fait marquant, près de 40 % de la croissance de la zone euro a été portée par l’Espagne.

Comment expliquer qu’un pays qui, il y a à peine plus d’une décennie, faisait face à une grave crise financière et une bulle immobilière dévastatrice, affiche aujourd’hui une telle vigueur économique malgré des défis structurels persistants ? Cet article se propose d’analyser le parcours économique de la quatrième puissance de l’Union européenne et d’examiner le rôle central de l’immigration dans cette dynamique.

Les atouts de l’économie espagnole

L’hebdomadaire britannique The Economist a désigné l’économie espagnole comme la plus performante de l’année 2024. Plusieurs facteurs expliquent ce succès. Tout d’abord, le redressement rapide du secteur touristique après la crise du Covid-19 a joué un rôle clé. L’Espagne a accueilli un nombre record de 94 millions de touristes en 2024, se positionnant juste derrière la France, leader mondial en la matière. Ce rebond du tourisme a permis de soutenir l’emploi et la consommation intérieure.

Ensuite, l’économie espagnole bénéficie d’un soutien financier important de l’Union européenne. Grâce au programme NextGeneration EU, l’Espagne recevra plusieurs centaines de millions d’euros d’ici 2026, faisant partie, avec l’Italie, des principaux bénéficiaires de ces fonds. Ces investissements sont orientés vers le développement du réseau ferroviaire, l’industrialisation du secteur des véhicules électriques ainsi que le soutien aux petites et moyennes entreprises.

Un autre atout majeur réside dans les énergies renouvelables. L’Espagne s’est imposée comme un acteur clé de la transition énergétique en Europe. Contrairement à certains pays dépendants des importations d’énergie, notamment depuis le conflit russo-ukrainien, l’Espagne a su renforcer son indépendance énergétique, attirant ainsi des investisseurs dans le secteur des énergies vertes.

Cependant, des défis subsistent, notamment en ce qui concerne le pouvoir d’achat. En juillet 2022, l’inflation atteignait un pic de 11 %, mettant sous pression les ménages. Toutefois, grâce aux mesures économiques adoptées, l’inflation a été ramenée à 2,8 % à la fin de l’année 2024, permettant un regain de stabilité économique.

L’immigration, un moteur clé de la croissance espagnole

En 2025, l’Espagne a atteint un record démographique d’immigrés avec une population de 49 millions d’habitants, dont 9 millions sont nés à l’étranger. Les principales communautés immigrées proviennent de Colombie, du Maroc et de Roumanie, avec une récente augmentation des flux en provenance d’Amérique latine. Mais quel impact ces populations ont-elles sur l’économie espagnole ?

L’Espagne fait face à un vieillissement accéléré de sa population. Avec une espérance de vie parmi les plus élevées au monde et l’un des taux de natalité les plus faibles d’Europe, le pays a besoin de main-d’œuvre pour maintenir son dynamisme économique. L’immigration comble ce vide démographique en apportant une force de travail essentielle. Selon plusieurs études économiques espagnoles, les immigrés sont responsables de près de la moitié de la croissance du pays.

D’après la Banque d’Espagne, cette tendance devrait se poursuivre, car le pays doit équilibrer sa population active et ses retraités afin de préserver son système de protection sociale, notamment les retraites. En outre, les travailleurs immigrés occupent souvent des emplois difficiles d’accès pour la population locale, notamment dans les secteurs de l’agriculture, du bâtiment et des services à la personne. Leur contribution est donc double : ils soutiennent la croissance et garantissent la pérennité de certains secteurs clés.

 

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Des défis structurels persistants

Malgré ses nombreux atouts, l’économie espagnole demeure confrontée à plusieurs défis majeurs. Le chômage, bien qu’en baisse, reste l’un des plus élevés d’Europe, atteignant encore 10 % en 2024. Cette situation concerne particulièrement les jeunes, qui peinent à s’insérer durablement sur le marché du travail.

Un autre point de préoccupation est l’endettement public, qui dépasse la production nationale. Cette dette importante contraint le gouvernement à maintenir une politique budgétaire rigoureuse et limite sa capacité à financer de nouveaux projets sociaux et économiques.

Par ailleurs, la forte dépendance de l’Espagne au tourisme constitue une vulnérabilité. Si ce secteur représente une source importante de devises et d’emplois, il engendre également des effets négatifs. Le surtourisme entraîne une augmentation des loyers et du coût de la vie, ce qui alimente un mécontentement croissant au sein de la population locale. Ces dernières années, des manifestations se sont multipliées pour dénoncer la transformation de certaines villes en lieux exclusivement tournés vers les visiteurs étrangers, au détriment des résidents.

Enfin, l’instabilité politique complique la mise en œuvre des réformes économiques. Le gouvernement actuel, en situation de minorité, doit constamment négocier des alliances pour faire voter ses projets de loi, ce qui ralentit certaines initiatives stratégiques.

 

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Une dynamique prometteuse malgré les défis

Malgré ces obstacles, les perspectives économiques de l’Espagne restent favorables. La Commission européenne prévoit que le pays affichera à nouveau le taux de croissance le plus élevé de la zone euro en 2025. Grâce à une combinaison de réformes structurelles, d’investissements stratégiques et d’un apport significatif de l’immigration, l’Espagne pourrait continuer à jouer un rôle clé dans la dynamique économique européenne dans les années à venir.

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Piotr Sienicki