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Jean-Marc Daniel : croissance et baisse d’impôts

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Jean-Marc Daniel baisse d’impôts

Dans une tribune du 24 juillet 2023 publiée dans l’édito Les Echos, le professeur émérite à l’ESCP Business School, Jean-Marc Daniel, a pris la parole sur le lien entre croissance et baisse d’impôts dans le giron des décisions du gouvernement de baisser les impôts des classes moyennes.

Il est primordial de remettre les choses dans l’ordre pour Jean-Marc Daniel

En marge des Rencontres économiques d’Aix-en-Provence, le ministre de l’Economie, Bruno Le Maire, a indiqué que les futures baisses d’impôts seraient conditionnées au niveau croissance, tout en ajoutant qu’il attendrait fin septembre pour présenter ses arbitrages. « Nous verrons si ce ralentissement se traduit aussi par un ralentissement de la croissance en France. A partir de là, je ferai des propositions au président de la République sur le rythme de baisse des impôts » a-t-il déclaré le 10 juillet 2023. Rappelons que le gouvernement table actuellement sur une progression de 1% du produit intérieur brut de la France en 2023, une prévision supérieure à celle de l’Insee (0,6%) et de la Banque de France (0,7%). Il anticipe ensuite une croissance de 1,6% en 2024. 

L’économiste Jean-Marc Daniel synthétise cette idée dans sa tribune de la manière suivante : « Ainsi, pour Bercy, c’est la croissance qui permettra des baisses d’impôt ». Or selon lui, si nous suivons ce raisonnement dans un contexte de croissance durablement en berne comme nous venons de le voir, il est possible de considérer que les « baisses d’impôts sont d’ores et déjà reportées aux calendes grecques », autrement dit au temps très éloigné dans l’avenir et qui n’arrivera jamais.

Par ailleurs, « la menace d’une hausse des prélèvements plane même sur les contribuables » selon le professeur émérite à l’ESCP Business School. En effet, certains acteurs de la scène politique et économique évoquent la possibilité d’une hausse des prélèvements obligatoires pour financer des projets liés à la transition écologique, notamment en rétablissant l’Impôt de Solidarité sur la Fortune (ISF), qui avait été supprimé il y a six ans. L’ancien président François Hollande a ainsi exprimé cette idée en soulignant les investissements nécessaires pour mener à bien la transition écologique et la réindustrialisation. Toutefois, une telle approche semble aller à l’encontre des idées défendues par François Mitterrand, juge Jean-Marc Daniel. Le premier président socialiste de la Ve République mettait en garde contre une asphyxie de l’économie due à un excès de fiscalité. En effet, il y a quarante ans, le 15 septembre 1983 précisément, François Mitterrand plaidait déjà pour une décrue des prélèvements lors d’un entretien télévisé, considérant qu’une baisse des impôts favoriserait la croissance économique.

Abordant la politique fiscale, il assénait : « Trop d’impôts, pas d’impôt. On asphyxie l’économie, on limite la production, on limite les énergies et je veux absolument, tout le temps où j’aurai cette responsabilité, revenir à des chiffres plus raisonnables […]. Qu’on amorce la décrue, qu’on renverse la vapeur ! Vous pouvez compter sur ma volonté pour cela. Vous l’avez vous-même observé, nous n’avons pas plus augmenté que nos prédécesseurs mais nous avons quand même augmenté, de sorte que cela s’ajoute toujours et il arrive un moment où c’est insupportable. Ce moment, je pense qu’il est arrivé. »

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Les baisses d’impôts pour renouer avec la croissance économique

Jean-Marc Daniel note que le taux de prélèvements obligatoires en France est actuellement de 45,2 % du PIB, et cette proportion est comparable à celle évoquée par François Mitterrand comme étant « insupportable ». Pourtant, les responsables politiques actuels semblent avoir oublié cet avertissement, alors que le pays consacre 56 % de son PIB à la dépense publique. La baisse des impôts, comme en 1983, est perçue comme une réponse efficace aux problèmes économiques actuels.

L’auteur note cependant « qu’une telle baisse ne doit pas se tromper de cible. S’il est populaire de baisser les impôts des ménages, ce serait, dans les circonstances présentes, une erreur ». Il explique simplement que « les baisses d’impôt en faveur des ménages sont supposées provoquer une augmentation de leur consommation. Cependant, une telle augmentation déboucherait sur un surcroît d’importations alors même que la France accumule les déficits extérieurs ».

Ce dernier privilégie, comme en 1983, une réduction de la pression fiscale sur les entreprises, afin que ces dernières disposent de ressources supplémentaires pour investir, ce qui renforcerait leur capacité à prendre en compte les enjeux environnementaux et faciliterait la création d’emplois. La baisse des impôts de production est notamment mise en avant, étant donné que ces prélèvements sont souvent critiqués pour leur impact négatif sur l’économie.

En outre, Jean-Marc Daniel souligne que le redressement des finances publiques doit être envisagé d’une manière plus globale, et qu’il serait erroné de considérer une hausse des prélèvements comme la seule solution. Des opportunités de réduction des dépenses publiques existent, et il est crucial de les explorer. Tout en gardant à l’esprit que l’investissement reste une priorité pour la politique économique, il est recommandé de favoriser une approche qui corresponde à l’impératif économique du moment, à savoir la promotion d’une croissance verte. Ainsi, la mise en place de mesures fiscales favorables aux entreprises pourrait jouer un rôle essentiel dans la réalisation de ces objectifs.

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Pour conclure, Jean-Marc Daniel met en exergue le débat autour des perspectives budgétaires et fiscales en France. Alors que certains considèrent la croissance économique comme un préalable aux baisses d’impôts, lui plaide en faveur de réductions ciblées pour les entreprises afin de stimuler l’investissement et la croissance verte.

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Damien Copitet
Je suis étudiant à SKEMA BS après deux années de classe préparatoire au lycée Gaston Berger (Lille). Nous nous retrouvons toutes les semaines pour l'actualité en bref