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Les hippopotames de Pablo Escobar en Colombie

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Les hippopotames de Pablo Escobar en Colombie

Les hippopotames de Pablo Escobar, aussi appelés les “hippopotames de la cocaïne”, sont les quatre individus importés d’Afrique par le narcotrafiquant colombien. Il possédait un parc zoologique dans son hacienda Nápoles, près de 150 kilomètres à l’Est de la ville de Medellin. Ce jardin était synonyme de puissance et de richesse, alors même que Pablo Escobar régnait sur le cartel de Medellin, l’une des organisations criminelles les plus influentes du monde.

À la mort de Pablo Escobar en 1993, la propriété de la hacienda Nápoles est confisquée par l’État colombien. La question de la conservation des bâtiments et du sort réservé aux animaux pose des problèmes. De nombreuses espèces sont facilement déplacées dans des zoos ou renvoyées dans leur pays d’origine. Mais concernant les quatre hippopotames, leur poids empêche tout transport. C’est donc pour des raisons techniques et logistiques que les autorités colombiennes ont laissé ces animaux sauvages en liberté, en pensant simplement qu’ils allaient mourir dans un environnement qui n’est pas le leur.

Aujourd’hui, on compte plus d’une centaine d’hippopotames qui se sont propagés dans les forêts colombiennes. Ces animaux sauvages posent de réels problèmes environnementaux, sécuritaires et sociaux. Finalement, nous pouvons dire que plus de 30 ans après sa mort, l’héritage de Pablo Escobar n’en finit pas de peser sur la Colombie.

 

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Des hippopotames en Colombie : quels problèmes ?

L’hippopotame commun est un mammifère semi-aquatique herbivore venant d’Afrique subsaharienne. Pesant entre 1,3 et 1,8 tonne en moyenne à l’âge adulte, l’hippopotame est l’espèce terrestre la plus imposante du continent américain. Sa présence en Colombie est due à l’activité humaine. Leur nombre est passé de quatre individus (un mâle et trois femelles) à plus de 100 individus. Ils constituent le plus grand groupe d’hippopotames sauvages hors d’Afrique.

D’abord, ces mammifères ont un impact écologique majeur sur la faune et la flore locales. Ils sont agressifs et perpétuellement affamés. Ils consomment de grandes quantités de plantes, détruisant ainsi l’habitat de nombreuses espèces. Certaines vont même jusqu’à fuir les fleuves habités par les hippopotames. Les biologistes remarquent une diminution du nombre de lamantins, de caïmans ou encore de loutres. Les hippopotames vont même jusqu’à détourner le cours des fleuves en détruisant les berges. Enfin, du fait de leur grand appétit, c’est leurs selles et leur urine qui posent de réels problèmes dans les eaux des fleuves qui se retrouvent polluées.

Ensuite, l’hippopotame est un animal sauvage et invasif. Si aucune mesure n’est prise, leur nombre devrait atteindre les 400 d’ici à 2030 et plusieurs milliers d’ici 2050, d’après National Geographic. Leur prolifération est due au fait qu’ils se sont très bien adaptés au climat humide des forêts tropicales colombiennes. Contrairement à l’Afrique, ils ne connaissent pas la sécheresse en Colombie et n’ont aucun prédateur. Ils peuvent donc se reproduire très rapidement et se disperser sur le territoire colombien.

Enfin, il faut rappeler que l’hippopotame est un animal dangereux qui peut courir et nager à plus de 30 km/h. C’est la deuxième espèce la plus meurtrière d’Afrique, après le moustique. En Colombie, plusieurs attaques ont déjà eu lieu.

 

Les solutions du gouvernement face à cet animal sauvage et invasif

Lorsqu’il s’est rendu compte de la prolifération de ces animaux sur son territoire et de la gravité de la situation, le gouvernement colombien a d’abord encouragé les Colombiens à chasser les hippopotames. Cette décision a été très impopulaire en Colombie. Les autorités colombiennes ont alors changé de stratégie pour faire face à la présence de cet animal invasif. Aujourd’hui encore, les solutions apportées ne sont pas encore totalement efficaces, du fait d’un manque de financement et de connaissances de l’animal.

