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l’Amérique latine a-t-elle gagné en stabilité politique ?

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L’Amérique Latine a longtemps été marquée par des crises politiques, économiques et sociales multiples, cependant des signes récents suggèrent que le sous-continent pourrait connaitre une plus grande stabilité politique bien que les défis à surmonter demeurent majeurs tant les inégalités restent criantes dans la plupart des pays comme le rappelle la crise politique au Pérou qui s’est transformée en explosion sociale au printemps 2023.

Ainsi, en dépit des évolutions notables au cours des dernières décennies qui laissent entrevoir une certaine stabilité politique, cette dernière demeure fragile et inégale à travers la région.

 

De récents progrès ouvrant la porte à une meilleure stabilité politique

Tout d’abord, la consolidation démocratique ainsi que l’arrivée de la gauche progressiste au pouvoir au Brésil (Lula le 30 décembre 2022), en Colombie (Gustavo Petro en juin 2022) et au Chili (Gabriel Boric fin 2021) a permis davantage de stabilité sociale avec notamment le retour du programme Bolsa Familia de Lula.

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Il ne faut pas non plus négliger la réduction des coups d’état militaires par rapport à la seconde moitié du XXème siècle légitimant d’autant plus la démocratie dans le continent tout comme le renforcement des institutions ainsi que la participation citoyenne (à travers les mouvements sociaux et les ONG) qui font survivre la démocratie.

En ce sens, la vigueur sociale et populaire n’a jamais été aussi vive en Amérique Latine comme en témoigne le mouvement los pañuelos verdes pour le droit à l’avortement légal, sûr et gratuit en Argentine ou encore les mouvements d’octobre 2019 en Bolivie (avec la participation essentielle de l’opposition politique puis de l’armée) qui ont obtenu la démission du président Morales qui avait gouverné le pays pendant près de 15 ans.

Donc ces évènements semblent ancrer la démocratie et la stabilité dans le paysage politique sud-américain.

 

Des défis persistent et entravent une stabilité durable

Premièrement, l’exemple le plus emblématique est sans doute l’explosion sociale péruvienne. En effet, le Pérou connait à nouveau les crises politiques du siècle passé avec des changements fréquents de présidence et des tensions constantes et harassantes entre les pouvoirs exécutifs et législatifs. Cette instabilité politique a été exacerbée fin 2022 avec l’arrestation du président Pedro Castillo, qui avait tenté de dissoudre le Congrès. Une situation de haine et de violences encore non apaisée d’autant plus que la nouvelle présidente non élue, Dina Boluarte trempe dans des scandales de corruption comme celui du Rolex Gate.

Ainsi, depuis les années 2000, les crises de gouvernabilité, les corruption et les inégalités mettent à mal la crédibilité de la classe politique sud-américaine. Dès lors, les sociétés se polarisent et les offres politiques se radicalisent comme en Argentine avec l’élection de Javier Milei, un anarcho-capitaliste ou encore avec les politiques dures, qui font parfois fi des droits humains, de Nayib Bukele au El Salvador pour lutter contre les violences et le narcotrafic des maras. Le populisme et les démagogues (de droite comme de gauche) connaissent leurs heures de gloire et menacent la cohésion sociale et la stabilité démocratique.

S’ajoutent à cela les dénis de démocratie et les régimes autoritaires qui perdurent comme au Venezuela où la récente réélection du 28 juillet 2024 donnant Nicolas Maduro en tête est fortement soupçonné de trucage et d’irrégularités ce qui donne lieu à des manifestations massives dans le pays et à l’étranger.

Par ailleurs, le couple Ortega qui règne d’une main de fer sur le Nicaragua depuis 2007, ne permet aucune alternance démocratique ni aucune opposition aussi pacifiste soit-elle et perpétue un système opaque et autoritaire.

Enfin, la corruption alimente également l’instabilité. En ce sens, la destitution pour corruption du président Otto Pérez Molina au Guatemala en 2015 donne lieu à des mouvements sociaux, sans oublier le détournement de plusieurs milliards par l’entreprise Petrobras pour financer des partis politiques et enrichir des élus qui a entrainé la destitution de la présidente brésilienne Dilma Rousseff en 2016 et n’a pas manqué de nourrir une défiance généralisée envers tout le système politique ; c’est le scandale Odebrecht.

 

Conclusion

Pour conclure, bien que des progrès majeurs aient été réalisés en Amérique latine, des réformes institutionnelles semblent nécessaires pour renforcer la stabilité politique et les institutions démocratiques en améliorant la transparence électorale, en encourageant l’éducation civique et en réduisant les inégalités.

Cependant de telles modification constitutionnelles semblent délicates à mettre en œuvre comme en témoigne l’échec du référendum chilien de2023 visant à modifier la constitution datant pourtant de la dictature de Pinochet.

 

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Théo Guimoyat