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La mondialisation se façonne un nouveau visage

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La mondialisation est définie par Philippe Moreau Defarges comme un processus de multiplication des flux et des réseaux de toutes sortes (marchandises, services, idées, modes, mais aussi maladie) s’étendant progressivement à toute la terre. Pour autant, avec le big bang du commerce mondial actuel, la mondialisation semble se façonner un nouveau visage, différent de ce que nous avons connu depuis l’apparition de ce phénomène.

La mondialisation commerciale est à l’aube d’une grande réorganisation

Les tensions commerciales entre les États-Unis et la Chine, ainsi que les répercussions de la guerre en Ukraine et de la pandémie de Covid-19, ont déjà commencé à influencer les échanges commerciaux. Selon Ngozi Okonjo-Iweala, directrice générale de l’Organisation mondiale du commerce, il s’agit plus d’une reconfiguration de la mondialisation que d’un processus de démondialisation. Ce long processus semble bel et bien avoir commencé lorsque l’on examine les signes avant-coureurs de changement.

« Les tensions sino-américaines et la guerre en Ukraine ont eu pour effet d’accroître les échanges au sein du grand marché nord-américain, l’ancien Nafta, ainsi qu’au sein même de l’Union européenne. La relocalisation d’activités dans des pays dits amis a bien commencé. Le découplage entre les Etats-Unis et la Chine en ce qui concerne les semi-conducteurs, les technologies vertes et les véhicules électriques est réel », observe Alessandro Nicita, économiste du département commerce international de la conférence des Nations unies sur le commerce et le développement.

L’OCDE confirme cette tendance. Dans ses perspectives économiques publiées en juin, intitulées La route est encore longe, l’organisme souligne que les relations commerciales et d’investissement mondiales sont en période de changements importants. L’enthousiasme suscité par le renforcement des liens commerciaux et par le système commercial multilatéral semble commencer à diminuer.

 

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Des évolutions profondes façonnent le nouveau visage de la mondialisation

Soyons clairs, les échanges commerciaux restent intenses et en 2022, le commerce mondial des marchandises représentait environ 22 % du produit intérieur brut mondial en volume, soit 0,6 point de pourcentage de plus que la moyenne des 10 dernières années hors pandémie de Covid-19.

Pour autant, aux Etats-Unis, la part des importations de produits manufacturés en provenance de Chine est passée de 25 % en 2018 à 19 % en 2022. La part des conteneurs transportant des marchandises depuis la Chine vers les États-Unis a également diminué d’environ 10 % au cours de la dernière année. Enfin, de nombreuses entreprises américaines cherchent à réduire leurs importations en provenance de Chine.

En Europe, la situation est différente. Bien qu’elle ait réduit ses liens avec la Russie, notamment dans le secteur énergétique au profit des États-Unis, la part de la Chine dans les importations européennes de produits manufacturés a régulièrement augmenté. Selon l’OCDE, cette part est passée de 26 % en 2018 à 33 % en 2022. Quel que soit le secteur étudié, la Chine représente une part croissante des importations européennes.

 

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Qui sont les gagnants de cette nouvelle organisation de la mondialisation ?

Cette réorganisation des flux commerciaux profite notamment à des pays tels que l’Indonésie, la Malaisie et le Vietnam, qui renforcent leur poids dans les importations américaines, y compris pour les semi-conducteurs. En 2020, environ 80 % des semi-conducteurs importés par les États-Unis provenaient de pays considérés comme non-amicaux, mais cette part a chuté brusquement à 55 % en 2022. À l’inverse, la part des importations américaines en provenance de Taïwan est passée de 5 % à 10 % sur la période, et celle d’Israël de 1 % à 4 %. L’Europe enregistre également une croissance de ses importations en provenance des économies asiatiques émergentes.

En outre, les importations européennes de produits manufacturés en provenance des autres pays de l’OCDE européenne ont augmenté de 13 % en valeur par rapport à 2018. La recomposition des chaînes de valeur des entreprises européennes diffère de celle des États-Unis.

Il est important de noter que, pour l’instant, seuls les pays développés et les économies d’Asie de l’Est semblent bénéficier de cette réorganisation des flux commerciaux. Les pays d’Amérique latine et d’Afrique, en revanche, sont largement absents de ce processus.

 

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En conclusion, la réorganisation des flux commerciaux est en cours, avec un désengagement des États-Unis vis-à-vis de la Chine, contrairement à l’Europe. Les pays du Sud-Est asiatique et les économies industrialisées gagnent en importance dans le commerce mondial. Cette évolution reflète une transformation de la mondialisation, bien que cela prenne du temps.

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Damien Copitet
Je suis étudiant à SKEMA BS après deux années de classe préparatoire au lycée Gaston Berger (Lille). Nous nous retrouvons toutes les semaines pour l'actualité en bref