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Khâgne : morales utilitaristes et morale kantienne, quelles divergences ?

Sommaire

Qu’est-ce que la morale utilitariste ? Pourquoi est-elle dite conséquentialiste? En quoi s’oppose t-elle à la morale kantienne ? Vous découvrirez dans cet article la morale utilitariste et les divergences entre celle-ci et la morale kantienne.

I – Définition de l’utilitarisme

1. La notion d’utilité

L’utilitarisme fonde son système de morale sur la notion “d’utilité”. Pour les utilitaires, ce qui est utile est bon. Cette doctrine vise à optimiser le plus grand bonheur possible pour le plus grand nombre de personnes. Quel est précisément le lien entre utile et bonheur ? 

Selon Bentham “une action peut être dite conforme au principe d’utilité, ou, pour parler bref, à l’utilité (en visant la communauté au sens large), quand elle est intrinsèquement de nature à augmenter le bonheur de la communauté plutôt qu’à le diminuer. En somme, est utile ce qui favorise directement le bonheur d’une communauté”. Ainsi, pour lui, chaque chose a la faculté de produire un plaisir, un bien, un bonheur ou au contraire, d’éviter le mal, la souffrance.

La finalité de l’utilitarisme est donc l’atteinte du plaisir, du bonheur, du bien, et ainsi l’absence de tout malheur.

 

2. Pourquoi l’utilitarisme est une doctrine conséquentialiste ?

Car ce qui compte pour les utilitaristes lorsqu’un individu fait une action, ce sont les conséquences de cette action, c’est-à-dire si l’action génère du bonheur, du plaisir, du bien. Si oui, alors l’action est bonne, souhaitable. Ainsi, le critère moral de l’utilitarisme est le bien-être ; les conséquences de l’action définissent la moralité de l’action. Tout le contraire de la doctrine kantienne de la morale !

Lire plus : Khâgne : La morale selon Kant, tout ce que vous devez savoir

II – Les deux pères fondateurs de l’utilitarisme : deux conceptions différentes de l’utilitarisme

1. Brèves descriptions

Jeremy Bentham, né en 1748 à Londres et mort en 1832, est un philosophe, jurisconsulte et réformateur anglais.

John Stuart Mill, né le 20 mai 1806 à Londres et mort le 8 mai 1873 à Avignon, est un philosophe, logicien et économiste britannique. 

2. Bentham – Mill : deux conceptions différentes de l’utilitarisme

a. La vision du plaisir : quantité VS qualité

La grande idée de Bentham est que les individus ne conçoivent leurs intérêts que selon le plaisir ou la peine que telle action peut leur procurer. Le but de tout individu, selon lui, est de “maximiser” son plaisir. L’individu mesure son intérêt à faire telle ou telle action en procédant à un calcul hédoniste.

Pour rappel, l’hédonisme est une doctrine selon laquelle la recherche du plaisir et l’évitement de la souffrance constituent l’unique but d’une existence humaine. Bentham invente donc une méthode de calcul du bonheur et des peines permettant de mesurer la quantité de plaisir maximum que l’individu peut espérer tirer d’une action.

La méthode de calcul proposé par Bentham repose sur 7 critères :

  • Durée : Un plaisir long et durable est plus utile qu’un plaisir passager ;
  • Intensité : Un plaisir intense est plus utile qu’un plaisir de faible intensité ;
  • Certitude : Un plaisir est plus utile si on est sûr qu’il se réalisera ;
  • Proximité : Un plaisir immédiat est plus utile qu’un plaisir qui se réalisera à long terme ;
  • Étendue : Un plaisir vécu à plusieurs est plus utile qu’un plaisir vécu seul
  • Fécondité : Un plaisir qui en entraîne d’autres est plus utile qu’un plaisir simple ;
  • Pureté : Un plaisir qui n’entraîne pas de souffrance ultérieure est plus utile qu’un plaisir qui risque d’en amener.