L’opération de stérilisation des hippopotames est privilégiée même si elle est coûteuse et qu’elle prend du temps. Elle devrait permettre de diminuer la population de ces animaux en Colombie sans avoir à les tuer. La campagne de stérilisation des autorités colombiennes a pour objectif d’effectuer 40 stérilisations par an. D’après Le Courrier International, chaque stérilisation coûterait $9,800 à l’État. L’hippopotame étant un animal imposant, chaque opération est dangereuse. Mais cette méthode demandant beaucoup de temps, elle est démoralisante pour beaucoup de Colombiens.

La translocation est également une solution envisagée, bien qu’inefficace sur le long terme. L’objectif est de déplacer ces animaux vers des régions colombiennes reculées afin de protéger les habitants. Mais cette méthode n’empêche pas la prolifération de ces animaux et la dégradation de l’écosystème colombien. En revanche, la solution d’un transfert des hippopotames vers des zoos étrangers est encouragée par les biologistes et les autorités colombiennes. La Colombie s’est déjà rapprochée de l’Inde, du Mexique ou encore des Philippines pour qu’ils recueillent ces animaux dans leurs zoos. Ces pays participeraient alors au financement de la capture et du transport des hippopotames.

La solution de l’euthanasie “éthique” est de plus en plus abordée, notamment par le gouvernement colombien. Elle est présentée comme inévitable. En revanche, l’État colombien explique que cette solution doit accompagner les solutions précédentes.

 

Une opinion publique divisée

L’opinion publique colombienne est divisée sur le sujet du sort réservé aux hippopotames colombiens. Mais il semble que la majorité de la population concernée reproche depuis le début la violence du gouvernement colombien face à ces animaux. Pour beaucoup, la solution de l’éradication n’est pas la bonne, car elle ne respecte pas les droits de ces animaux. L’hippopotame fait partie de la Liste rouge mondiale des espèces animales menacées d’après l’Union Internationale pour la Conservation de la Nature.

Le discours animaliste prend une grande importance en Colombie. Il s’oppose au discours conservationniste qui lui aussi, cherche à préserver la nature mais se concentre uniquement sur l’écosystème originellement colombien. Ce dernier est privilégié par les autorités colombiennes.

Ensuite, l’hippopotame est devenu un réel symbole pour les populations locales, même s’il reste un danger. Les villages proches des fleuves envahis par ces animaux ne sont pas d’accord quant aux solutions à mettre en place. Devenu la mascotte de la région d’Antioquia, l’hippopotame possède de nombreuses statues. Ces habitants peuvent parfois être très proches de ces animaux sauvages.

Enfin, l’hippopotame est devenu une réelle attraction touristique. L’hacienda Nápoles a depuis été transformée en parc d’attractions sur le thème des hippopotames. Il attire des milliers de visiteurs chaque année. Trois hippopotames ont été recueillis par les gérants du parc et un musée permet de retracer leur histoire et celle de Pablo Escobar. Le tourisme lié à la présence des hippopotames se fait aussi en zones sauvages. L’observation des hippopotames à la tombée de la nuit en barque fait partie des activités touristiques de la région. Certains Colombiens parlent de développement d’un écotourisme, qui permet à la région de Medellin de dépasser son histoire minée par le trafic de drogues et la violence. Mais ce tourisme est à double tranchant, d’autant plus que la notion d’écotourisme peut être remise en question du fait de leur impact sur la faune et la flore locales.

 

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Alban Dantin
Actuellement en master à Sciences Po Bordeaux, j'ai d'abord fait deux ans de classe prépa littéraire A/L à Saint-Sernin (Toulouse).