Voilà une très bonne copie répondant au sujet « Faut-il craindre le retour de la concentration industrielle ? », posé par ESCP et SKEMA à l’épreuve d’ESH des concours 2020.
Comment bien analyser un tel sujet ?
La formulation du sujet est un classique des sujets d’écrits et d’oraux d’ESH. En effet, le « faut-il craindre » peut être compris de deux manières différentes :
- Le retour de la concentration industrielle doit il nous faire peur, parce qu’il aurait des conséquences néfastes pour notre économie par exemple ? Si oui, quelles conséquences ?
- Le retour de la concentration industrielle est-il un scénario plausible aujourd’hui ? A-t-on dans notre économies les éléments propices à ce retour ?
La réponse au sujet doit contenir des éléments de chacune de ces pistes.
Ensuite, le terme « retour » suppose que la concentration industrielle était déjà présente auparavant. Pour autant, le sujet n’est pas « dans quelle mesure les entreprises étaient elles concentrées au XXème siècle ? » : il ne faut pas faire d’argumentation sur ce point, mais bien comparer la période actuelle avec le passé. Peut être que si la concentration industrielle devait être de retour, elle serait d’une nature différente de celle observée par le passé.
Enfin, le terme clé de ce sujet est évidemment « la concentration industrielle ». Il ne faut pas confondre ce qui est « industriel » avec l’industrie comme on l’entendait pendant la Révolution industrielle, c’est-à-dire le secteur secondaire. L’adjectif « industriel » renvoie aujourd’hui au monde de l’entreprise de façon générale. La copie présentée ici propose une définition assez complète de ce qu’est la concentration industrielle, en lien donc avec la définition d’entreprise :
« Ce qui est industriel relève du domaine de l’entreprise, qui se définit comme la plus petite combinaison d’unités légales de production de biens et services, jouissant d’une certaine autonomie de décisions. C’est une ensemble pérenne qui combine les facteurs de production pour atteindre le plus efficacement possible des objectifs déterminés. Ainsi, la concentration industrielle renvoie à l’augmentation de la taille et la réduction du nombre d’entreprises sur un marché par des processus de fusions-acquisitions, d’investissements de capacité, … dans le but de gagner des parts de marché. »
Après avoir défini tous les termes du sujet, il convient de se pencher plus en profondeur sur son analyse. Si la concentration industrielle devait nous faire peur, quelles en seraient les raisons ? Puisqu’on parle de retour de la concentration, il faut trouver des périodes passées pendant lesquelles la concentration industrielle a été néfaste, et pourquoi. Quand on parle de concentration industrielle, on doit penser aux monopoles et aux oligopoles. Des connaissances de micro- et de macroéconomie sont donc très utiles !
Pourtant, si les entreprises persistent à se concentrer, c’est que la concentration doit avoir des côtés positifs : lesquels ? Quelles sont les conditions pour que les effets positifs l’emportent sur les négatifs ?
Notre deuxième piste de réflexion porte sur la possibilité de ce retour actuellement. Quels sont les facteurs favorables à la concentration ? Quelles sont les conditions de mise en place d’une concentration industrielle qui ne soit pas néfaste ? Une législation souple, une fiscalité relativement modérée pour les entreprises, … sont des éléments à prendre en compte. Pour cela, suivez l’actualité économique régulièrement pour illustrer vos arguments. Vous pouvez par exemple trouver sur Mister Prépa un article sur la relocalisation des entreprises stratégiques liée à l’impulsion de la Covid.
Je vous encourage à vous poser devant chaque sujet les questions :
- Quoi? (thème abordé, sujets à ne pas traiter, …)
- Quand? (période abordée par le sujet : ce sujet précis traite de la période actuelle uniquement, même s’il faut la comparer avec les périodes passées)
- Où? (la concentration industrielle est essentiellement présente dans les pays développés à économie de marché, mais se trouve de plus en plus dans les pays en développement)
- Qui? (quels acteurs économiques sont concernés ? Ici, il y a évidemment les entreprises, mais aussi tous les acteurs qui influencent ou sont influencés par leurs décisions : les pouvoirs publics, les consommateurs, …)
- Comment? (par quels mécanismes les entreprises se concentrent-elles, et comment cela a-t-il des effets (plus ou moins néfastes) sur l’économie ?)
