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Philippe Aghion prend la parole sur les opportunités de croissance et d’emploi de l’IA

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Philippe Aghion

Dans une tribune du 18 mai publiée sur le site Les Echos, l’économiste et professeur au Collège de France, Philippe Aghion, a pris la parole sur la révolution que représente l’intelligence artificielle (IA) et l’opportunité en termes d’emploi et de croissance qu’elle représente.

 

Philippe Aghion explique que chaque révolution industrielle fait ressortir la même angoisse

Philippe Aghion commence sa tribune en interprétant et analysant l’apparition de l’intelligence artificielle comme une nouvelle révolution industrielle. Or de manière empirique, lors de chaque révolution industrielle, une inquiétude a toujours persisté quant à savoir si l’innovation entraînera un chômage massif ou non. Ce fut le cas lors de la révolution de la machine à vapeur au début du XIXe siècle en Angleterre, il y eut en 1812 la révolte des Luddites qui opposa des artisans du textile, dont le chef de file était Ned Ludd, aux manufacturiers qui favorisaient l’emploi de machines dans le travail de la laine et du coton.

Vint ensuite la révolution de l’électricité aux Etats-Unis au début du siècle dernier, qui fit écrire à Keynes en 1930 : « Nous sommes atteints d’une nouvelle maladie dont certains lecteurs n’ont peut-être pas entendu le nom, mais dont ils entendront beaucoup parler dans les années à venir, à savoir le chômage technologique. » Cependant, à chaque fois, les prédictions catastrophistes ont été démenties.

Le professeur au Collège de France pose donc une question plus que légitime « en ira-t-il différemment avec la révolution de l’intelligence artificielle ? De fait, cette révolution permet d’automatiser des tâches qu’il aurait été inimaginable jusqu’ici de confier à des algorithmes : conduite de voitures, consultations médicales, synthèse de notes et de sujets avec ChatGPT. Est-il donc à craindre que cette nouvelle révolution ne conduise, elle, nécessairement, à du chômage de masse ? »

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Philippe Aghion répond que ce sont les entreprises qui automatisent qui créent le plus d’emplois

Philippe Aghion s’appuie sur une étude récente réalisée sur l’ensemble des entreprises françaises. Cette dernière montre que ce sont les entreprises qui automatisent et se robotisent qui créent des emplois, alors que leurs rivales qui n’automatisent pas, tendent à perdre des emplois ou à simplement disparaître. La relation positive entre automatisation et emploi au niveau de chaque entreprise s’explique par le fait que les entreprises qui automatisent davantage deviennent plus productives. Cela leur permet de gagner des parts de marché, car elles offrent un meilleur rapport qualité-prix que leurs concurrentes. Cette augmentation des parts de marché incite alors ces entreprises à se développer et à embaucher davantage.

Pour l’auteur, « la révolution de l’IA porte ainsi non seulement un potentiel de croissance, mais également la possibilité de créer de nouveaux emplois en France en inversant la vague des délocalisations qui s’est intensifiée depuis le milieu des années 1990. Mais l’intervention de l’Etat est aussi nécessaire pour transformer ces opportunités de croissance et d’emploi en réalité. D’un côté, l’Etat doit mener une politique active de montée en gamme de l’éducation pour que la révolution numérique génère le plus possible de nouveaux et bons emplois. De l’autre, il doit conjuguer politique industrielle et politique de concurrence pour que cette révolution induise une augmentation substantielle et durable de la croissance. »

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Une bonne politique de concurrence sera déterminante face à cette révolution

Pour terminer son propos, Philippe Aghion affirme qu’il faut reformer la politique de concurrence pour bénéficier de cette révolution numérique. En effet, des études récentes ont montré qu’aux Etats-Unis, quelques méga-entreprises (les Gafam), ont profité de la révolution numérique pour acquérir des positions dominantes dans la plupart des secteurs de l’économie grâce à des fusions-acquisitions non régulées.

Cette situation a fini par décourager l’entrée de nouvelles firmes innovantes, ce qui a entraîné un déclin de la croissance américaine. Il faut donc reformer la politique de concurrence pour stimuler l’entrée de nouvelles entreprises et ainsi contrecarrer les effets pervers de la révolution numérique. Au total, les effets de la révolution de l’IA sur la croissance et l’emploi dépendront largement des politiques publiques mises en place pour accompagner cette révolution.

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Pour conclure, la révolution de l’intelligence artificielle présente un potentiel de croissance et d’emploi prometteur, comme le montre l’étude récente sur les entreprises françaises. Cependant, pour concrétiser ces avantages, il est essentiel que les politiques publiques soutiennent activement l’innovation, la formation et la concurrence équitable afin de maximiser les bénéfices de cette révolution technologique.

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Damien Copitet
Je suis étudiant à SKEMA BS après deux années de classe préparatoire au lycée Gaston Berger (Lille). Nous nous retrouvons toutes les semaines pour l'actualité en bref