Ainsi, théoriquement, l‘action la plus morale sera celle qui réunit le plus grand nombre de critères, celle qui produit le plus de plaisir ou réduit le plus la douleur. 

b. Bonheur inférieur ou supérieur ?

Pour Bentham, il n’y a pas de hiérarchisation des bonheurs. Son calcul est purement objectif : il s’agit de quantité de plaisir, et non pas de qualité. Par exemple, le plaisir de manger et celui de lire un livre sont égaux. Même si un est intellectuel et l’autre élémentaire, Bentham ne dissocie pas leur nature, le seul qui compte est la quantité de plaisir qu’ils engendrent.

Mill reprend la théorie de l’utilitarisme en s’éloignant tout de même de Bentham sur quelques points, notamment en introduisant une hiérarchisation des plaisirs : pour lui, tous les plaisirs ne sont pas de même qualité. Les plaisirs intellectuels et moraux (comme la lecture, ou l’art) sont de meilleures qualité que les plaisirs physiques (manger ou dormir). Pour Mill, le plaisir de manger est donc inférieur au plaisir de lire, qui est un plaisir plus “élevé”,

III – Morale utilitariste et morale kantienne : points communs et différences

1. Conséquences VS Intentions

Ces deux morales, l’une plaidée par Bentham et Mill et l’autre par Kant, offrent deux visions opposées de ce qu’est une action morale.

Pour les utilitaristes, la moralité des actions est évaluée en fonction de la quantité ou de la qualité de plaisir que les actions génèrent, c’est-à-dire en fonction des conséquences des actions. C’est pourquoi on peut qualifier cette théorie de conséquentialiste.

La morale kantienne, quant à elle, repose sur l’intention qui motive l’action, et non les conséquences.

2. Souplesse VS Rigidité

L’utilitarisme offre une certaine flexibilité quant au jugement de la moralité d’une action. En effet, le “calcul hédoniste” institué par Bentham permet d’analyser chaque plaisir individuellement, et ainsi de s’adapter aux situations particulières.

Au contraire, les impératifs universels kantiens ne permettent pas d’adaptation à des situations particulières. Ces principes offrent un cadre éthique rigide.

3. Respect des individus

Le respect de la dignité de l’autre est un principe fondamental dans l’éthique kantienne, tel que le définit l’impératif : « Agis de telle sorte que tu traites l’humanité, aussi bien dans ta personne que dans la personne de tout autre, toujours en même temps comme une fin, et jamais simplement comme un moyen” . Pour Kant, toute action doit être motivée par une volonté bonne qui ne porte pas atteinte à la liberté ou à la dignité de l’autre.

La morale utilitariste n’est pas aussi catégorique sur ce point : une action portant atteinte à une minorité peut être considérée comme morale du moment qu’elle constitue une source de plaisir pour une majorité.

Conclusion

Pour les utilitaristes, est morale une action dont les conséquences génèrent un plaisir. 

Selon Bentham, la quantité de plaisirs prime sur leur qualité.

Selon Mill, c’est le contraire, les plaisirs sont classés de façon hiérarchique, le plus élevé étant le plaisir intellectuel, et le moins élevé étant les plaisirs physiques.

En opposition avec la morale Kantienne, les utilitaristes ne prêtent pas attention à l’intention qui motive l’action, ce qui constitue au contraire la clef de voûte de la morale kantienne. A contre-courant de la logique kantienne, les utilitaristes accordent plus d’importance au plaisir de la majorité, même si une minorité en subit des conséquences négatives.

Pour Kant, cette logique est impensable puisque non-universalisable : en effet, cette logique ne peut pas être étendue à l’humanité sous peine de nuire au bon fonctionnement de la société.

On comprend donc que les utilitaristes envisagent la morale selon une approche assez collectiviste, en cherchant à générer du plaisir pour le plus grand nombre, mais en dépit des contreparties néfastes pour certains individus. Au contraire, Kant envisage la morale selon une approche universelle, en écartant de ses principes la notion de “plaisir” pour placer au centre de sa réflexion la notion de “volonté bonne”.

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Cindy Moreira