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Géopolitique des Jeux Olympiques : tout savoir si le sujet tombe aux concours !

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Que penser aujourd’hui de l’adage de Pierre de Coubertin « L’important, c’est de participer » ? S’il peut dans un premier temps déjà sembler désuet lorsque l’on voit les compétitions acharnées que se livrent les athlètes dans la plupart des sports les plus répandus dans le monde, cela semble être encore moins vrai lorsque l’on traite des Jeux Olympiques. En effet, au-delà de la simple performance sportive, les JO ont aussi un impact non négligeable sur la scène géopolitique internationale qui a même tendance de nos jours à trop souvent éclipser les compétitions.

 

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Les Jeux Olympiques pour le pays organisateur : un coup de communication immense et un soft power certain

Joseph Nye décrivait il y a quelques décennies le « soft power » comme un pouvoir d’influence, distinct de l’habituel et plus conforme « hard power » qui rassemblait les bien connues puissances économiques, militaires ou encore diplomatiques. Quelle action colle mieux à la définition de cette nouvelle forme de puissance que l’organisation des Jeux Olympiques ? Accueillir les JO, c’est l’assurance (en plus de rentrées d’argent souvent plus que confortables pour l’Etat concerné, si l’on ajoute aux revenus liés à l’évènement en lui-même ceux concernant les flux touristiques inhérents au déplacement des supporters venus assister aux épreuves) d’une visibilité accrue sur la scène internationale. Pendant deux mois, le monde entier aura les yeux braqués sur le pays hôte qui pourra bénéficier d’une publicité très positive en cas d’organisation réussie.

Ce n’est ainsi pas un hasard si plusieurs pays très critiqués dans le concert des nations comme la Chine (Jeux d’été à Pékin en 2008, Jeux d’hiver dans la même ville en 2022) ou encore la Russie (Jeux d’hiver à Sotchi en 2014) ont souhaité organiser la plus grande manifestation sportive au monde récemment : pendant quelques semaines, les sujets sociétaux et autres boulets qu’ils traînent en temps normal laissent la place à une image accueillante et bienveillante, voire festive. Le bénéfice à terme peut ainsi être majeur. Autres exemples d’images permettant de nourrir le soft power de ces pays : Rio de Janeiro et ses Jeux d’été en 2016, qui permirent au Brésil de se présenter comme une puissance émergente majeure, ou encore Paris et les futurs JO de 2024, que la France veut utiliser pour imprimer à l’internationale une image environnementale et sociale forte.

 

Les Jeux Olympiques : des enjeux souvent bien au-delà du sportif, pour les athlètes comme pour les États participants

La première fois que les JO prirent une tournure géopolitique forte, c’était à Berlin en 1936. Le régime nazi, installé depuis 1933, y voyait en pleine montée des périls en Europe une occasion parfaite d’affirmer sa puissance et ses ambitions, tout en montrant un visage accueillant loin de celui que les journaux de l’époque renvoyaient du pays. Hitler missionna donc Leni Riefenstahl pour réaliser un film, Les Dieux du stade, sorti finalement en 1938. Ce film véhiculait deux grands messages : la capacité d’accueil et d’organisation de l’Allemagne d’un évènement à l’échelle mondiale, mais également la grandeur et la force de l’homme allemand.

Malheureusement pour le dirigeant allemand, un caillou se glissa dans sa chaussure, qui laissa une empreinte au moins aussi importante dans l’histoire et sur la scène géopolitique. Celui-ci avait un nom : Jesse Owens, athlète afro-américain qui allait gagner l’épreuve reine des Jeux-Olympiques : le 100 mètres. Alors que le gouvernement allemand se faisait fort de promouvoir des critères discriminatoires basés sur le physique depuis trois ans, une personne très loin de ceux-ci vint chambouler ces plans, et devint très vite le symbole sur la scène internationale de la lutte contre les nationalismes de l’époque et leur racisme latent. Il devient désormais clair qu’au-delà des États, les performances d’un athlète peuvent très vite avoir un retentissement géopolitique majeur, vu l’audience maximale offerte aux Jeux Olympiques (le CIO estimait selon une enquête indépendante réalisée il y a deux ans à 2 milliards le nombre de téléspectateurs ayant suivi les Jeux d’hiver de Pékin).

On comprend dès lors mieux la position très difficile du CIO et du comité d’organisation de Paris 2024 concernant la participation ou non des athlètes russes au Jeux Olympiques de Paris l’été prochain :

  • D’un côté, l’équité sportive l’impose, fut-ce sous bannière neutre en raison du scandale de dopage étatique découvert il y a quelques années.
  • De l’autre, de grandes performances russes à cette occasion (sachant que le pays est un habitué du haut du classement au tableau des médailles lors de ce type d’événement) seraient indubitablement immédiatement récupérées par le président russe Vladimir Poutine comme un outil de « soft power » montrant la grandeur de son pays.

Il y a deux ans bientôt, l’invasion de l’Ukraine avait été lancée aux beaux milieux des Jeux olympiques de Pékin, si bien que les Russes avaient été interdits de participation aux épreuves paralympiques. La décision du CIO, qui ne devrait plus tarder, sera évidemment scrutée et dans tous les cas causera de nombreux débats, éclipsant forcément les éventuelles performances ou non des athlètes…

 

Comme quoi, même le sport doit maintenant faire avec des enjeux géopolitiques toujours plus prégnants, surtout que le pays hôte est très scruté.

 

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Maxime Diguet