Le conflit entre l’Arménie et l’Azerbaïdjan dans le Haut Karabagh est intense depuis maintenant plus de 2 ans. Après des tensions à la frontière en 2020, les deux pays mènent une guerre sans merci avec des attaques menées par Bakou. Ces derniers jours, des accords de cesser le feu et de normalisation tentent d’être mises en place par différents intermédiaires : les Etats-Unis, la Russie, l’Union Européenne, la Turquie.
Un conflit qui ne date pas d’hier
Ce type de conflit incarne une rivalité historique souvent ancrée dans l’ADN national de ces pays. Cette région du Haut Karabagh est au cœur des tensions entre l’Arménie et l’Azerbaïdjan depuis les années 1990. Cette enclave était rattachée à l’Azerbaïdjan, malgré une majorité de populations arméniennes, par les Soviétiques dans les années 1920.
Néanmoins, la proclamation de son indépendance en 1991 avec le soutien arménien a attisé le début des heurts entre les deux pays. De violents affrontements se sont tenus entre les deux voisins. Cette rivalité pour ce territoire apparaît au début des années 1990. C’est l’Arménie qui s’inclina au détriment de l’Azerbaïdjan. Cette guerre laissera un lourd tribut avec pas moins de 30 000 décès.
Depuis 2020, les tensions ont repris avec l’Arménie qui revendique ce territoire. De nombreuses attaques de part et d’autre sont menées avec des chars et des missiles fournies en partie par la Russie. Quasiment 150 000 habitants vivaient dans cette région de 4400km^2 du Haut Karabagh. Ce conflit illustre parfaitement ce phénomène de balkanisation, énoncé par Walter Rathenau en 1918 prédisant la balkanisation de l’Europe. La balkanisation, c’est la fragmentation d’une région ou d’un État en des États plus petits et souvent hostiles les uns aux autres.
Le nouveau jeu des alliances dans ce conflit au Haut Karabagh
La guerre entre l’Arménie et l’Azerbaïdjan incarne encore un jeu d’alliance de soutiens et de fournisseurs d’armes. La Russie est un acteur extrêmement proche de ces deux pays car il les aide militairement. Néanmoins, la Russie tente ces dernières de semaine de faire le médiateur entre les deux pays. Lors d’un sommet à Sotchi en octobre 2022, les deux pays se sont engagés à « ne pas recourir à la force ». Pour revenir à cette balkanisation, la Russie en est gagnante de voir des petits pays se former proche de ses frontières. En effet, ce phénomène n’est pas propre au Haut Karabagh, puisque des « facto-states » comme l’Ossétie du Sud, l’Abkhazie ou encore la Transnistrie dans les années 1990. Ainsi, la non-viabilité de ces facto states crée une relation de dépendance envers la Russie (denrées alimentaires, forces armées).
L’autre acteur extérieur majeur est la Turquie. Les tensions perdurent entre la Turquie et l’Arménie, à cause du refus de reconnaissance du génocide arménien en 1917. Les Turcs s’étaient clairement alignés sur les convictions de Bakou pour l’issue du conflit. Toutefois, la Turquie, sous la tutelle d’Erdogan, tente d’apaiser les relations et le conflit avec une médiation entre les trois pays.
De son côté, l’Union Européenne veut intervenir dans cette guerre avec l’objectif de normalisation des relations entre les deux pays. Elle veut aussi éviter que la Russie ne se mêle trop de conflit, de peur d’un rapprochement entre Poutine et les pays caucasiens. Arménie et Azerbaïdjan se tournent vers la CEDH (Cour Européenne des droits de l’Homme) pour parvenir à un accord.
Le Caucase devient une région énergétique stratégique
Cette région n’est pas dénuée d’intérêts pour les pays proches de cette région et même pour d’autres acteurs bien externes. En effet, le Caucase est gorgé de richesses énergétiques qui viennent gonfler son attractivité. Il représente un carrefour entre Asie centrale, l’Iran, la Russie et le Moyen Orient.
L’Azerbaïdjan est un acteur stratégique au niveau énergétique avec de nombreuses ressources gazières et pétrolières. C’est à travers sa compagnie nationale SOCAR (State Oil Company of Aerbaijan Republic) qu’elle tente d’exister dans le marché des hydrocarbures. Elle est notamment l’un des sponsors de l’UEFA(célèbre association regroupant les fédérations nationales de football d’Europe). L’Azerbaïdjan réalise de nombreux projets gaziers et pétroliers à travers la construction d’oléoducs. Un corridor énergétique est déjà présent entre ce dernier, la Turquie et la Géorgie. En effet, c’est un lieu de passage du corridor gazier sud-européen. C’est une initiative de l’UE pour transporter le gaz azerbaidjanais de la région Caspienne vers l’Europe. L’objectif ? éviter le passage du gaz par la Russie.
Une résolution à venir ?
Les tentatives de résolution par l’Arménie et l’Azerbaïdjan n’ont jamais été aussi fortes. Néanmoins, les derniers rapports de l’ONG Human Right Watch ne sont pas de très bons signes de fin de conflit. Elle a publié ces derniers mois un rapport sur les crimes de guerre commis par les soldats azéris. Ces derniers sont visés par une accusation pour des crimes de guerre à l’encontre de prisonniers de guerre arméniens. Même si les médiateurs sont nombreux dans l’avancée du dossier Arménie/Azerbaïdjan (Russie, Turquie, UE), l’idéologie historique des deux pays pourrait être un frein à la normalisation des relations. Cette dernière reste souhaitable pour la stabilité de la région du Caucase.