Le 17 juillet 2023, des négociations autour de l’accord de libre-échange UE/MERCOSUR ont repris après quatre années de mise en suspens. Si cet accord est considéré par la présidente de la Commission européenne, Ursula Von Der Leyen, comme “gagnant-gagnant”, sa non-ratification après 23 années de négociation semble mettre en évidence les limites géopolitiques de celui-ci.
UE / MERCOSUR : un accord ambitieux
L’accord UE/MERCOSUR est un accord de libre-échange bilatéral qui cherche à connecter deux des principaux blocs régionaux mondiaux. D’un côté, l’Union Européenne (1992 – Traité de Maastricht) qui représente 18 % du commerce mondial pour 446 millions d’habitants et de l’autre le MERCOSUR (1991), 4e bloc du monde pour 271,75 millions d’habitants. À eux deux, ils représentent 25 % du PIB mondial. L’accord encourage avant tout l’ouverture de relations économiques entre les deux blocs. Il vante ainsi la possibilité de mettre fin à 90 % des frais de douanes entre l’UE et le Mercosur. En outre, l’accord UE/MERCOSUR favorise également la mise en place d’un dialogue politique sur des sujets comme la cybersécurité, la criminalité, l’éducation, le respect des droits de l’homme et l’environnement. Certaines ONG sud-américaines voient dans ce projet une opportunité pour le MERCOSUR de profiter du statut de “puissance normative” (Ian Manners) de l’UE pour s’inspirer de leurs réglementations dans des domaines socio-économiques.
Des craintes européennes pour l’accord UE / MERCOSUR ?
Néanmoins, l’accord peine à être finalisé. En effet, le projet remonte au début des années 2000, a été suspendu jusqu’en 2013 en raison de difficultés concernant des questions économiques liées à l’agriculture, puis a repris avec plus de sérieux en 2016 en raison du protectionnisme de Donald Trump. En 2019, un accord de principe a été trouvé. Toutefois, le président français Emmanuel Macron bloque ce dernier en accusant l’ancien président brésilien Jair Bolsonaro d’avoir “menti” sur son respect des principes écologiques de l’accord. En 2020, le rapport Stefan Amber met en évidence que l’accord serait responsable “d’accroître de manière non ambiguë ” les émissions de gaz à effet de serre mais aussi la déforestation due à la hausse des exportations sud-américaines de viande bovine. En somme, l’accord n’apparaît pas comme viable pour le moment.
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Un accord remis en question par les pays du MERCOSUR ?
D’autre part, des voix parmi les citoyens latino-américains s’élèvent pour contester le caractère asymétrique et néocolonial de l’accord. C’est le cas de l’économiste de l’AITEC, Maxime Combes, qui souligne que l’accord est promu par l’Union européenne dans une optique d’appropriation des matières premières et terres rares du continent (lithium, cuivre, fer). L’économiste accuse l’Europe d’entretenir la “path dependence” (“schéma de dépendance”) de la région car cette dernière ne pourrait pas développer une industrie si son marché se contente d’être primaire. Alors que l’Amérique latine prend une place de plus en plus importante sur la scène internationale comme une alternative aux exportations russes et chinoises pour l’occident dans un contexte de guerre, il ne serait pas étonnant que la région sud-américaine ne décide de renégocier l’accord en sa faveur.
En conclusion, bien que l’accord UE/MERCOSUR apparaisse comme une avancée nécessaire pour les deux blocs au vu de la situation mondiale actuelle, il semble devoir encore être révisé. Cette révision serait essentielle pour parvenir à un consensus entre les différents acteurs, afin de rendre l’accord encore plus en adéquation avec les enjeux contemporains tout en respectant l’héritage de ces deux civilisations. Les accords internationaux de cette envergure requièrent une délicate balance entre des intérêts multiples tels que l’économie, l’environnement, le social et le culturel. Il est donc envisageable que cette révision prenne du temps, étant donné la complexité des intérêts en jeu et l’évolution constante du contexte.