- Pourquoi? (Pourquoi me pose-t-on ce sujet aujourd’hui ? Quels facteurs poussent les entreprises à se concentrer ?)
Cela vous aidera à ne pas oublier d’information lors de l’analyse du sujet.
La construction de la copie
L’introduction de cette copie est structurée comme il faut, c’est-à-dire :
- Une accroche en lien direct avec le sujet
- L’énoncé même du sujet
- La définition des termes du sujet
- La présentation du cadre spatio-temporel choisi
- La problématique (une ou deux questions)
- L’annonce du plan
Chaque partie commence par l’annonce des sous-parties, afin que le correcteur sache où le candidat est rendu dans sa démonstration.
Ce plan n’est ni exhaustif ni parfait, ce n’est qu’une proposition qui résulte d’une réflexion personnelle. D’autres bonnes copies sur ce sujet sont à consulter ici.
Conseils généraux
Vous pouvez dans votre dernière partie défendre une thèse que la plupart ne partageraient pas. Par exemple ici, on défend la concentration industrielle alors qu’actuellement, on aurait plutôt tendance à critiquer les grands groupes internationaux comme les GAFAM. Attention toutefois à ne pas aller trop loin. Il est en général assez mal vu de défendre des théories marxistes en dernière partie (sauf si c’est vraiment bien argumenté), tout comme il faut rester conforme aux « bonnes mœurs » : on proscrit évidemment les propos racistes, négationnistes, voire même climatosceptiques.
Les graphiques sont valorisés s’ils sont parfaitement maitrisés, tout comme les calculs de micro- ou macroéconomie. Attention toutefois à ne pas en abuser si cela n’apporte rien d’autre à la démonstration qu’un étalage de vos connaissances.
Appliquez vous à la rédaction des transitions : puisque les jurys parcourent rapidement la copie, ils sont tendance à lire essentiellement l’introduction, les transitions et la conclusions pour comprendre les grandes articulations de l’argumentation.
Petits tips pour la forme :
Vous pouvez faire 2 ou 3 parties. Les plans à 2 parties ne sont jamais pénalisés, bien que souvent, à qualité égale, les plans à 3 parties sont davantage valorisés.
Reprenez les mots de l’énoncé dans vos titres de parties pour montrer que vous répondes bien au sujet.
Je vous conseille de faire 6 sous parties, que vous fassiez 2 ou 3 parties. Cela permet d’équilibrer votre plan sans risquer d’en écrire trop ou pas assez. Dans leur formulation, liez les comme une seule phrase pour montrer la cohérence de l’argumentation (par exemple avec des connecteurs logiques : de fait, donc, mais , ainsi, …)
Ecrivez toujours 2 ou 3 arguments par sous partie, dont toujours au moins une illustration concrète. Sinon, votre argumentation parait pauvre. En revanche n’en abusez pas mais choisissez la (ou les) plus pertinente(s)
Faites régulièrement des « sous-conclusions » pour montrer où vous en êtes dans votre raisonnement, ce que vous démontrez.
Aérez la copie : vous pouvez sauter plusieurs lignes, mettre des petits symboles entre les parties pour les distinguer et rendre la copie plus lisible.
Ecrivez les noms d’auteurs en majuscules pour qu’ils soient mieux repérables par les correcteurs. Ce n’est pas obligatoire, mais puisque ceux-ci ont des centaines de copies à corriger et qu’ils ne parcourent nos copies que rapidement, s’ils remarquent un nom qui les intéresse, ils s’attarderont peut être davantage sur votre copie.