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Géorgie : comprendre les manifestations contre la “loi russe”

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La Géorgie est un petit pays du Caucase ayant une population de 4 millions d’habitants, à l’extrême-Est de l’Europe et au Sud de la Russie. Situé entre l’Europe et l’Asie, ce pays appartenait autrefois à l’URSS. C’est d’ailleurs le pays de naissance de Joseph Staline. Aujourd’hui, la Géorgie milite pour son indépendance dans une région plus que convoitée et instable.

Depuis la mi-mai 2024, nous observons en Géorgie de massives manifestations populaires. Dans la foule, de nombreux drapeaux géorgiens et européens flottent face aux forces de l’ordre. Dans cet article, l’objectif est de comprendre ces manifestations, ainsi que la place de la Géorgie sur la scène internationale.

 

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Un pays envahi par la Russie : Abkhazie et Ossétie du Sud

En 2008, une guerre oppose la Géorgie à la Russie. Cette dernière soutient militairement les régions séparatistes du territoire géorgien : l’Ossétie du Sud et l’Abkhazie. Ces deux régions se sont déjà auto-proclamées indépendantes de la Géorgie. Au même titre que Lougansk et Donetsk en Ukraine et que la Transnistrie en Moldavie, l’Abkhazie et l’Ossétie du Sud sont des territoires séparatistes pro-russes. Ils déstabilisent les États auxquels ils appartiennent.

Contrairement aux autres régions séparatistes, l’Abkhazie et l’Ossétie du Sud sont déjà fortement dépendantes de la Russie. Tbilissi n’a alors que peu d’influence sur ces régions de son territoire. Pourtant, ces régions ne sont reconnues comme pays que par 5 États : la Russie bien sûr, le Vénézuela, le Nicaragua, Nauru et la Syrie.

Moscou justifie son intervention en affirmant que la majorité des citoyens ossètes possèdent un passeport russe et parlent russe. La Russie souhaite récupérer son influence dans des territoires qui lui appartenaient autrefois. Jean de Gliniasty, diplomate français, parle de “miettes d’empire”. Jean Radvanyi, géographe français, explique que Staline aurait volontairement rattaché ces régions à la Géorgie alors même que leurs habitants étaient d’ethnies différentes. L’objectif était de diviser pour mieux régner.

 

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Manifestations contre la loi sur l’”influence étrangère”

Les manifestations ont principalement eu lieu aux abords du Parlement géorgien. La population exprimait son désaccord face à la loi d’inspiration russe, dite loi sur l’”influence étrangère”. Ce texte est considéré comme une “menace sérieuse pour les droits à la liberté d’expression et d’association” en Géorgie. Après un mois de manifestations parfois sévèrement réprimées par les forces de l’ordre, Tbilissi a adopté le texte avec 84 voix pour et 30 voix contre.

La présidente géorgienne Salomé Zourabichvili a déjà affirmé qu’elle déposerait son véto après l’adoption du texte. Mais, ce geste n’aura aucune influence sur la loi puisque le parti Rêve géorgien, porteur de cette loi, assure avoir suffisamment de voix pour contrer ce véto. Finalement, ces manifestations résument bien la crise politique que traverse la Géorgie.

De nombreuses critiques sont faites concernant cette loi. D’abord, elle impose un contrôle plus strict du financement des ONG, mais aussi, elle éloigne la Géorgie de l’Union européenne. Ce texte, surnommé la “loi russe”, imite une législation existante en Russie et permet la répression des opposants. Les manifestations en Géorgie symbolisent la division politique du pays entre les influences russe et européenne.

 

Les aspirations européennes des Géorgiens

Les manifestants en Géorgie sont pro-européens. En effet, Tbilissi s’intéresse depuis longtemps à rejoindre l’UE et l’OTAN. En juin 2022, juste après le début de la guerre en Ukraine, la Géorgie a candidaté à l’UE. En revanche, contrairement à l’Ukraine ou la Moldavie, la Géorgie ne s’est pas vue accorder le statut de candidate à l’adhésion par Bruxelles. L’UE considère que le pays n’est pas assez performant économiquement et nécessite des réformes concernant sa démocratie.

La Géorgie possède une présidente pro-Bruxelles mais un gouvernement proche de Moscou. La présidente géorgienne, Salomé Zourabichvili, est une ex-diplomate française élue en 2018. Mais elle dispose de moins de pouvoirs que le Premier ministre, tiré du parti majoritaire de l’Assemblée. Rêve géorgien prétend défendre un alignement avec l’UE et l’OTAN mais, dans les faits reste proche du Kremlin.

La Géorgie est un pays coincé entre ses ambitions pro-européennes et son passé et sa dépendance à la Russie. Contrairement à l’Azerbaïdjan, plus peuplé et riche en hydrocarbures, la Géorgie reste pauvre et dépendante de Moscou. D’après la Banque mondiale, le PIB par habitant est de 6,600€, soit 5 fois moins que la moyenne des pays membres de l’UE. Dès lors, il semblerait que l’adhésion de la Géorgie à l’union dans un futur proche soit peu probable.

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Alban Dantin
Actuellement en master à Sciences Po Bordeaux, j'ai d'abord fait deux ans de classe prépa littéraire A/L à Saint-Sernin (Toulouse).